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Une seconde affaire de pédophilie sera jugée en mars-avril Vers une réforme de la justice française après le fiasco d’Outreau

Les autorités françaises ont affiché leur volonté de réformer en profondeur le fonctionnement de la justice après le fiasco de l’affaire de pédophilie d’Outreau (Nord), qui a miné la crédibilité de l’institution judiciaire. Treize des 17 accusés initiaux ont été innocentés, sept en première instance en 2004 et six en appel jeudi, parfois après plus de trois ans passés en détention provisoire. Une heure après le verdict, le ministre de la Justice Pascal Clément a affirmé qu’il voulait « tirer très rapidement » les enseignements de cette affaire grâce à plusieurs réformes, notamment celle de l’instruction déjà à l’étude. Une commission d’enquête parlementaire sur l’affaire d’Outreau sera mise en place dès mardi. Le même jour, le Premier ministre Dominique de Villepin compte présenter les excuses de la France aux six derniers acquittés. Des dysfonctionnements ont été relevés au niveau de la police, des services sociaux et de la justice, et une triple enquête a été décidée par le gouvernement. Mais les critiques se focalisent sur l’instruction, au grand dam des magistrats instructeurs qui refusent de porter le chapeau. Un projet de loi du ministère de la Justice prévoit d’imposer l’adjonction d’un deuxième juge d’instruction dans les affaires les plus complexes, ce qu’avait refusé le jeune Fabrice Burgaud, au cœur du naufrage judiciaire d’Outreau. L’efficacité de cette mesure, considérée comme un minimum, suscite toutefois aussi un grand scepticisme. « Je ne suis pas contre le principe, mais cela implique le recrutement de 300 magistrats d’un coup et de multiplier par deux les chambres de l’instruction chargées de contrôler le travail du juge », estimait hier un jeune juge d’instruction de la banlieue parisienne, en parlant de « bricolage ». Le ministère veut ouvrir une autre brèche : son projet prévoit qu’à la demande d’une des parties, la chambre de l’instruction puisse faire tous les six mois « un point global » sur l’affaire en séance publique pour examiner notamment la nécessité de maintenir des inculpés en détention. Outre celui de l’instruction, l’affaire d’Outreau a en effet posé le problème de la détention provisoire. Un des accusés innocentés, l’abbé Dominique Wiel, a fait en vain 112 demandes de liberté conditionnelle avant d’être acquitté en appel. Des avocats comme des syndicats de magistrats s’indignent régulièrement des atteintes portées à la loi sur la présomption d’innocence. Mais le sujet de la détention provisoire est sensible, au moment même où la France vient d’élargir les possibilités d’incarcération, en particulier pour les récidivistes, et le ministre de la Justice ne s’est pas aventuré très loin sur ce terrain. Sa marge de manœuvre pour lancer ces réformes, malgré leur caractère limité, est étroite. Le ministre, dont le président Jacques Chirac attend les conclusions, a annoncé qu’il proposerait des sanctions contre les magistrats ayant commis des « erreurs grossières et manifestes d’appréciation », une notion qu’il va falloir préciser. Une mesure « dangereuse pour l’indépendance des juges et de la justice », ont mis en garde certains magistrats. « On en viendra bientôt à demander des comptes à un magistrat instructeur dont le dossier se termine à l’audience par une relaxe ou un acquittement », estime un juge d’instruction parisien, qui s’émeut du « lynchage médiatico-politique de Fabrice Burgaud », un bouc émissaire facile selon lui. Parallèlement, la Cour d’assises du Pas-de-Calais jugera du 29 mars au 14 avril prochains sept personnes accusées de viols sur mineurs à Outreau, dans un dossier qui, selon leurs avocats, menace la justice d’une nouvelle catastrophe. L’affaire est similaire à la première procédure qui s’est soldée par un fiasco retentissant. Les accusés du deuxième dossier habitaient un immeuble HLM voisin du théâtre de la première affaire. Ils sont mis en cause par des enfants et par Myriam Badaoui, accusatrice principale du premier dossier, où elle s’est rétractée. Comme dans l’affaire « Outreau 1 », des rapports des mêmes experts psychologues, jugeant « crédibles » les onze enfants accusateurs ou supposés victimes du dossier et assurant avoir décelé des traits de pervers sexuels chez les accusés, figurent au dossier de l’accusation. Il n’y a pas de preuves matérielles.

Les autorités françaises ont affiché leur volonté de réformer en profondeur le fonctionnement de la justice après le fiasco de l’affaire de pédophilie d’Outreau (Nord), qui a miné la crédibilité de l’institution judiciaire.

Treize des 17 accusés initiaux ont été innocentés, sept en première instance en 2004 et six en appel jeudi, parfois après plus de trois ans passés...