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LITTÉRATURE Il a reçu le prix de la paix des libraires allemands Orhan Pamuk, un romancier en butte au nationalisme turc

Le romancier turc Orhan Pamuk, qui s’est vu remettre le prestigieux prix de la paix des libraires allemands, s’est attiré la foudre des nationalistes turcs pour sa défense des causes arménienne et kurde. «Quand on essaie de réprimer les souvenirs, il y a toujours quelque chose qui revient, je suis ce qui revient», a dit un jour cet écrivain né il y a 53 ans dans une famille bourgeoise et francophile d’Istanbul. À l’exception de longs séjours aux États-Unis, il n’a jamais vraiment quitté le quartier de son enfance, la mythique Corne d’Or de la vieille Istanbul. Après des études d’architecture et de journalisme, il se consacre exclusivement à la littérature. Son premier roman, Cevdet Bey et ses fils, parut en 1982. Suit, en 1985, son roman historique Le château blanc, puis Le livre noir, l’un des romans les plus lus en Turquie, qui décrit la recherche effrénée d’une femme par un homme pendant une semaine dans une Istanbul enneigée, boueuse et ambiguë. Il a aussi publié Mon nom est rouge, subtile réflexion sur la confrontation entre Orient et Occident dans l’Empire ottoman à la fin du XVIe siècle, sorti comme ses autres livres en France chez Gallimard. «Avec Orhan Pamuk est honoré un écrivain qui, plus qu’aucun autre poète contemporain, suit les traces historiques de l’Occident dans l’Orient et celles de l’Orient dans l’Occident», selon l’Association des libraires allemands qui honore chaque année un écrivain s’engageant pour la paix dans le monde. Ce prix est déjà allé à un compatriote de Pamuk, Yasar Kemal. Dans son roman Neige, l’un des principaux personnages, Ipek, évoque un musée de Kars, à la frontière arménienne. «Naturellement, dit-elle, quelques touristes vinrent, espérant apprendre un massacre des Turcs par des Arméniens, ce fut donc un choc de découvrir quand dans un musée l’histoire se présentait d’une toute autre manière.» Orhan Pamuk, un grand nerveux à lunettes qui parle vite, n’y est pas allé par quatre chemins, dans une interview accordée en février 2005 au journal suisse Tagesanzeiger. «Trente mille Kurdes et un million d’Arméniens ont été tués en Turquie. Presque personne n’ose en parler, à part moi, et les nationalistes me haïssent pour cela», a affirmé l’écrivain traduit en plus de vingt langues. Un sous-préfet avait réagi en ordonnant la saisie et la destruction de ses romans, et l’écrivain doit être jugé en décembre devant une cour d’Istanbul pour «insulte délibérée à l’identité turque», il risque théoriquement de 6 mois à 3 ans de prison pour ses propos. «On peut avoir des opinions différentes, mais chacun en Turquie lit ses livres», avait réagi Faruk Sen, directeur du Centre d’études turques d’Essen en Allemagne, un important centre de recherche, lors de l’annonce de l’octroi du prix de la paix à Pamuk. «C’est un prix critique qui va faire des vagues», selon lui. Le célèbre romancier est néanmoins un fervent défenseur de l’adhésion de la Turquie à l’Union européenne.
Le romancier turc Orhan Pamuk, qui s’est vu remettre le prestigieux prix de la paix des libraires allemands, s’est attiré la foudre des nationalistes turcs pour sa défense des causes arménienne et kurde.
«Quand on essaie de réprimer les souvenirs, il y a toujours quelque chose qui revient, je suis ce qui revient», a dit un jour cet écrivain né il y a 53 ans dans une famille...