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Législatives : juin 2009 - Pour aller plus loin

Marasme et tension… en attendant de nouveaux développements

Sauf miracle - ce qui heureusement est toujours possible -, le gouvernement ne semble pas devoir être formé de sitôt. Depuis le temps qu'on l'annonce, les Libanais se sont habitués à cette idée et ne semblent plus vraiment se préoccuper du sort du gouvernement d'union nationale.
Mais l'élément nouveau dans cette situation est la multiplication des incidents sécuritaires et, surtout, le ton de plus en plus élevé utilisé par les protagonistes. Si toutes les parties semblent attendre un développement quelconque, local ou régional, elles préfèrent apparemment le faire dans un climat de tension, et non dans le calme ou dans une certaine sérénité. Des sources proches de l'opposition estiment que les développements possibles sont soit une attaque israélienne, qui semble toutefois écartée pour l'instant, pour les raisons développées par le secrétaire général du Hezbollah dans son dernier discours, soit la convocation par le Tribunal spécial pour le Liban de responsables du Hezbollah dans le cadre du procès de l'assassinat de l'ancien Premier ministre Rafic Hariri. Selon ces sources, c'est ce qui expliquerait les attaques de plus en plus virulentes lancées par le camp du 14 Mars contre le Hezbollah. Les sources de l'opposition rappellent que les attaques ont commencé à cibler le chef du CPL le général Aoun, l'accusant d'entraver la formation du gouvernement, puis, insidieusement, elles ont commencé à glisser vers le Hezbollah, d'abord pour lui demander de faire pression sur Aoun, et ensuite pour l'accuser d'être celui qui le manipule dans le but d'empêcher la formation du gouvernement, à la demande de ses alliés, la Syrie et l'Iran. Il s'agirait donc d'un plan bien établi visant à faire petit à petit monter la tension contre le Hezbollah pour préparer le terrain à la décision annoncée du TSL. Les sources de l'opposition relèvent aussi la dualité dans l'attitude du Premier ministre désigné Saad Hariri qui tient un discours apaisant alors que les membres de son courant multiplient les accusations et les propos violents contre Aoun et la formation chiite. Les propos de Moustapha Allouche au sujet de l'existence de cellules du Hezbollah à Tripoli s'inscriraient ainsi dans ce cadre, visant à raviver la discorde entre sunnites et chiites. De la sorte, lorsque le TSL convoquera, même pour une simple audition, des cadres du Hezbollah, le pays sera divisé et une partie des Libanais accepterait la convocation alors que l'autre voudrait la rejeter. Ce qui compte, estiment les mêmes sources, ce n'est pas que les cadres se rendent à la convocation, mais le chaos qui devrait régner dans le pays à la suite d'une telle décision, dans un climat de division. Affaiblir Aoun pour mieux isoler le Hezbollah en discréditant ce dernier pour en faire d'abord l'agent de la Syrie et de l'Iran, puis pour le présenter comme le véritable obstacle à la formation du gouvernement, avant de l'accuser de chercher à créer des cellules sur l'ensemble du territoire pour rééditer le 7 mai 2008 et hors du Liban, comme c'est le cas en Égypte : telles seraient en gros les grandes lignes du plan, selon les sources de l'opposition. Dans un tel climat d'hostilité, son implication éventuelle dans l'assassinat de Rafic Hariri n'étonnerait plus et ne susciterait pas une vaste condamnation du TSL au Liban.
Les sources de l'opposition ajoutent qu'en réalité, c'est le même projet qui continue depuis l'adoption par le Conseil de sécurité de la résolution 1559 en 2004 : en finir avec les armes du Hezbollah pour rassurer Israël. Depuis cinq ans, tous les moyens ont été tentés et tous les événements qui se sont succédé au Liban étaient plus ou moins liés à cet objectif : l'agression israélienne de juillet 2006, l'encerclement diplomatique, le renforcement de l'armée libanaise, les tentatives de provoquer une nouvelle guerre d'usure interne qui enlèverait au Hezbollah son aura de résistance, l'exacerbation de la tension entre sunnites et chiites, etc. Ce qui se passe aujourd'hui ne serait qu'une tentative de plus. Les sources de l'opposition ajoutent à ce développement les déclarations des dirigeants israéliens qui conseillent au Premier ministre désigné de ne pas intégrer des membres du Hezbollah au sein de son équipe gouvernementale, allant même jusqu'à affirmer que s'il ne tient pas compte de cet avertissement, Israël ferait assumer la responsabilité de toute provocation du Hezbollah à l'ensemble du gouvernement... Certes, le bureau de Saad Hariri a aussitôt riposté à ces menaces en déclarant que le Premier ministre désigné n'envisage pas de former un gouvernement sans le Hezbollah, mais les sources de l'opposition estiment qu'en même temps, il n'est plus aussi pressé de former son équipe ministérielle. Les mêmes sources affirment que le statu quo actuel est devenu moins coûteux que la formation du gouvernement. Car l'éclatement d'un gouvernement d'entente nationale est plus grave que des tiraillements au sein d'une équipe minée par les conflits et chargée uniquement de gérer les affaires courantes.
L'heure est donc à l'attente et, pour de nombreux analystes, le climat actuel ressemble fort à celui qui prévalait avant la conférence de Doha, la violence en moins et la position de Walid Joumblatt en plus. Voyant venir une grave crise interne (il avait été le premier à dénoncer la publication d'un nouveau Der Spiegel), le chef du PSP a préféré retirer son épingle du jeu et, surtout, placer sa communauté dans une position de neutralité positive pour épargner la Montagne et ses habitants, au cas où le scénario d'un nouvel affrontement interne devait se préciser.
Mais en dépit du marasme ambiant, sur fond de soirées estivales enflammées, le scénario de l'affrontement interne n'est pas inéluctable. Le président de la République tente encore de favoriser la formation du gouvernement dans les plus brefs délais, et il devrait tenir un discours prônant l'entente au cours de l'iftar du 1er septembre à Baabda, alors que beaucoup d'espoirs sont placés dans les prochaines rencontres au sommet dans le cadre de la session ordinaire de l'Assemblée générale des Nations unies à la mi-septembre, ou alors au cours de la grande réunion de Riyad, le 23 septembre, à laquelle le roi Abdallah a convié les présidents Obama, Sarkozy, Assad et Sleiman (entre autres), à l'occasion de l'inauguration d'une université islamique en Arabie. En effet, nul ne se fait plus d'illusions : le seul événement de nature à accélérer la formation du gouvernement libanais serait le réchauffement des relations syro-saoudiennes avec l'aval des États-Unis, car il signifierait une pause dans le projet de désarmer le Hezbollah...
Mais l'élément nouveau dans cette situation est la multiplication des incidents sécuritaires et, surtout, le ton de plus en plus élevé utilisé par les protagonistes. Si toutes les parties semblent attendre un développement quelconque, local ou régional, elles préfèrent apparemment le faire dans un climat de tension, et non dans...