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Pourquoi le Liban et le Hezbollah ne peuvent pas signer un accord de paix israélo-arabe

Par Nadim HASBANI
Le Liban n'est pas préparé à d'éventuelles négociations dans le cadre de la nouvelle initiative du président Obama pour relancer le processus de paix. Débarrassée de la domination syrienne, Beyrouth, est encore inapte au moindre débat interne concernant l'approche à adopter par rapport à un processus de négociation.
Paradoxalement, les négociations de paix pourraient même replonger le Liban dans une énième guerre civile sur fond de disputes sectaires. Elles pourraient provoquer de nouvelles divisions internes entre ceux qui voient un avantage dans la paix et ceux qui, à l'instar du Hezbollah, tirent profit de la guerre. Dès lors, on préfère aujourd'hui éviter le sujet et discuter plutôt des portefeuilles ministériels - bien plus lucratifs.
Mais pourquoi n'est-il pas dans l'intérêt du Hezbollah de se joindre au processus de paix ? Dans son discours à l'occasion du dernier jour du ramadan, son secrétaire général, Hassan Nasrallah, affirmait que les parties arabes qui avaient négocié ont cédé sur beaucoup d'aspects concernant la cause palestinienne, sans rien obtenir en retour des Israéliens. Or aux yeux de beaucoup, Nasrallah voit juste.
Mais la communauté internationale doit dorénavant reconnaître qu'il ne sera pas possible d'aboutir à une résolution durable du conflit israélo-arabe sans l'implication du Hezbollah (et du gouvernement libanais) dans les négociations de paix. Il faut éviter de répéter la malheureuse expérience de marginalisation du Hamas qui n'a conduit qu'à l'intensification des combats intrapalestiniens et à leur division territoriale.  
L'actuelle émergence et implication du parti de Dieu sur la scène politique locale libanaise constitue une nouvelle donne essentielle par rapport aux années 1990, qui virent la signature des accords de Madrid et d'Oslo. À cette époque, le Hezbollah était encore un acteur relativement marginal au nom duquel la Syrie parlait. Mais depuis, le parti s'est imposé comme incomparable force militaire et politique, parlant pour la communauté chiite libanaise. Mais sa puissance et sa popularité au Liban sont essentiellement dues à ses « victoires » militaires contre Israël. Toute paix avec l'État hébreu couperait donc le Hezb de sa source de prestige.      
Le Hezbollah puise également sa force dans l'appui Iranien. Le parti de Dieu dépend de l'aide militaire et financière de l'Iran - et tant que Téhéran continuera de voir en Tel-Aviv un ennemi, le Hezbollah continuera de s'élever contre la paix.
Le plan de paix de Barack Obama sera probablement rejeté par le Hezbollah, ses alliés libanais et l'Iran. Parallèlement, d'autres parties libanaises, soutenues par l'Arabie saoudite, instigatrice d'une autre initiative de paix, voudront s'investir dans les nouvelles négociations. C'est ici que la fragile trêve régnant entre les divers groupes confessionnels libanais pourrait s'effriter.
La question est donc de savoir comment convaincre le Hezbollah des avantages du processus de paix. Pour que le Liban puisse signer un quelconque traité de paix avec Israël, l'un des trois scénarios suivants devrait se réaliser.
Le premier et improbable scénario prévoirait la chute du régime iranien actuel. Puisqu'il s'agit là du principal soutien extérieur du Hezbollah, l'organisation du parti s'en trouverait inévitablement affaiblie et verrait à ce moment une valeur ajoutée à la paix. Mais le régime iranien est remarquablement résilient.
La deuxième possibilité serait de parvenir à changer l'état d'esprit de la communauté chiite, qui constitue la base électorale du parti islamiste, particulièrement au Liban-Sud. Les Libanais du Sud ont en effet été victimes d'invasions et bombardements israéliens pendant des décennies, et presque toutes les familles chiites de la région ont un proche engagé dans les rangs du Hezbollah, civils ou militaires. Par conséquent, il est encore inimaginable pour eux de se voir cohabiter en paix avec leur agresseur de toujours.
Le troisième scénario - également le plus probable - serait l'apparition d'une fracture au sein même de la communauté chiite, qui affaiblirait la popularité du Hezbollah (cette dernière, ayant atteint un summum grâce à l'homogénéité du soutien indéfectible de la grande majorité des chiites, ne peut plus augmenter). Confronté à une possible perte de soutien, le Hezbollah en viendrait à considérer les bénéfices de la paix en termes de stabilité et de développement et qui lui permettraient de reconquérir l'opinion chiite.
Certains dirigeants religieux chiites libanais - arabes, donc - ont depuis longtemps pris leur distance avec l'Iran perse, comme Mohammad Hussein Fadlallah. Ce dernier est loin d'embrasser l'idéologie sur laquelle repose la révolution iranienne, ayant pour concept-clé celui de wilâyat al-faqîh, dont le dirigeant suprême iranien, l'ayatollah Khamenei, puise son autorité religieuse et politique auprès des chiites tant iraniens qu'arabes, mais aussi auprès du Hezbollah.
Les dirigeants du Hezbollah affichent de leur côté une forte réticence à débattre du wilâyat al-faqîh, de peur de faire ressurgir cette fracture au sein de la communauté chiite libanaise entre pro et anti, et donc, d'affaiblir leur position respective.
Finalement, seule une intégration plus profonde de la communauté chiite dans le système politique libanais offrirait à la communauté le luxe de pouvoir se distancier de l'option militaire - qui lui a permis de sortir de sa marginalisation politique - et de considérer l'option de la paix. Au vu de l'absence d'une position commune libanaise au sujet de la participation à un processus de paix, la récente initiative de paix d'Obama pourrait bien avoir des effets déstabilisateurs. En plus d'être tragique, ce manque de coordination fait rater au Liban une occasion en or de pouvoir négocier avec Israël d'une position de force au vu des acquis militaires du Hezbollah postguerre de juillet 2006.
Le Liban n'est pas préparé à d'éventuelles négociations dans le cadre de la nouvelle initiative du président Obama pour relancer le processus de paix. Débarrassée de la domination syrienne, Beyrouth, est encore inapte au moindre débat interne concernant l'approche à adopter par rapport à un processus de...

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