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Liban - Séminaire

Le Web… ça presse !

À l'heure du Web triomphant, l'avenir de la presse serait-t-il menacé ? Quels sont les enjeux de ce passage inévitable au numérique pour les médias traditionnels et les moyens pour eux de s'y adapter ? Ce débat d'actualité était au menu d'un séminaire organisé par le Centre culturel français, du lundi 14 au jeudi 17 septembre, au cours duquel sont intervenus : Éric Scherer, journaliste et blogueur à l'AFP, Philippe Couve, animateur de l'Atelier des médias de RFI, et Pierre Haski, cofondateur du site Rue89.
Durant ces quatre jours d'échange d'expertise, d'expérience et d'opinions entre ces professionnels et les acteurs des médias libanais, dont L'Orient-Le Jour, le séminaire a été également l'occasion de rebondir sur des sujets divers et variés mais qui reviennent tous sur la même question : comment protéger le journalisme papier traditionnel de ce « tsunami » numérique ? En le reniant ou plutôt en s'y modelant ?
Avec le Web, deux énormes horizons ont été ouverts à l'internaute : l'interactivité et la richesse de contenus disponibles partout et en permanence ! Face à cette réalité, les médias traditionnels se sont heurtés à plusieurs formes de ruptures simultanées, dont nous citons l'absence d'une valeur économique et donc d'un modèle d'affaires pertinent pour la presse, notamment avec la diffusion large et gratuite de l'information, les annonceurs qui trouvent sur le Web un plus large champ de visibilité et la récession économique qui n'épargne presque personne.
Des colonnes entières de texte ne suffisent plus à gagner du terrain si elles ne sont pas, au moins, accompagnées par des outils technologiques et médiatiques développés. Le problème, à ce niveau là, se précise dans le manque de formation de la grande majorité des journalistes traditionnels à ces nouvelles techniques désormais nécessaires pour capter l'attention du lecteur, qui ne fait plus que lire un papier, mais en lit une dizaine en même temps, écoute de la musique et communique avec ses amis...
Aujourd'hui, l'abondance de l'info remplace la rareté de l'info. Le journaliste ne monopolise plus le terrain médiatique et ne peut plus rester « renfermé sur lui-même », rédigeant un papier sur une information que tout le monde connaît déjà ! Il est confronté à la concurrence de ses sources, de sa propre audience ou à des algorithmes qui agrègent et désagrègent l'information. À travers le développement des « blogs » et des médias contributifs, certains parlent de « journalisme citoyen » ou de « journalisme participatif », d'autres de « désintermédiation »... Qu'importe, le résultat est le même : l'information n'a plus besoin de ses journalistes pour toucher sa cible.
Face à ce nouveau paysage, les médias traditionnels restent réticents. Mais la rapidité de l'évolution du Web les appelle à une réaction. Ils ont déjà perdu près d'un tiers de leurs rédactions depuis l'an 2000 et beaucoup d'entre eux ont déjà déposé leur bilan !
Et pour réagir, il faut d'abord prendre conscience que l'écriture pour le Web n'est pas la même qu'écrire un papier. L'enrichissement des contenus avec des outils multimédia (vidéo, photo, diaporama, graphisme...) est indispensable. Penser à organiser son contenu et le mettre dans son contexte, penser à hiérarchiser le flux d'informations qui arrivent de tous bords et des internautes eux-mêmes qui participent à ce processus, écrire concis et plus court en ajoutant sous forme de liens les documents ou textes qui alourdissent le papier mais qui lui sont indispensables, intégrer des visuels, animer sa page et la mettre en relief, écrire pour être référencé, penser multimédia... penser interactivité... est la recette !
Facebook, Twitter... ce n'est pas fait juste pour s'amuser ! Ces réseaux sociaux s'avèrent aussi être, aujourd'hui, la clé pour un média de la « génération Web ».
La nouvelle dimension de la circulation de l'info, par les réseaux sociaux, change la donne puisque ce n'est plus la marque du média qui fait la totalité du trafic, mais la recommandation des articles à l'intérieur de ces réseaux...
Ainsi, Rue89 est le premier site indépendant d'information et de participation en France... un site qui compte en grande partie sur ses lecteurs et qui établit avec eux une relation « d'égalité professionnelle »... Rue89 est un exemple d'expériences de journalistes « traditionnels » qui ont pris conscience de tous ces changements et qui n'ont pas eu peur de s'embarquer dans l'aventure, à leurs risques et périls. Résultat : âgé d'à peine deux ans, Rue89 est parmi les sites les plus visités en France.
La formule Rue89, c'est quoi ? C'est la participation, l'interaction et le partenariat avec d'autres sites ou blogs. Rue89 a osé et réussi... Une nouvelle philosophie de totale gratuité et de partage, une rentabilité basée sur des services indépendants d'info (formation, création de sites...) et la publicité. Cela revient à distribuer gratuitement sa production et son contenu pour pouvoir vendre des services et des relations.
Rue89 a certes pris le risque, mais il a compris que le secteur des médias avec Internet est un domaine de défi... Le papier le plus réussi d'un journaliste n'est-il pas celui qui jongle avec le danger et l'inaccessible ?
« L'avenir des journaux est à chercher dans le numérique », a prédit dernièrement le magnat de la presse, Rupert Murdoch, dans une interview à la chaîne Fox Business Network, estimant qu'« il faudrait 10 à 15 ans pour que les lecteurs abandonnent complètement le papier ».
Cela peut ne pas être vrai... mais cela peut tout aussi bien l'être... Ce qui est irréfutablement vrai, en revanche, c'est que le journalisme est déjà à l'heure du Web et qu'une attitude de déni s'avérerait complètement suicidaire !
À l'heure du Web triomphant, l'avenir de la presse serait-t-il menacé ? Quels sont les enjeux de ce passage inévitable au numérique pour les médias traditionnels et les moyens pour eux de s'y adapter ? Ce débat d'actualité était au menu d'un séminaire organisé par le Centre culturel français, du lundi 14 au jeudi 17...
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