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POÉSIE Un hommage lui a été rendu à la faculté des lettres de l’Université libanaise Rouba Saba Habib, le poète du double exil

Contrainte de quitter le Liban pour des raisons familiales, Rouba Saba Habib a gardé en elle une blessure béante, qu’elle traduit dans ses poèmes dans sa langue maternelle aussi bien qu’adoptive, le français. La faculté des lettres de l’Université libanaise a récemment rendu un hommage vibrant à cette enseignante, femme de lettres et militante qui s’est depuis longtemps engagée pour la cause du mot. Le double exil, l’entre-deux rives, c’est ainsi que Rouba Saba Habib aime à dépeindre sa poésie, des images enfouies en elle depuis son jeune âge et qu’elle reproduit dans une prose poétique contemporaine. Son grand oncle Fouad Sleimane lui avait donné son nom de collines fleuries (Rouba). Elle grandira à l’ombre de cet écrivain et poète qui a fait les beaux jours du Beyrouth culturel. «La poésie n’est pas uniquement dans les gènes. Il faut la cultiver, avoue-t-elle. Si ma mère n’a jamais pris la plume, elle m’a quand même retransmis l’amour de la poésie dans tous les petits gestes quotidiens, qu’elle élevait en les auréolant d’une autre dimension. Aujourd’hui, à mon tour, je sacralise tous ces petits instants sans pour autant être le poète romantique des pétales de roses et du rayon de soleil.» Courageuse, héroïque même dans son exil forcé qu’elle transformera en véritable célébration de vie, Rouba Saba Habib va se diviser, se multiplier, pour vivre jusqu’au bout l’amour du verbe. Exigeante, elle saura l’exprimer convenablement et dans l’écrin qu’il faut. Le mot au centre de sa vie À l’Université libanaise où elle enseigne, elle prêche contre le vers classique. «Le poème moderne a ses propres lois, des règles sévères et une unité organique qu’il faut savoir respecter», dit-elle. Loin de son pays, cette diplômée en lettres et en philosophie a su apprivoiser la langue française qu’elle appellera «mon voile» en opposition à la langue arabe, son «visage». Le langage devient son amoureux, qu’elle imagine et interpelle. Quant au mot, il sera son arme pour tuer l’ennui, la monotonie et lutter contre la souffrance et la précarité qui s’installent. C’est dans ce mot que la femme de lettres s’abrite, cherche refuge et parvient à tout régénérer. Ne se contentant pas de l’écrire, elle va le vivre et le défendre en action. À travers les associations qu’elle crée et le Centre culturel lyonnais du monde arabe (CCLYM) dont elle est la consultante, Rouba Saba Habib se bat. «Pour prôner la culture libanaise et montrer son vrai visage démocratique, laïc, de tolérance et de dialogue», confie-t-elle. Également «pour montrer que notre terre est fertile et qu’elle n’est pas simplement synonyme de sang et de mort. Enfin pour défendre les droits de la femme orientale». De France jusqu’en Algérie, en passant par le Liban, elle milite pour ces femmes et porte haut leur drapeau. De retour au bercail où elle enseigne les lettres modernes et la littérature comparée à l’Université libanaise, Rouba Saba Habib rêve de transmettre l’amour du mot à ses élèves et de faire de la poésie le ferment de leur vie. Fière de ce métissage culturel qui a coloré sa vie, Habib ne cesse d’enseigner le « libanisme » pittoresque et imagé exporté par bien d’écrivains d’ici. Dans son dernier recueil, J’écris, illustré par sa fille, elle dit que «l’écriture lui permet de tout recréer. C’est elle qui détecte les signes, qui renverse le tombeau et dit à l’endormi : lève-toi.» Une déclaration d’amour dont Rouba Saba Habib a fait son credo au quotidien. Colette KHALAF
Contrainte de quitter le Liban pour des raisons familiales, Rouba Saba Habib a gardé en elle une blessure béante, qu’elle traduit dans ses poèmes dans sa langue maternelle aussi bien qu’adoptive, le français. La faculté des lettres de l’Université libanaise a récemment rendu un hommage vibrant à cette enseignante, femme de lettres et militante qui s’est depuis longtemps...