Klinsmann fait mariner ses gardiens de but depuis plus d’un an

Le sélectionneur de l’équipe d’Allemagne Jurgen Klinsmann fait « tourner » ses gardiens de but depuis sa nomination en août 2004 et ne tranchera qu’à quelques semaines du Mondial 2006, même si cette alternance entre Oliver Kahn et Jens Lehmann est très critiquée. Pour garder les buts de l’Allemagne lors du match amical contre la France, Klinsmann a appelé sans surprise Lehmann, d’Arsenal, tandis que Kahn, capitaine du Bayern Munich, restera en famille ou ira « jouer au golf, danser ou nager », comme il l’a déclaré un rien désabusé. Les intéressés le savent depuis... trois mois en vertu du calendrier préétabli par le sélectionneur pour les matchs amicaux de la Mannschaft jusqu’à la fin 2005. Kahn a donc officié contre les Pays-Bas le 17 août, puis contre la Turquie et la Chine mi-octobre, tandis que Lehmann, 36 ans hier, était titulaire contre la Slovaquie et l’Afrique du Sud. Officiellement, cette alternance devait permettre aux deux gardiens de but de se ménager, car « avec leur club, ils jouent le championnat, la Coupe et la Ligue des champions », expliquait début août « Klinsi », 42 ans. Le sélectionneur a beau invoquer des arguments sportifs, il ne peut masquer la réalité : l’ambiance en équipe d’Allemagne pâtit de la mise en concurrence qu’il a instaurée entre deux gardiens de but à l’ego surdimensionné, qui ne se sont jamais portés dans leur cœur. Les pro-Kahn majoritaires Mais plutôt que de clore le débat et de désigner son gardien titulaire pour la Coupe du monde 2006 à domicile (9 juin-9 juillet), comme le réclament la presse et les anciennes gloires, majoritairement pro-Kahn, Klinsmann persiste dans la politique édictée en août 2004. « Instaurer un système de rotation, cela veut dire tous les joueurs auront l’occasion de montrer ce qu’ils valent », expliquait-il alors, avant d’ajouter : « Mais il est clair que Kahn est le numéro un et Lehmann le numéro deux. » Même s’il a depuis maintes fois redit cette hiérarchie, Klinsmann reste aux yeux de beaucoup suspect de vouloir se passer de Kahn, 36 ans, fiable et expérimenté, mais difficile à gérer. L’une de ses premières décisions fut de retirer au géant bavarois, sacré meilleur joueur de la Coupe du monde 2002, le brassard de capitaine qu’il portait depuis 32 matches, pour le confier à Michael Ballack. Klinsmann s’est ensuite séparé de Sepp Maier, l’entraîneur des gardiens de but en sélection, reprochant à l’ancien gardien du Bayern Munich et de la Mannschaft, vainqueur de la Coupe du monde 1974, d’être trop proche de Kahn. L’alternance Enfin, pour son premier match en tant que sélectionneur, Klinsmann décidait de faire jouer Kahn en première période, Lehmann en seconde. Le principe de l’alternance, Klinsmann l’a également imposé en compétition officielle lors de la Coupe des confédérations en juin dernier : Lehmann joue la demi-finale perdue contre le Brésil, tandis que Kahn dispute le match pour la 3e place. À huit mois du Mondial 2006, l’indécision de Klinsmann inquiète et est rendue responsable des maux défensifs de la sélection. Même Kahn et Lehmann semblent perdre patience : après avoir fait preuve d’une étonnante retenue, chacun étant persuadé d’être titulaire (« Dans six mois, on ne parlera plus de cette rotation », estimait Kahn en août 2004), ils s’accablent à nouveau par journaux interposés. Mais une fois tranchée, la « saga des gardiens de but » risque encore d’empoisonner la Mannschaft comme en 1986 au Mexique : le sélectionneur Franz Beckenbauer avait alors laissé se détériorer la situation entre Tony Schumacher et Uli Stein, avant d’être obligé de renvoyer Stein en Allemagne.