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Liban

À Zahlé, une bataille marquée par la lenteur et les bousculades

L'affluence était telle, hier à Zahlé, que les électeurs devaient attendre une à deux heures pour voter, dès 9 heures du matin, alors que l'attente devait atteindre plus de trois heures en milieu de journée.

Bon enfant et conviviale en début de matinée, l'ambiance est vite devenue lourde et irrespirable, au vu des folles bousculades devant les bureaux de vote. Une situation provoquée aussi bien par la lenteur dans certains bureaux que par l'infrastructure des locaux, totalement inadéquats à une opération de vote. « Cette lenteur ne serait-elle pas délibérée, comme pour décourager les électeurs de la majorité ? » se demandait le député Nicolas Fattouche, en milieu de journée. Des propos repris par une source proche du ministre Élie Skaff, qui déplorait aussi « le manque de préparation et de compétence des chefs de bureau ».
L'indiscipline du Libanais n'est, certes, pas étrangère à cette situation. Alors qu'à l'entrée de la plupart des centres et des salles, les électeurs, agglutinés comme des mouches, se bousculaient à qui mieux mieux, de rares files d'attente se formaient dans le calme, ici ou là. Il n'en reste pas moins que les forces de l'ordre, dépassées par la situation et gagnées par la nervosité, n'ont pas réussi à convaincre les électeurs, et plus spécifiquement les électrices, de faire preuve d'un minimum de discipline. Résultat, les cas d'évanouissements et de hurlements hystériques se sont multipliés, les insultes fusaient aussi, ça et là. Quelques femmes, refusant de se faire davantage bousculer, ont tout bonnement renoncé à voter, au grand dam de certains délégués partisans. D'autres avaient, en milieu de journée, déjà effectué plusieurs tentatives infructueuses, résolues à persévérer, malgré tout.
Au milieu de ce regrettable brouhaha, il était quasiment impossible pour les personnes âgées, les malades, les handicapés et les femmes enceintes de se frayer un chemin, aucune entrée séparée n'ayant été prévue pour cette catégorie d'électeurs. Un climat qui faisait bien l'affaire des délégués et représentants itinérants de partis, présents en nombre exagéré dans les bureaux de vote et qui ont parfois directement contribué au désordre ambiant.

Trois étages pour les personnes âgées
Dès l'ouverture des bureaux de vote, l'affluence était déjà supérieure à la normale et les électeurs devaient jouer des coudes pour ne pas se trouver relégués en queue de peloton. « Que fait cet homme dans un bureau de vote de femmes ? » accuse une femme âgée au bord de la crise de nerfs, dénonçant un délégué itinérant qui l'aurait violemment bousculée pour aider une électrice à resquiller, à Rassieh Tahta.
À Rassieh Faouka, devant la porte fermée de l'école publique, les électeurs attendent depuis une bonne heure en plein soleil. L'opération de vote se révèle particulièrement difficile dans ce bureau. L'école est tellement petite et ses escaliers sont si étroits que les forces de l'ordre font entrer les gens au compte-gouttes. Un vieux monsieur doit les supplier pour être autorisé à s'asseoir dans la cour de l'école, dans l'attente que des électeurs en sortent. Les personnes âgées peinent à trouver la pièce où ils doivent se rendre et à monter les trois étages. Certains doivent prendre longuement leur souffle, à chaque étage, avant de reprendre leur pénible ascension. « Cette école est inadéquate au processus de vote, lance un agent de l'ordre. Je ne comprends pas pourquoi le scrutin se déroule dans ses locaux. »
À quelques mètres de l'école, les cris de délégués des deux listes adverses emplissent la ruelle. « Nous l'avons surpris en train de payer un électeur, nous l'avons pris en photo », hurle une déléguée du 14 Mars, montrant du doigt un partisan du CPL qui nie avec véhémence. Alertées par les cris, les forces de l'ordre évacuent le petit groupe. Les accusations d'achats de voix fuseront d'ailleurs tout au long de la journée, de part et d'autre.
À proximité du bureau de vote de l'église Saint-Antoine, c'est aussi l'effervescence. Les délégués du 14 Mars constatent qu'une permanence de l'opposition est située à 15 mètres de l'entrée du bureau. Dans cette permanence, un groupe de femmes voilées sont assises. On procède à une distribution de t-shirts aux couleurs de l'opposition. « C'est inadmissible, pourquoi les forces de l'ordre ne réagissent-elles pas ? » demande un homme. La permanence est finalement fermée et son rideau de fer baissé par les FSI.
Chaleur étouffante et vacarme
La politique est certes omniprésente. « Je suis prête à attendre trois heures s'il le faut, pour voter pour la liste du 14 Mars telle quelle», dit tout haut une femme d'un certain âge, habillée de bleu. Dans le salon de l'église, règnent une chaleur étouffante et un vacarme assourdissant. Dans cette seule et même salle, trois bureaux de vote ont été aménagés. Le manque d'espace se fait sentir. Mais l'ambiance électorale reste bonne.
Au siège de la Chambre de commerce et d'industrie de Zahlé, le schéma est nettement moins convivial. L'installation de plusieurs bureaux de vote dans un même local tourne à l'hystérie. Les organisateurs ne s'entendent pas et crient eux aussi. Toutes les femmes sont confinées dans une seule et même pièce et mettent des heures à accomplir leur devoir. Outrées, elles ne manquent pas de dénoncer la légèreté de l'organisation. « C'est à vous décourager de voter », lance une femme d'un certain âge, l'air las. Mais c'est dans le bureau sunnite pour femmes de Mar Élias que la lenteur atteint son paroxysme. À 11h30, seulement 130 femmes sur 650 avaient voté. La foire est à son comble, à tel point qu'une observatrice se met de la partie, pour faciliter le déroulement du vote et crie le nom des électeurs.
Bien que plus disciplinés, les hommes ont également souffert de la trop longue attente. « Je retourne au Liban pour la première fois depuis 40 ans pour voir mes proches, raconte cet émigré brésilien qui fait la queue à Saydet el-Zalzalé. Je n'ai jamais vu un tel désordre. » « Au Brésil, le vote ne nécessite pas plus d'une minute », ajoute-t-il. Mais les hommes refusent de perdre patience. « Après tout, c'est notre pays, on ne va pas le leur laisser », lance un homme qui attend son tour, visiblement partisan du 14 Mars. Un autre électeur, qui ne cache pas ses sympathies pour l'opposition, dénonce le racisme des propos de certains habitants de Zahlé. « C'est dommage qu'ils pensent ainsi à l'égard des autres communautés », dit-il.
Les Zahliotes ont tous accompli leur devoir hier de manière démocratique, malgré quelques incidents sécuritaires. Mais ils ne pouvaient s'empêcher de comparer le scrutin à celui de 2005 qui, selon leurs propos, était nettement mieux organisé.
Bon enfant et conviviale en début de matinée, l'ambiance est vite devenue lourde et irrespirable, au vu des folles bousculades devant les bureaux de vote. Une situation provoquée aussi bien par la lenteur dans certains bureaux que par l'infrastructure des locaux, totalement inadéquats à une opération de vote. « Cette lenteur ne...

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