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Liban - Le commentaire

L’assistanat, plaie tutélaire du Liban politique

Il faut, certes, remercier l'Arabie saoudite, l'Égypte, la Syrie, Qatar et tous les pays amis qui se préoccupent de la sécurité comme de la stabilité du Liban. N'empêche que l'assistanat est une médaille dont le revers est bien plus lourdement plombé que la face. Et qu'il y a toujours un prix à payer pour ses prestations. L'histoire de notre pays le démontre amplement. La responsabilité revenant, évidemment, aux pôles d'une classe politique locale qui courent derrière des soutiens, ou des arbitrages, étrangers. Confirmant le reproche d'immaturité adressé si souvent à ce Liban d'aujourd'hui, jugé si incapable de se gouverner qu'il mériterait d'être remis sous tutelle. Il n'en a pas toujours été ainsi, rappelle un ancien ministre chevronné. Les premières générations de l'indépendance, et d'avant, étaient si qualifiées, assumaient si bien leurs responsabilités, qu'elles étaient fréquemment sollicitées pour des rôles de conciliation, ou d'arbitrage, dans des conflits interarabes, ou au sein d'un pays frère.
Jusqu'à quand les dirigeants libanais vont-ils rester incapables de se gouverner ? En 1975, une guerre libano-palestinienne, bien vite doublée d'une guerre libano-libanaise, a éclaté. Elle n'a pris fin que par une intervention arabe débouchant sur une force de paix multilatérale, dite de dissuasion, qui a été rapidement phagocytée par la Syrie. Ses troupes sont restées pendant trente ans, à l'ombre d'un pacte de Taëf qu'elle a tronqué.
Malgré des législatives libres, les leaders libanais ne sont parvenus à s'entendre sur l'élection d'un président de la République, et la formation d'un gouvernement, qu'après une nouvelle intervention arabe, imposée par le 7 Mai. Mais l'accord de Doha ne les empêche pas de se disputer sérieusement sur l'acte d'accusation avant même qu'il paraisse. D'où un danger de discorde aggravée qu'Israël pourrait exploiter pour frapper le Liban, et d'autres pays de la région, pour imposer aux Arabes une paix de capitulation. Sur initiative du souverain wahhabite, les Arabes s'empressent donc de désamorcer la bombe à retardement libanaise. Le roi Abdallah, son bâton de pèlerin en main, a donc démarché d'urgence autant l'Égypte, la Syrie et la Jordanie que le Liban. Il a tenu un sommet à Baabda avec le président Michel Sleiman et avec le président Bachar el-Assad. Immédiatement épaulé par l'émir du Qatar, qui, lors de sa visite, a insisté sur une consolidation de la stabilité et de la sécurité libanaises passant par l'apaisement des tensions politiques.
L'ancien ministre cité souligne que, joueur jadis fort considéré sur les scènes extérieures, le Liban est maintenant passé au statut de jouet manipulé. Parce que, depuis 1975, son système n'a cessé de se dégrader, les institutions se trouvant empêchées de fonctionner normalement. Alors qu'auparavant, la démocratie parlementaire, exercée dans les règles, permettait de corriger les erreurs de trajectoire et de faire rendre compte à tout fautif. C'est-à-dire que la sanction tombait des urnes. Mais les dérives accumulées ont fait que la volonté de l'électorat est devenue le dernier souci de professionnels dont la carrière s'abreuve à la source de parachutages, ou d'appuis déterminants, étrangers. Depuis 1975, le pouvoir libanais se fie beaucoup moins à ses capacités propres qu'au concours extérieur. Il est donc normal qu'il demeure immature, avec besoin d'assistance sinon de tutelle. Tandis que dans le passé les dirigeants libanais étaient beaucoup moins sous influence, pour une bonne raison essentielle, qui les distingue de leurs épigones : ils faisaient passer l'intérêt national avant tout. Avant leur propre intérêt personnel, et, surtout, avant l'intérêt des manipulateurs du dehors.
Un moment après le retrait des troupes syriennes, les Libanais ont espéré que le verdict des urnes allait leur redonner cette démocratie parlementaire qui induit que le pouvoir soit assumé par la majorité, tandis que la minorité surveille, censure et s'oppose. Dans une perspective éventuelle d'alternance. Mais il a fallu déchanter, à cause du chantage des armes. Et accepter ce contresens baptisé démocratie consensuelle qui mélange, en un même gouvernement, majorité et minorité, en faisant passer à la trappe le pouvoir parlementaire. Comme on ne peut marier l'eau et le feu, le Liban continue à subir crise sur crise. Et, encore une fois, il faut une intervention arabe pour calmer le jeu. Sans garantie du gouvernement, cela va sans dire, car l'on ne sait ce qu'il va advenir lorsque le TSL aura publié son acte d'accusation. Ou même avant, parce que les menaces, maintenant que les hôtes augustes sont repartis, peuvent reprendre à tout moment. Pour conclure, on observera que le Liban dansera toujours sur une corde d'acier tant que ses responsables ne sauront pas s'entendre. Entre autres sur ce point : toujours laver son linge sale en famille, dans un esprit de propreté plutôt que de querelle.
Il faut, certes, remercier l'Arabie saoudite, l'Égypte, la Syrie, Qatar et tous les pays amis qui se préoccupent de la sécurité comme de la stabilité du Liban. N'empêche que l'assistanat est une médaille dont le revers est bien plus lourdement plombé que la face. Et qu'il y a toujours un prix à payer pour ses prestations. L'histoire de...
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