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CORRESPONDANCE - Après la salsa, le meringué et le hip-hop Il faut danser «reggaeton» avec Shakira et Tego Claderon

WASHINGTON-Irène MOSALLI Avec Dalida c’était «Il faut danser reggae dans la pagaille pas gaie / De nos jours sans couleurs…» Aujourd’hui, il faut danser «reggaeton» avec Shakira, Tego Calderon et les autres chanteurs «latinos» hip. Le «reggaeton» est un genre musical chanté en espagnol, dérivé du reggae et comportant des influences hip-hop et rap d’Amérique centrale et des Caraïbes. Ce métissage de rythmes, qui fait danser la jeunesse urbaine d’Amérique latine, a atteint les USA. L’un des tubes actuels est Tortura, interprété par la bouillonnante Shakira. Ce titre fait partie d’un album qu’elle a sorti cet été et qui s’intitule Fijacion Oral Vol, riche en sonorités hybrides panaméricaines. Rien d’étonnant à cette déferlante latine, issue de la courbe démographique en cours: un recensement effectué en 2002 a révélé qu’un Américain sur huit était hispanique, et que la nouvelle génération était bilingue et biculturelle, entraînant fatalement le pop dans sa direction. Il y a quelques années, le tempo venu de là-bas était répercuté par des voix de stars sud-américaines s’exprimant en anglais: Ricky Martin (originaire de Porto Rico), Marc Anthony (Porto Rico) et Shakira (Colombie). Puis ce fut le «reggaeton» qui a été comme le rappel vers un retour total aux racines. Urbain et contestataire À l’instar du hip-hop américain, le «reggaeton» est une musique de jeunes associés au mouvement urbain «underground», et exprime leurs problèmes et leurs préoccupations: violence, sexe et racisme. Et quand on danse le «reggaeton», c’est avec beaucoup de sensualité. Ce genre est en passe d’éclipser la salsa, le merengué et autres cadences venues d’Amérique latine. Son grand prêtre se nomme Tego Calderon. Né en 1972 à Porto Rico et élevé en Floride, il a vécu dans un environnement qui vénère Isamel Rivera: véritable légende de la musique afro-caraïbienne, à jamais la fierté des Portoricains et le modèle des «soneros» (chanteurs de salsa) du monde entier. Alors il a développé un style unique mélangeant les airs portoricains à la «bomba» et à la «plena». Respect pour cet art de la rue Avec El Abayarde ( une petite fourmi rouge de Porto Rico qui est également son logo), Tego Calderon a réussi l’exploit de séduire à la fois les inconditionnels du rap US et les puristes de la salsa la plus traditionnelle. Cet album, qui s’est déjà écoulé à 150000 copies à Porto Rico et à 70000 aux États-Unis, est sur toutes les ondes, non seulement à Porto Rico, mais également à New York et dans toutes les grandes villes américaines à grande concentration latine. Non content de s’être imposé en mai dernier comme la seule vraie révélation du Festival de la musique latine de Miami, Calderon, qui ne mâche pas ses mots, en profite pour dire tout le mal qu’il pense de l’industrie pop: «La salsa a perdu tout son sens, et elle s’est complètement coupée de la réalité. Ce n’est plus de la musique, c’est du business... Et la même chose est arrivée au rap. L’industrie n’a aucun respect pour la rue où sont nées ces formes artistiques. Elle détourne la culture de la rue pour en faire un produit complètement coupé de ses origines. Aseptisé.» Et à 31 ans, Tego Calderon plonge avec délectation dans les racines musicales et culturelles portoricaines mixant à la salsa et à la bomba africaine le rap et la «dance music», mélangeant allègrement instruments acoustiques et platines de DJ, l’argot des années 60 et la langue des «barrios» la plus actuelle. Le racisme est un des thèmes les plus fréquents chez Calderon. Dans Loiza, une chanson qui s’ouvre au son des tambours africains de la bomba, il accuse la société portoricaine d’être raciste: «Ils veulent me faire croire / Que je fais partie d’un pays / Où trois races seraient égales... / Mais vous avez échangé nos chaînes d’esclaves contre les menottes des flics.» Calderon revient régulièrement sur l’influence de ses origines africaines. «Je suis révolté quand il s’agit de racisme, et les gens sont fiers lorsqu’ils entendent quelqu’un dénoncer sans détour cette réalité. Je ne suis pas un gentil garçon qui chante de jolies chansons avec une jolie voix. Je suis fidèle à ce que je suis et, musicalement, je fais quelque chose qui me ressemble. »
WASHINGTON-Irène MOSALLI

Avec Dalida c’était «Il faut danser reggae dans la pagaille pas gaie / De nos jours sans couleurs…» Aujourd’hui, il faut danser «reggaeton» avec Shakira, Tego Calderon et les autres chanteurs «latinos» hip. Le «reggaeton» est un genre musical chanté en espagnol, dérivé du reggae et comportant des influences hip-hop et rap d’Amérique centrale et...