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Actualités - CHRONOLOGIE

Plus de 8 000 Philippines et Éthiopiennes rapatriées par leurs ambassades, l’IOM et Caritas Des problèmes de taille liés à l’évacuation des travailleurs migrants

Alors que la population libanaise réintègre en masse ses villages et ses quartiers, les évacuations des travailleurs étrangers se poursuivent, avec moins d’intensité cependant. L’ambassade des Philippines continue d’appliquer les consignes données par le gouvernement de Manille d’évacuer tous ses ressortissants, et à l’ambassade d’Éthiopie, l’on procède aux dernières évacuations. Dans les locaux de la maison centrale des sœurs de la Charité de Saint-Vincent-de-Paul, à Achrafieh, où l’ambassade des Philippines a provisoirement élu domicile, des ressortissantes philippines, employées de maison en grande majorité, continuent d’arriver par intermittence avec leurs bagages, malgré l’entrée en vigueur du cessez-le-feu. Le seul bus de la journée vient de démarrer pour la Syrie avec, à son bord, 55 ressortissantes. Le flot des départs a fortement diminué, mais une cinquantaine de personnes continuent de se présenter quotidiennement depuis lundi dernier. Encore 30 000 Philippins au Liban Pour l’accueil de ces femmes, l’ambassade a déployé les grands moyens, avec l’assistance de l’IOM (Organisation internationale des migrations) et de Caritas. Nombre de personnalités diplomatiques ont même été dépêchées de différents pays de la région pour organiser la cellule de crise et le rapatriement en masse des ressortissants philippins. Car les consignes du gouvernement philippin sont claires : le Liban est toujours en état de guerre et tous les ressortissants sont priés de se mettre en contact avec leur ambassade en vue de leur évacuation. Mais jusque-là, seulement 5 447 personnes ont été évacuées après avoir répondu à l’appel de leur ambassade, estime l’attaché à l’emploi auprès de l’ambassade des Philippines à Ryad, Resty Sm de la Fuente, envoyé spécialement au Liban pour la gestion de la crise. Il indique que durant les bombardements, 200 à 300 personnes arrivaient tous les jours dans l’espoir d’être rapatriées. Certains jours, plus de 11 bus rejoignaient, depuis l’ambassade des Philippines, la longue file emportant les travailleurs migrants vers la frontière syrienne. Près de 30 000 travailleurs philippins se trouvent pourtant encore au Liban. Des travailleurs tiraillés par l’hésitation ou peu désireux de perdre leur emploi, comme l’indique une domestique philippine refusant de partir : « Mon gouvernement me trouvera-t-il un emploi si je décide de rentrer aux Philippines ? » Mais cette évacuation qui se poursuit, toujours conformément aux directives de l’ambassade, ne se fait pas sans problèmes, vu la réticence des garants et des employeurs à laisser partir leurs domestiques avant l’expiration du contrat, alors qu’ils viennent tout juste de payer la caution à l’agence de placement. Lorsque les domestiques ne fuient pas tout simplement la maison de leurs employeurs, par peur d’être retenus contre leur gré, ils subissent souvent, d’une façon ou d’une autre, les conséquences de ce rapatriement systématique : nombre d’entre eux sont déposés au centre d’accueil de l’ambassade sans avoir touché leur dernier salaire. « Je ne vois pas pourquoi je supporterais financièrement la décision de votre gouvernement, alors que le cessez-le-feu est en vigueur et que nous habitons une région à l’abri des bombardements », lance, au bord de la crise de nerfs, une femme qui vient s’enquérir auprès de l’ambassade de sa domestique philippine qui a fui le domicile, à Tabarja. « Je ne réglerai pas le dernier mois de salaire à ma bonne. J’ai payé une caution de 1 500 dollars, il y a tout juste 4 mois. Qui me les remboursera ? » demande-t-elle au président de l’Association des familles libano-philippines, Fady Karout, qui participe à l’accueil des ressortissantes philippines et qui refuse de lui accorder un quitus. Fuir pour se rendre à l’ambassade Dans le salon où elles sont accueillies, rares sont les nouvelles arrivantes qui n’ont pas une poignante histoire à raconter : une jeune Philippine, qui vient juste d’arriver et qui attend de remplir sa fiche personnelle, indique qu’au bout de un an et 10 mois de travail, elle n’a reçu que 600 dollars qu’elle a envoyés à sa famille. Son employeur l’a déposée à l’ambassade sans lui donner son dû, malgré l’effort des membres de l’Association des familles libano-philippines pour le convaincre de s’acquitter de sa dette. Elle n’a même pas récupéré sa valise avant le départ précipité de son employeur. Elle quittera le pays avec 4 dollars en poche et avec, pour seuls vêtements, le jean et le tee-shirt qu’elle porte sur elle. Que dire aussi des domestiques qui ont été sauvagement violentées pour avoir émis le désir d’être rapatriées, et que l’ambassade héberge et soigne avant leur évacuation prochaine ? Que dire surtout de la jeune Miramar qui attend son évacuation dans la douleur, immobilisée depuis une semaine dans les locaux de l’ambassade, la jambe bleuie et enflée, le visage tuméfié, après avoir sauté du premier étage de l’immeuble où habitent ses patrons, à Tripoli, car ils refusaient de la laisser contacter son ambassade ? Il est évident que rien ni personne n’a le droit de retenir un travailleur migrant contre son gré ou de l’empêcher de quitter le pays qui traverse une des plus graves crises de son histoire. N’est-il pas grand temps que les problèmes auxquels sont aujourd’hui confrontés aussi bien les travailleurs étrangers que leurs employeurs poussent enfin les autorités libanaises à envisager une nouvelle formule quant aux conditions des travailleurs migrants ? Anne-Marie EL-HAGE

Alors que la population libanaise réintègre en masse ses villages et ses quartiers, les évacuations des travailleurs étrangers se poursuivent, avec moins d’intensité cependant. L’ambassade des Philippines continue d’appliquer les consignes données par le gouvernement de Manille d’évacuer tous ses ressortissants, et à l’ambassade d’Éthiopie, l’on procède aux...