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Législatives : juin 2009 - Pour aller plus loin

Entre faux problèmes et blocages réels, l’attente gouvernementale appelée à se prolonger

Pour certains, elle a incontestablement envenimé le climat politique et rendu encore plus difficile la mission du Premier ministre pressenti. Mais pour d'autres, la conférence de presse du général Aoun a eu le mérite d'expliquer où se trouvent réellement les nœuds de blocage et de montrer du doigt les véritables problèmes.
Ce qui est sûr, c'est qu'après avoir été accusé d'être la principale raison, sinon la seule, du retard dans la formation du gouvernement, le général Aoun a rappelé que bien avant que l'on ne commence à parler sérieusement du gouvernement, la majorité a commencé à l'attaquer, comme pour détourner l'attention de ses propres dissensions internes et des circonstances régionales. De son côté, il a facilité le processus de formation du gouvernement en renonçant à sa revendication d'obtenir un nombre de ministres proportionnel à sa représentativité au Parlement (soit 7 ministres). Il a commencé par accepter six puis cinq ministres, à condition d'avoir un portefeuille régalien pour compenser la réduction du nombre. Le « nœud Gebran Bassil » n'existait pas encore puisque, au cours de ses premières rencontres avec le ministre des Télécommunications, envoyé spécial du chef du CPL, le Premier ministre pressenti, Saad Hariri, ne semblait nullement opposé au maintien de celui-ci aux Télécommunications. Le général Aoun est donc convaincu que ce problème a été soulevé ultérieurement pour justifier le retard dans la formation du gouvernement tout en lui faisant assumer la responsabilité des entraves. Les proches de Aoun ajoutent à cet égard que le Premier ministre chargé des affaires courantes Fouad Siniora avait provoqué une crise avant la formation de son gouvernement parce qu'il refusait le choix de Ali Kanso de la part de l'opposition, et il avait fini par céder en vertu du principe selon lequel chaque partie peut choisir librement ses représentants. C'est dire, aux yeux de l'opposition, que l'argumentation invoquée par le 14 Mars ne tient pas et ne sert qu'à compliquer un débat qui aurait pu ne pas avoir lieu. D'autant, précise l'opposition, qu'il n'y a pas de critères fixes et clairs définis par des textes officiels pour le choix des ministres. Par conséquent, monter en épingle le cas de Bassil indique l'existence de mauvaises intentions de la part de la majorité, ainsi surtout le désir de trouver de bonnes excuses pour ne pas former le gouvernement, avant d'obtenir des signaux encourageants de la part de l'étranger.
Les sources de l'opposition reviennent à l'accord syro-saoudien conclu dans la foulée du sommet du Koweït en janvier 2009. Les dirigeants des deux pays s'étaient alors entendus pour ne pas intervenir dans les élections législatives libanaises et pour laisser le meilleur gagner, tout en se mettant d'accord sur le fait qu'après les élections, et quel que soit le vainqueur des législatives, un gouvernement d'union nationale regroupant majorité et opposition devrait être formé. Riyad avait même demandé que ce soit Saad Hariri le futur Premier ministre et Damas avait accepté, suggérant toutefois qu'il devrait venir en Syrie car les dirigeants de ce pays ne le connaissent pas. Selon les informations parvenues à l'opposition, cette question avait été évoquée au cours des entretiens entre le fils du roi, l'émir Abdel Aziz, et le ministre saoudien de l'Information Abdel Aziz Khoja avec les dirigeants syriens. Khoja avait ensuite effectué une visite éclair à Beyrouth et il avait abordé cette question avec Saad Hariri. Ce dernier a tâté le terrain auprès de ses alliés, et la possibilité d'une visite à Damas avant la formation du gouvernement avait été accueillie par un véritable tollé de la part des chrétiens du 14 Mars, notamment les Forces libanaises et les Kataëb. Certains responsables américains sont aussi intervenus, et Saad Hariri a renoncé à cette idée.
Au cours de cette période, l'idée du tiers de blocage ne paraissait pas vraiment poser un grand problème et les piliers de l'opposition ne tenaient pas le même discours sur le sujet. D'ailleurs, lorsque le ministre français des AE Bernard Kouchner s'était rendu à Damas, il avait estimé que le tiers de blocage ne représentait pas une condition indispensable à la formation du gouvernement et il avait même fait une déclaration en ce sens. Mais c'est à partir de ce moment-là que les choses ont commencé à se compliquer. Les contacts syro-saoudiens se sont ralentis, le tiers de blocage est revenu en force jusqu'à ce que la formule de 15-10-5 soit trouvée, avec une personnalité chiite acceptée par l'opposition dans la part présidentielle.
Mais tout au long de cette période, les dirigeants syriens affichaient une grande sérénité, convaincus que l'opposition est parfaitement en mesure d'imposer ses conditions sans avoir besoin de leur aide. Certaines sources révèlent à ce sujet qu'un émissaire de Walid Joumblatt avait effectué cinq visites à Damas au cours des dernières semaines et les dirigeants syriens savaient que le leader du PSP préparait un grand virage, de nature à modifier totalement le paysage politique et l'équation gouvernementale libanaise. Pour eux donc, le temps ne presse pas, et si on a besoin de leur aide, il faudra la solliciter... Or les Saoudiens ont visiblement mis un bémol à leur ouverture en direction de la Syrie, suite aux pressions américaines et égyptiennes, dont les positions sont liées à l'attitude syrienne dans les dossiers palestinien et irakien.
Si on suivait cette logique, le dossier gouvernemental libanais ne devrait pas connaître de fin heureuse avant le déblocage régional et international. Mais des sources bien informées estiment que ce déblocage ne devrait pas trop tarder. L'Assemblée générale des Nations unies doit tenir sa réunion annuelle à partir du 15 septembre au siège de l'ONU à New York, et selon les pronostics, tous les grands de ce monde devraient s'y retrouver, d'autant que ce sera la première apparition internationale du président Barack Obama. Ahmadinejad, Assad, le roi Abdallah, mais aussi le président Michel Sleiman devraient y participer, et il se pourrait bien que le climat d'ouverture annoncé ait des répercussions sur le dossier gouvernemental libanais...
Ce qui est sûr, c'est qu'après avoir été accusé d'être la principale raison, sinon la seule, du retard dans la formation du gouvernement, le général Aoun a rappelé que bien avant que l'on ne commence à parler sérieusement du gouvernement, la majorité a commencé à l'attaquer, comme pour détourner...