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Nos Lecteurs ont la Parole

Petits meurtres entre amis

Par Élias R. CHEDID
Rien ne l'aura protégé. Ni la fin de la guerre. Ni la fin de l'occupation. Ni la fin de l'agression d'après-guerre. Ni Doha. Ni les fameuses élections, cet épais écran de fumée.
Georges Abou Madi est mort assassiné à coups de couteau. Par des sauvages, donc, car il n'est que des sauvages pour assassiner, et qui plus est à l'arme blanche. Des sauvages qui habitaient vraisemblablement à quelques centaines de mètres de lui à vol d'oiseau.
Que de différences, dans ce pays qui se prétend un et indivisible. Que d'inconciliables différences. Dans le pays de Carlos Ghosn et de Charles el-Achi, de Reem Acra et d'Élie Saab, de Mika et de Kamaro, d'Edika et de Zeina Abirached, il y a aussi des barbares sans ambition - ni avenir, maigre consolation - qui circulent en mobylette et massacrent quiconque oserait se trouver sur leur passage à coups de cran d'arrêt.
Le silence des politiciens est l'autre point noir de cette histoire. Il est vrai que tout ceci contredit les inepties qu'ils nous servent au quotidien. La vie en commun par-delà nos différences érigée en idéologie. La feuille d'entente. La révolution du Cèdre. Rien qui puisse en tous les cas sécher les larmes de la famille de Georges Abou Madi ou apaiser leurs souffrances. Rien qui puisse les consoler. Pas une cause plus grande, que cette mort aurait servie. Pas d'exemple à ne pas suivre. À moins que les criminels ne soient un jour punis, que la justice fasse son œuvre, que la racaille de basse condition cesse d'être protégée par la racaille en haut lieu.
Pour briser le silence, deux Gemayel peut-être, bien intentionnés, entonnant des slogans d'antan. Mais sans moyens, comme un navire qui chavire, avec une allure de première croisade, celle des pauvres et des démunis.
Que faire pour que l'on s'en tienne là? Que faire pour dissuader les criminels d'une récidive ? Que faire pour qu'ils ne fassent pas d'émules ?
On peut continuer à se gausser de la feuille d'entente et de la révolution du Cèdre, ces formidables instruments d'une paix civile dont nous ne semblons jamais devoir voir la couleur, se targuer d'être tous des frères ou au moins de bons amis. On peut aussi, avant que l'on n'oublie comme on l'a fait pour tant d'autres le sacrifice de Georges Abou Madi, décider d'ouvrir enfin les yeux, et de dresser franchement et sans arrière-pensées le bilan du vouloir-vivre ensemble.
Rien ne l'aura protégé. Ni la fin de la guerre. Ni la fin de l'occupation. Ni la fin de l'agression d'après-guerre. Ni Doha. Ni les fameuses élections, cet épais écran de fumée.Georges Abou Madi est mort assassiné à coups de couteau. Par des sauvages, donc, car il n'est que des sauvages pour assassiner, et qui plus est...

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