Rechercher
Rechercher

Actualités - interview

Interview - L’émissaire de l’ONU d’accord pour un dialogue interlibanais sur le rôle de la Résistance Roed-Larsen : Il est « naturel » que le Liban et la Syrie échangent des ambassadeurs

New York, de notre correspondante aux Nations unies, Sylviane ZEHIL L’émissaire des Nations unies en charge de l’application de la résolution 1559 du Conseil de sécurité, Terjé Roed-Larsen, souligne la nécessité, pour consolider la souveraineté du Liban, de l’établissement de relations diplomatiques entre le Liban et la Syrie, et d’un accord entre les deux pays sur le tracé des frontières. Dans une interview à L’Orient-Le Jour, M. Roed-Larsen, dont le rapport sur la mise en œuvre de la 1559 a fait l’objet d’un débat mercredi dernier au Conseil de sécurité, affirme par ailleurs voir d’un œil favorable un dialogue interlibanais sur le rôle que doit jouer la Résistance du Hezbollah. Sans fixer une date butoir pour l’application de la résolution, il a toutefois jugé préférable qu’elle soit mise en œuvre « le plus tôt ». Enfin, au sujet de la présidence de la République, l’émissaire onusien a réitéré le point de vue des Nations unies, selon lequel la prorogation du mandat du chef de l’État, Émile Lahoud, n’aurait pas dû avoir lieu. Q- Vous avez rencontré récemment des leaders et officiels libanais, le Premier ministre Fouad Siniora, Saad Hariri, l’ex-président Amine Gemayel et bien d’autres. Quels ont été les principaux sujets soulevés lors de vos discussions concernant la résolution 1559 ? R- « Toutes les personnes que j’ai rencontrées avaient une approche constructive. Certaines préfèrent fonder leurs discussions sur l’accord de Taëf et non pas sur la résolution 1559. J’ai répondu à mes interlocuteurs que je ne trouve pas d’inconvénient à faire référence à Taëf. En ce qui concerne le désarmement et le démantèlement des milices, c’est exactement le même langage qu’on retrouve dans l’accord de Taëf et dans la 1559. Pour ceux qui disent qu’il faut mettre en vigueur Taëf, je suis tout à fait d’accord. » Q- La réaction de Walid Joumblatt au sujet du rapport et du désarmement du Hezbollah, faite à la télévision iranienne, est plutôt agressive à votre égard. M. Joumblatt dit notamment : « Le rapport est déplacé parce qu’il demande au gouvernement libanais de suivre des exigences sur lesquelles nous ne sommes pas d’accord. Nous disons à M. Roed-Larsen que la question de la Résistance est une affaire interne et ne le regarde pas. Je pense que la résolution 1559 est de nature à susciter des troubles entre la Résistance et le gouvernement, et Roed-Larsen est connu pour quelques erreurs historiques telles que Gaza, Oslo et la “feuille de route”. Ses succès ne sont pas nombreux. Qu’il nous laisse tranquilles avec nos problèmes et nos soucis ». Que lui répondez-vous ? R- « J’ai travaillé pendant des années avec Walid Joumblatt et je suis sûr que je continuerai tout aussi bien à le faire. Le point essentiel est que nous prenons en fait la même position. Ce que nous, aux Nations unies, sommes en train de faire, c’est d’encourager un dialogue national avec les milices dans le but de trouver une solution qui soit en harmonie avec les termes de l’accord de Taëf. Je ne pense pas que Walid Joumblatt serait en désaccord avec une telle approche. Cette question devrait être résolue sur le plan intérieur comme une affaire purement libanaise, fondée sur l’accord de Taëf. Si Taëf est mis en application, ce sera en ligne avec les dispositions de la 1559. Ce que j’ai à dire, c’est que la 1559 est une résolution du Conseil de sécurité. C’est donc, par définition, une loi internationale. Tous les États membres ont le devoir de mettre en œuvre les résolutions du Conseil de sécurité. C’est, bien sûr, le cas de la 1559. Ceci fait partie de la Charte des Nations unies et des obligations des États membres. La position du gouvernement libanais a été de manière consistante en soutien à la mise en œuvre des résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU. » Q- Pourriez-vous développer l’idée du dialogue avec le Hezbollah ? R- « M. Siniora m’a informé qu’il maintenait un dialogue informel avec le Hezbollah et nous encourageons la poursuite de ce dialogue. Nous accueillons positivement le fait que Hassan Nasrallah et le Hezbollah soient enclins à engager un dialogue productif en réaction à notre