TEXTILE En hiver 2006-2007, le tissu jouera les premiers rôles

Réunis au parc des expositions de Paris Nord-Villepinte fin septembre, les tisseurs internationaux proposaient aux acheteurs du monde entier, aux couturiers et aux créateurs une collection de tissus des plus déroutantes. On avait en effet l’impression de se trouver en présence d’imprimés et de textures classiques, pour mieux constater, au toucher et au regard, que rien ne ressemble à ce que l’on croit. La surprise, c’est que rien n’est « normal ». Des laines passées à la machine, des soies rayées de mohair, des carreaux revisités, de fausses tapisseries imprimées, et encore, on annonce déjà que l’hiver 2006/2007 sera moins tapageur que le prochain au profit d’un « équilibre entre l’opulence et la discrétion, le prestige et le fantasque, la noblesse et l’humour ». Décoder les classiques semble avoir été le maître-mot pour les créateurs textiles de l’année prochaine. Le bien repassé laisse la place aux traitements lavés et aux comportements assouplis, ce qui la rend plus accessible et donne un aspect plus confortable. Dans le même temps, les draps s’épaississent et se raidissent. La douceur et la légèreté ne sont plus les principaux critères, et le retour du manteau est révélateur de cette nouvelle tendance. Côté motif, les tartans comme réimprimés de laine côtoient les carreaux anglais dont les fils dessinent des figures optiques, et les couleurs s’estompent au profit de tons plus brumeux, pour mieux laisser apparaître la fantaisie du tissage. Après le cuir et le jeans, l’aspect porté, usagé, touche à présent la laine, une tendance qui doit beaucoup à la folie du vintage. Au côté des sélects et très classiques petits carreaux anglais, les tweeds s’épaississent de nouveaux motifs plus décalés, les prince-de-Galles se diversifient en taille et dans la construction même de la trame. La soie se mélange au mohair pour des volumes contrastés, alternant épaisseur désordonnée et lissé soyeux. Les motifs jacquard ne se laissent pas deviner facilement au profit d’un travail de chaîne et trame élaboré et un toucher toujours plus surprenant. Côté dentelles, les dessins se suggèrent également, le graphisme faussement géométrique apparaît comme le principal attrait, le motif lui-même passant à l’arrière-plan. Même les classiques fleurs se couvrent d’un imprimé camouflage ou de mohair surmonté d’une application argent. Une ligne déjà annoncée par les collections de Dior de l’an dernier. À l’heure où la production textile tremble devant l’invasion chinoise, le savoir-faire européen se prépare au challenge en rivalisant de qualité. Dès l’hiver prochain, il faudra s’attendre à ce que le tissu joue un rôle principal dans le choix du vêtement. PAR FIFI ABOU DIB