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RÉFLEXION - À propos du film de Jocelyne Saab « Dunia », ou la difficulté de grandir

Dans un monde où l’enfance féminine est mutilée (et pas seulement par la pratique de l’excision), comment grandir ? Comment devenir soi, comment devenir femme ? Entourée d’aînées qui s’affirment dans des métiers dits «d’homme», comme cette « chauffeure » de taxi haute en couleur, ou qui jouent comme le feraient des gamines, le jeu de la séduction, Dunia (le film de Jocelyne Saab, à l’affiche du cinéma Sofil-Achrafieh) cherche sa voie avec tout le sérieux de l’enfant qu’elle ne veut pas trahir. Entre danse et poésie, elle cherche à rassembler les morceaux d’elle-même, d’une part corps et de l’autre esprit. Ou alors suffit-il d’épouser son amoureux pour devenir libre ? Merveilleuse caméra et direction d’acteurs qui nous donnent une Hanane Turk à volonté femme ou enfant dans des plans superbes de tendresse et d’émotion. Deux hommes joueront des rôles complémentaires dans cet apprentissage, chacun à rebours de sa spécialité : si son professeur de danse exige que les mouvements du corps soient exclusivement une expression de l’âme, que le corps se fonde à l’univers tout entier, le professeur de poésie, lui, fera un bout de chemin en sens inverse à sa rencontre, redécouvrant la lumière, la chaleur, les grains de sable sous les pieds nus, cherchant lui aussi, mais avec une plus grande sérénité, due à l’âge mûr, à sortir d’un isolement, celui où l’a plongé sa cécité. Chacun des lieux d’apprentissage, la salle de danse comme l’université, donne lieu à de très belles images, sobres et subtiles. Le Caire est présent aussi, ses cinémas en plein air, ses quartiers populaires quasi déserts la nuit, ou ses grands axes, ses marchés, son Nil, dans des scènes d’extérieur pittoresques et animées, ou empreintes d’une poésie quasi fantasmagorique. Dans Dunia, Jocelyne Saab nous donne une œuvre superbe, maîtrisée, pleine de poésie et profondément humaine. Et qu’il ne faut manquer à aucun prix. Vivien AUDI

Dans un monde où l’enfance féminine est mutilée (et pas seulement par la pratique de l’excision), comment grandir ? Comment devenir soi, comment devenir femme ? Entourée d’aînées qui s’affirment dans des métiers dits «d’homme», comme cette « chauffeure » de taxi haute en couleur, ou qui jouent comme le feraient des gamines, le jeu de la séduction, Dunia (le film...