rapport. Je ne suis pas en train de dire qu’il faut démarrer un dialogue qui conduira au maintien des armements. Ce que je dis, c’est : continuons à discuter des moyens de protéger le pays, et s’il y a encore un rôle pour la Résistance. » Q- Les élections parlementaires au Liban vous ont-elles paru justes et libres ? R- « Nous avons mis en place des critères pour les élections qui mènent à la souveraineté et l’indépendance du Liban. Le premier est qu’il ne doit pas y avoir d’interférences étrangères, et nous pensons qu’il n’y a pas eu d’interférences étrangères significatives. Le deuxième est que les élections doivent prendre place à temps ;c’est ce qui est arrivé. Le troisième critère est qu’elles doivent être fondées sur une loi électorale qui était présente. Et le quatrième est que les élections doivent avoir lieu sous la supervision d’observateurs internationaux ; c’était le cas. La mission d’observateurs a déclaré que les élections étaient libres et crédibles. Les exigences ont donc été observées. » Q- Qu’en est-il du tracé des frontières internationales entre la Syrie et le Liban? R- « Toute nation doit avoir des frontières bien démarquées avec ses voisins. Le tracé des frontières ne peut être fait par l’ONU. Les pays eux-mêmes doivent se mettre d’accord pour tracer leurs frontières, et ensuite informer les Nations unies des accords et fournir les cartes. Ce que l’ONU peut faire est d’aider les parties dans cet exercice. » Q- Va-t-on bientôt vers l’établissement de relations diplomatiques entre le Liban et la Syrie ? R- « Parler de souveraineté et de bon voisinage avec ses voisins consiste à avoir des échanges de missions diplomatiques. C’est pourquoi il serait naturel, maintenant, pour prouver la pleine souveraineté et l’indépendance du Liban, que les deux pays frères échangent des ambassadeurs. » Q- Y a-t-il une date butoir pour la mise en application de la résolution 1559 ? R- « Nous souhaitons, bien sûr, que la mise en œuvre de la résolution 1559 ait lieu avant le prochain rapport du Conseil de sécurité prévu dans six mois. Le plus tôt sera le mieux. » Q- La prorogation du mandat du président Lahoud est-elle légitime ? R- « La tenue d’une élection présidentielle est l’une des dispositions de la résolution 1559. Cette élection n’a pas eu lieu. À la place, la Chambre des députés a prorogé le mandat du président pour une nouvelle durée de trois ans. Je peux seulement répéter ce que le secrétaire général (de l’ONU) a dit dans son premier rapport au Conseil de sécurité sur la manière dont la prorogation est intervenue moins de 24 heures après l’adoption de la résolution 1559. Il y avait exprimé sa conviction que les gouvernements et les dirigeants ne devraient pas se maintenir dans leurs fonctions au-delà des limites prescrites par leur mandat. Cela tient également pour le Liban. » Q- Les médias internationaux et de nombreux responsables libanais font état de preuves relatives à la fourniture par la Syrie d’armes aux combattants palestiniens au Liban. Qu’en est-il vraiment ? R- « De hauts représentants du gouvernement libanais m’ont informé qu’en effet, il y a eu un flux massif d’armes à destination du Liban, et le flot d’armes va de plus en plus croissant depuis quelques semaines. Ce qui me préoccupe fortement. Une partie de ces armes a été acheminée aux milices palestiniennes au Liban. Ce qui est une bonne raison d’être inquiet. Le gouvernement syrien n’a pas nié qu’il y avait des armes passant à travers ses frontières, mais il soutient qu’il s’agit de contrebande à travers une frontière très longue et difficile à contrôler. Les Syriens maintiennent aussi qu’il existe un trafic d’armes du Liban vers la Syrie. » Q- Pensez-vous que la résolution 1559 mènera ultimement à un accord de paix entre le Liban et Israël, et entre la Syrie et Israël ? R- « Mon espoir est que tout cela mènera à la signature d’un accord de paix juste entre la Syrie et Israël, entre le Liban et Israël, et aussi entre le futur État palestinien et Israël. »
New York, de notre correspondante aux Nations unies, Sylviane ZEHIL

L’émissaire des Nations unies en charge de l’application de la résolution 1559 du Conseil de sécurité, Terjé Roed-Larsen, souligne la nécessité, pour consolider la souveraineté du Liban, de l’établissement de relations diplomatiques entre le Liban et la Syrie, et d’un accord entre les deux pays sur le tracé...