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Actualités - CHRONOLOGIE

SALON D’AUTOMNE - Une 27e édition homogène et rigoureuse L’art libanais en guerre contre la guerre !

Un Salon sans verbiage inutile, marqué par des œuvres homogènes, rigoureuses qui, pour la plupart, portent un témoignage sur la situation que traverse le pays du Cèdre depuis un an et demi environ. Ce même laps de temps qui correspond à la date limite de «fraîcheur» des œuvres sélectionnées, exigée par le jury. C’est ainsi que se présente cette 27e édition du Salon d’automne, qui a été inaugurée hier soir et qui se tiendra jusqu’au 31 janvier 2007, comme toujours, au musée Sursock. Un jury composé cette fois de Pascale Féghali, Adel Koudaih, Walid Sadek, Samir Sayegh, Sadek Tabbara, Alfred Tarazi et Joseph Tarrab. Lesquels, venant d’horizons différents (graphic designer, architecte, artistes, critiques et promoteurs culturels), ont porté des regards un tant soit peu différents sur un ensemble de 306 œuvres réalisées par 153 artistes, pour n’en retenir, au final, qu’une centaine de pièces de 85 artistes. Une sélection couronnée par un seul prix, celui du musée Sursock attribué à Samar Mogharbel, pour Voitures piégées, une magnifique installation en argile. Le ton est donné ! Témoin de son temps, l’artiste libanais est aujourd’hui «en guerre contre la guerre», pour reprendre une formule du critique Samir Sayegh. Sauf que son art va au-delà même du témoignage dénonciateur de massacres et d’atrocités pour revendiquer un message de vie. Certes, une bonne partie des œuvres évoque, de manière frontale, la noirceur de la réalité libanaise. Horizons sombres dans l’acrylique sur toile de Zeina Kamareddine Badran; palette ténébreuse dans le diptyque sur bois de Ziad Saba ou la silhouette fantomatique de Charles Khoury; composition dramatique et magistrale dans La vierge veuve, huile sur toile d’Élissa Raad; discours ironiquement amer sur panneau imprimé, signé Tanbak et intitulé Liban un pays propre, ou encore dans Brulez papier de Beyrouth, une impression sur drap de Wissam et Cécile Nochi; rouge sang sur gris et noir pour exprimer le poids d’un tragique Héritage chez Rima Saab, construction totémique et géométrique en fer exprimant, entre autres, la «longueur» de la guerre pour Anachar Basbous; vision de Cana dans la technique mixte sur papier de Greta Naufal; de la banlieue sud le 30 août 2006 dans le travail de collage et techniques mixtes sur toile de Nada Sehnaoui; évocation de Dahyé bombardée dans Où est mon balcon? de Kaissar al-Mekdad, ou encore dans l’installation photographique de Nahed Mansour railleusement titrée Carrés non sécurisés. Les arts plastiques: des armes de combat Aux côtés de ces expressions directes sur la guerre (qui, bien entendu, n’ont pas été toutes énumérées!), d’autres œuvres abordent de manière détournée la dureté des temps. Que ce soit à travers les lacérations de la toile, le choix des pigments, des matières et des couleurs, dans les abstractions de Chaouki Chamoun, Mario Saba, Bassam Geitani, Gisèle Rohayem, etc. Ou au moyen du symbolisme et de l’allégorie, dans les œuvres plus figuratives de Fulvio Codsi (une Terre promise engluée dans le mazout), de Mouna Bassili Sehnaoui (qui représente dans un triptyque l’oiseau de paix qui arrive, passe et s’en va!), de Zéna Assi (qui reproduit toute la tristesse du monde dans un dessin caricatural de femme), d’Oussama Baalbacki (un tableau évocateur, montrant un découpage de viande sur fond de radio!), ou encore de Vartan Aror qui a élaboré en techniques mixtes une immense silhouette d’homme tombé à terre et à la tête trouée... d’une fleur rouge sang. Travail d’exorcisme, comme dans Mémoires d’outre-guerre (une étonnante technique d’aquarelle sur toile de Rached Bohsali), ou expression d’un engagement passionné, comme Pour que la guerre ne revienne, d’Élias Dib, ou encore À Samir Kassir, bronze d’Antoine Berberi, «les arts plastiques sont redevenus des armes de combat» (dixit Joseph Tarrab). Un combat contre l’enlisement dans la médiocrité à tous les niveaux, relevé avec brio par des créateurs aux œuvres magistrales. Telle cette impressionnante fresque sur six panneaux de Théo Mansour, Five Sens for One Death (d’après un poème d’Etel Adnan), ce Portrait de ma mère d’un expressionnisme intense de Rima Amyuni, le Trou de mémoire, une très intéressante installation en fibre de verre réalisée par Alain Vassoyan, ou même une terre cuite engobée de Samir Muller, baptisée, à juste titre, La splendeur du feu. Et des œuvres lumineuses... Et dans ce Salon dominé par «l’histoire en marche», des œuvres détachées de la guerre apportent, ici et là, une note lumineuse et évocatrice d’espoir. À l’instar de la Construction blanche de Youssef Aoun, de Pétales II de Hanibal Srouji, d’une sympathique Confusion signée Hassan Chahrour, ou encore d’une sélection de remarquables photos signées Paul Zgheib, Bassam Lahoud, Marc Nader, Sonia Bosnoyan... Des travaux qui prouvent, s’il en faut, l’impact croissant de la photo au niveau de la scène artistique libanaise. Un point à signaler: «l’ancienne garde», comme Élie Kanaan, Missak Terzian, Jamil Molaeb, a, semble-t-il, préféré, dans sa grande majorité, à la description du marasme ambiant, l’évasion à travers des paysages plus sereins ou irréels... Quoi qu’il en soit, le constat de Sylvia Agémian, conservateur-adjoint du musée Sursock, s’impose: «Malgré tout ce qui se passe, il y a encore des artistes qui travaillent et témoignent sans arrière-pensée commerciale.» Rien que pour cela, «chapeau les artistes!» Un Salon d’automne 2006 qui comptera sans doute parmi les grands crus! Zéna ZALZAL Jusqu’au 31 janvier, de 10h00 à 13h00 et de 16h00 à 19h00, sauf les dimanches.

Un Salon sans verbiage inutile, marqué par des œuvres homogènes, rigoureuses qui, pour la plupart, portent un témoignage sur la situation que traverse le pays du Cèdre depuis un an et demi environ. Ce même laps de temps qui correspond à la date limite de «fraîcheur» des œuvres sélectionnées, exigée par le jury. C’est ainsi que se présente cette 27e édition du Salon...