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Nos Lecteurs ont la Parole

I.- Opposition syrienne-14 Mars: une convergence d’intérêts

Ibrahim TABET
Le parallèle entre le combat de l’opposition syrienne contre le régime de la dynastie Assad et celui du 14 Mars contre les visées hégémoniques de l’autoproclamé parti de Dieu n’est pas évident. D’un côté on a affaire à un soulèvement populaire visant à mettre fin à une dictature héréditaire appartenant à une secte minoritaire monopolisant tous les rouages de l’État depuis quarante ans. Et de l’autre à une opposition démocratique visant à redonner à l’État le monopole de la force armée usurpée par l’État dans l’État. À Damas, il s’agit de conquérir enfin la liberté. À Beyrouth, de la défendre face à la menace que fait peser sur elle l’arsenal du Hezbollah. Mais bien qu’ils n’aient ni la même nature ni les même objectifs, les deux combats ont des dénominateurs communs :
- Ils visent tous les deux des adversaires ayant perdu leur légitimité. Le pouvoir syrien du fait de sa répression féroce contre son peuple. Le Hezbollah, depuis qu’il a retourné ses armes contre ses concitoyens. Sans compter la probabilité que le Tribunal spécial pour le Liban achève de la miner en démontrant leur complicité dans l’assassinat de Rafic Hariri et les attentats visant les opposants à l’occupation syrienne du Liban, confirmant ainsi les soupçons de terrorisme pesant sur eux.
- Ils opposent d’une part le front du refus de l’hégémonie israélo-américaine, et de l’autre le camp arabe « modéré » et prooccidental formé autour de l’Arabie saoudite wahhabite, obsédée par la constitution d’un « croissant chiite » dominé par la théocratie iranienne héritière de la Perse impériale. Cela dit, côté syrien, ce refus est surtout rhétorique et s’appuie notamment sur la capacité de nuisance du régime sur la scène libanaise. De la même manière, le Hezbollah instrumentalise la « Résistance » au profit de son véritable objectif : le rééquilibrage du pouvoir en faveur de la communauté chiite. Aspiration normale dans le cadre d’un régime politique confessionnel, celle-ci a conduit à la marginalisation de facto de la présidence du Conseil après celle de la présidence de la République. Mais réalisée sous la menace des armes, elle est d’autant plus inacceptable que celles-ci sont aussi au service des intérêts d’une puissance étrangère.
- À ces divergences politiques se superpose le clivage régional entre sunnites d’une part et chiites et alaouites, desquels ils sont proches, de l’autre. La présence active de chrétiens au sein du 14 Mars ne dépassant pas le cadre libanais.
- Enfin, les deux combats s’inscrivent dans le même mouvement de l’histoire. Celui des progrès de la démocratie dans un monde où les pays arabes et l’Iran font partie des exceptions et où la Turquie fait figure de modèle musulman.
Dans ce contexte, il est clair qu’il existe une convergence d’intérêts entre l’opposition syrienne et le 14 Mars. Et l’issue du bras de fer entre ce dernier et le Hezbollah dépendra largement de celle du « printemps de Damas ». Pour le moment, celui-ci a tout l’air de devoir faire place à un long hiver, tant les deux adversaires semblent être dans l’impasse. D’un côté, Damas et Alep n’ont pas bougé, et l’opposition est trop faible pour faire chuter le régime. Sa fragmentation entre réformistes et partisans de la chute du régime, islamistes et laïcs, opposants de l’intérieur et de l’étranger l’empêche d’adopter une position commune. Enfin, la présence d’islamistes en son sein effraye les minorités religieuses. Et de l’autre, le régime combine répression et promesses de réformes, ce qui est de bonne guerre ne serait-ce que pour négocier en position de force. Mais malgré sa férocité, la répression n’a pas réussi à dissuader les manifestants. Les promesses de réformes non tenues ne se comptent plus. Et le rejet de l’opposition de l’offre de dialogue du pouvoir a transformé celui-ci en monologue. Quant à l’Occident, il a peu de moyens de pression sur le régime. Et les influences concurrentes d’Ankara et de Téhéran à Damas sont plus importantes que celles de Washington et Paris. Reste l’économie qui souffre davantage de l’instabilité de la scène intérieure que des sanctions internationales qui n’ont jamais eu beaucoup d’effet. Celle-ci est sans doute le talon d’Achille du pouvoir, une aggravation de la crise risquant de lui faire perdre le soutien de la moyenne et haute bourgeoisie urbaine qui a bénéficié de sa politique d’ouverture. D’où la nouvelle à confirmer concernant une aide financière iranienne massive. Mais la République islamique en a-t-elle les moyens ?
Quels sont dans ce contexte les scénarios possibles et leurs conséquences sur la Syrie et le Liban ?
(à suivre)

Ibrahim TABET
Le parallèle entre le combat de l’opposition syrienne contre le régime de la dynastie Assad et celui du 14 Mars contre les visées hégémoniques de l’autoproclamé parti de Dieu n’est pas évident. D’un côté on a affaire à un soulèvement populaire visant à mettre fin à une dictature héréditaire appartenant à une secte minoritaire monopolisant tous les rouages de...

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