À la recherche d’un temps perdu

Il y a quelque chose de commun à ces trois travaux pourtant si différents d'apparence : la nostalgie d'un certain passé. Les deux filles Nahlé ne sont plus inconnues du public. De par la filialité qu'elles représentent d'abord (elles sont toutes les deux les filles de l'artiste Wajih Nahlé ) et par le travail novateur qui s'est inscrit au fil du temps dans la dynamique artistique libanaise .
Par les sculptures en verre qu'elle dessine et conçoit toute seule pour les réaliser par la suite par des maîtres verriers à Murano, Gina Bauer refait vivre le charme d'un temps passé - et prouve que l'art n'est pas un produit de consommation, mais bien un phénomène en marche avec l'histoire. « C'est une grande chance de réaliser mes idées dans cette matière que mes ancêtres les Phéniciens ont commencé à travailler et que les grands maîtres de Murano poursuivent...» Avec elle, donc, la sensibilité phénicienne s'harmonise avec le goût italien. Ses œuvres, présentées d'abord lors du festival al-Bustan il y a quelques années, semblent être « chez elles » aujourd'hui. Placées sur les colonnades romaines, elles dialoguent avec le passé et assurent la continuité. « Tout le présent dans ce lieu féerique parle du passé, avoue l'artiste, c'est pourquoi je suis ravie et honorée d'exposer mes sculptures dans les jardins de ce musée. » C'est une collection haute en couleur qui, outre certaines figures iconiques, vise à magnifier la silhouette et les courbes de la femme universelle. Layal, la féminité qui se décline en différentes couleurs certes, mais également en diverses significations : la femme gaie, séduisante ou élégante, et qui déploie ses atouts sous les mains magiques des trois maîtres avec lesquels l'artiste a collaboré : Mario Costantine, Roberto Cammozo et Elio Rafaelli.
Les sculptures de Gina Bauer prennent une autre dimension dans cet endroit au passé historique et encadrent par ailleurs deux autres travaux tous deux novateurs dans leur genre.

Conjuguer le passé au présent
Issue d'une famille d'artistes peintres, Lina Pokorny a opté, dans son parcours artistique, pour la photo, mais dit néanmoins « peindre avec (ses) yeux ». Sur ses clichés en noir et blanc, qu'elle macule de taches de couleurs « pour mettre l'accent sur un sujet donné, précise-t-elle, l'artiste traduit son amour pour la photo et la peinture en les fusionnant. « Mon voyage en Inde a été l'occasion de jouer avec les contrastes. Mes prochaines destinations seront certainement en Asie, continent de toutes les similitudes et de toutes les différences », poursuit-elle.
Si Lina Pokorny essaye d'aller au-delà de la photographie traditionnelle pour reproduire ses émotions de voyage, son mari, lui, tente, dans une série d'œuvres picturales colorées, une approche surréaliste. Wolfgang Pokorny reproduit dans ses œuvres, souvent en grand format, un grand bond dans le postmodernisme. Dans son univers en trois dimensions, il invente et crée des créatures nouvelles, futuristes. Sous le grand chapiteau qu'il a dressé, à volumétrie diversifiée, on y perçoit une nostalgie du monde de l'enfance. Le clown unijambiste, les montagnes russes ainsi que les bêtes de foire composent un espace magique aux couleurs vives et lumineuses. Cet artiste allemand, également originaire d'une famille de peintres, fait ainsi le lien, à sa manière, entre passé et présent, réalité et fiction.

* Jusqu'au 8 octobre. Horaires d'ouverture : de 10 heures à 18 heures.