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Actualités - OPINION

Israël-Liban : et si le véritable enjeu était l’eau de Chebaa ? Antoine TUFENKJI

La question de l’eau est au cœur du conflit israélo-arabe et israélo-libanais. Le 15 mars 1995, Shimon Pérès l’avait signifié au chancelier allemand Helmut Kohl en des termes bien précis : « En temps de guerre, nous avons besoin d’armes et, pour la paix, nous avons besoin de l’eau. » Yitzhak Rabin, soulignant que la question de la sécurité si souvent invoquée par Israël était secondaire avait déclaré : « Sans l’accord sur l’eau, il n’y aura pas d’accord… car pour le peuple israélien, l’eau est beaucoup plus importante que la paix. » Depuis Camp David en 1978, Israël conditionne tout retrait et tout accord de paix avec ses voisins au partage des ressources hydrauliques de ces derniers. * Israël a obtenu de l’Égypte l’exploitation des eaux souterraines de Rafah, comme préalable à son retrait du Sinaï. * Israël a obtenu de la Jordanie le partage des eaux du Jourdain, du Yarmouk et les eaux souterraines de Wadi Araba. *Lors des négociations syro-israéliennes de 1995, Israël aurait accepté un accord de paix avec la Syrie à condition de ne pas restituer le « Golan utile » riche en eau, ce qui lui aurait permis de garder 570 millions de mètres cubes par an, c’est-à-dire 30 % de ses besoins en eau. Les hameaux de Chebaa constituent un réservoir d’eau de 1 500 millions de mètres cubes s’étalant sur une altitude allant de 600 à 2 200 m Israël refuse de reconnaître la libanité de ce territoire, dont le devenir obéit selon lui à l’application de la résolution 242 du Conseil de Sécurité, consécutive à la guerre de 1967. Le 17 avril 1989, Israël usa de la force pour obliger les habitants des hameaux à quitter leurs foyers. Il leur proposa même l’achat de leur terre. Le 13 avril 1990, Israël chassa les autres habitants et s’appropria leurs terrains. Durant la guerre de juillet 2006, Israël a poussé les civils du Liban-Sud à un exode massif vers le nord en détruisant systématiquement leurs villages, pensant pouvoir vider cette région de ses habitants et installer sa frontière sur le fleuve Litani. Or ce plan américano-israélien a échoué, la population du Liban-Sud réinvestissant les villages dévastés par un mois de bombardement, dans un mouvement de retour unique dans l’histoire des guerres. Le jour où Israël décidera de pousser sa frontière vers le Litani, dont l’Agence juive convoitait les eaux depuis 1919, ou d’annexer par une loi organique les fermes de Chebaa, comme ce fut le cas pour le Golan et Jérusalem, il n’hésitera pas à envahir une fois de plus le Liban-Sud, nonobstant la présence des soldats de la Finul, comme cela s’est produit en 1982, en 1996 et en juillet 2006, dans l’indifférence totale de l’ONU. Or la libanité de ces hameaux ne fait aucun doute ! Les responsables syriens ont à plusieurs reprises reconnu leur appartenance libanaise et aujourd’hui l’État libanais a pris sa décision à l’unanimité : les hameaux lui appartiennent. Ces hameaux figuraient déjà sur la carte du Liban, établie en 1860 par le corps expéditionnaire français envoyé par Napoléon III. Georges Clemenceau s’en était servi en 1919, pour tracer de sa propre main les frontières actuelles du Liban. Si l’État du Grand-Liban a été proclamé par décision nº 318 du 31 août 1920, la décision nº 320 du 1er septembre 1920 a déterminé les frontières du pays. Elle inclut le caza de Hasbaya et les hameaux de Chebaa. L’accord connu sous le nom de « Paulet-Naucomb », signé entre les deux mandataires français et britannique, note que les villages situés sur le versant occidental du mont Hermon appartiennent au Liban. La ligne de démarcation entre le Liban et la Syrie passe par Wadi el-Assal. Dès lors, malgré les pressions exercées sur la France par la Grande-Bretagne et par Haïm Weizmann, président de l’Organisation sioniste mondiale, pour ramener la frontière nord de la Palestine au niveau de la vallée du Litani, le général Gouraud proclama le Grand-Liban dans ses frontières actuelles, le 1er septembre1920. Après la guerre de 1948, un tracé frontalier a été établi entre le Liban et Israël, sous la direction d’un émissaire des Nations unies. Ce tracé a été confirmé par la convention d’armistice du 23 mars 1949. Dans les procès-verbaux du comité de démarcation des frontières, entre 1964 et 1967, il est stipulé que les hameaux sont libanais. Enfin, ces derniers sont régis par la loi sur les forêts et titres de propriété que les habitants et les différents wakfs possèdent et qui datent de l’époque ottomane. Le monde entier reconnaît au président Chirac son amitié pour le Liban et sa connaissance du dossier libanais. Ses nombreuses prises de position et ses initiatives en faveur de ce pays l’ont hissé aux yeux des Libanais au niveau des grands hommes qui l’ont précédé à la tête de l’État français. La France ayant joué un rôle décisif dans la naissance du Liban actuel est, du point de vue de nombreux Libanais, le seul pays à pouvoir aider le Liban à retrouver son intégrité territoriale. Elle possède tous les documents historiques nécessaires prouvant la libanité des hameaux de Chebaa. Elle doit en faire usage devant les Nations unies, pour forcer Israël à évacuer ce territoire en application des résolutions 425 et 1701 du Conseil de Sécurité. Antoine TUFENKJI Président du Comité des amis de Raymond Eddé Article paru le Vendredi 29 Décembre
La question de l’eau est au cœur du conflit israélo-arabe et israélo-libanais.
Le 15 mars 1995, Shimon Pérès l’avait signifié au chancelier allemand Helmut Kohl en des termes bien précis : « En temps de guerre, nous avons besoin d’armes et, pour la paix, nous avons besoin de l’eau. » Yitzhak Rabin, soulignant que la question de la sécurité si souvent invoquée par...