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Actualités - CHRONOLOGIE

ART CULINAIRE - Une image de luxe encombrante Au Japon, la gastronomie française handicapée par son étiquette « haut de gamme »

Il y a 20 ans, Dom Pérignon et Romanée-Conti coulaient à flots sur les tables françaises de Tokyo. Aujourd’hui, dix ans après l’éclatement de la bulle financière, cette image de luxe reste ancrée dans les esprits, mais freine l’essor de la gastronomie française au Japon. Depuis un mois et jusqu’à début décembre, une série de manifestations (colloques, exposition, dîners à thème, etc.) est organisée dans la capitale nippone pour tenter de dynamiser l’image de la cuisine française, aujourd’hui talonnée par la cuisine italienne, aussi populaire et réputée moins onéreuse. Dans les années 1980, à l’apogée de la « bulle », toute une génération de jeunes chefs japonais, formés en France par les plus grands chefs étoilés, ont ouvert des restaurants gastronomiques à Tokyo, explique Jean-Charles Crouin, directeur de la Sopexa Japon, organisme français de promotion des produits agricoles et alimentaires. Les menus atteignaient facilement plusieurs milliers de francs de l’époque, des centaines d’euros d’aujourd’hui. « C’est une époque où 90 % des Japonais n’avaient jamais la moindre occasion de goûter à la cuisine française », renchérit Dominique Corby, un chef cuisinier français installé à Tokyo et à Osaka (Ouest). Mais au début de la dépression économique, au milieu des années 1990, les chefs de ces grands restaurants français doivent se remettre en question. Les entreprises ne peuvent plus financer des festins de rois, il faut désormais attirer une clientèle plus large. Les chefs vont alors proposer des menus moins chers tournant en moyenne autour de 3 500 yens (25 euros) le midi. Cette offre correspond à celle qui existe aujourd’hui dans la plupart des 2 500 restaurants et bistrots gastronomiques français du Japon. « C’était ça ou mettre la clé sous la porte. Aujourd’hui, la cuisine française à Tokyo, c’est une cuisine de bistrot faite par des chefs de niveau deux étoiles », affirme Jean-Charles Crouin. Dominique Corby va même plus loin : « Au Japon, la qualité de la gastronomie moyenne française est supérieure à celle de la France où il faut aller dans les restaurants étoilés au Michelin pour être sûr de la qualité ». Toutefois, malgré le changement de l’offre, le Japonais moyen pense encore que « la cuisine française correspond à ce qui se fait dans les trois étoiles », témoigne un chef nippon, Tomoji Ichikawa. « C’est pourquoi je suis moi-même obligé de servir des plats à base de foie gras et de langoustine », souligne ce cuisinier, propriétaire de deux restaurants à Tokyo, où il propose de la cuisine de terroir, entre 2 700 et 5 800 yens (19 euros et 41 euros) le midi. « Mais je ne suis pas au niveau d’un restaurant étoilé français. Je n’ai pas suffisamment de personnel. Quant à la cuisine, elle n’en a que l’apparence, mais pas l’esprit », reconnaît-il. De leur côté, les responsables de la Sopexa organisent des campagnes de promotion pour tenter de dépoussiérer l’image haut de gamme de la cuisine française, en insistant sur son aspect convivial. Chaque année, la Sopexa met ainsi en contact les chefs des plus grands restaurants français de Tokyo et l’homme de la rue, à l’occasion d’un « apéritif des chefs », où l’on déguste des amuse-bouches... avec les doigts.
Il y a 20 ans, Dom Pérignon et Romanée-Conti coulaient à flots sur les tables françaises de Tokyo. Aujourd’hui, dix ans après l’éclatement de la bulle financière, cette image de luxe reste ancrée dans les esprits, mais freine l’essor de la gastronomie française au Japon.
Depuis un mois et jusqu’à début décembre, une série de manifestations (colloques, exposition, dîners à...