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Actualités - OPINION

Un 14e attentat qui va peut-être juguler la série noire

Pourquoi moi ? La gorge serrée, la maman de May Chidiac n’a su que répondre à sa fille qui rouvrait les yeux. L’attentat implique d’abord que la cible a été choisie parce qu’elle était plus facile à atteindre qu’une autre. En effet, May Chidiac, comme elle l’a confié auparavant, ne s’entourait d’aucune précaution particulière. Cependant, la portée de la tentative dirigée contre elle ne peut en aucun cas être minimisée. Les commanditaires adressent en effet, à travers ce 14e attentat en un an, un clair et net avertissement qu’ils restent déterminés à poursuivre leur plan infernal. Pour déstabiliser ce pays renaissant, démontrer qu’il est incapable de se gouverner, en mettant à nu l’impuissance des autorités locales. Et susciter, comme l’a signalé Sabeh, le regret de l’époque antérieure, moins libre, mais plus sûre. En utilisant les services, toujours selon le ministre, de professionnels aguerris, insaisissables, capables de planifier et d’exécuter aussi bien des massacres, ou des déflagrations dévastatrices, que des assassinats individuels. Toujours selon Sabeh, on fait lourdement payer au Liban le prix de son indépendance retrouvée. La sécurité, déclarée ligne rouge sous l’ancien système, était l’os qu’on lui donnait à ronger pour lui faire supporter sa servitude. Maintenant qu’il s’est libéré de ses chaînes, qu’il a recouvré son pouvoir de décision autonome, on veut lui retirer sa quiétude. L’équation est évidente, et nul, même parmi les fidèles des anciens tuteurs, ne la met en doute. Mais si le Liban reste chancelant sur le plan de la proportionnée sécuritaire, il n’en garde pas moins de fortes réserves immunitaires. D’abord, et c’est évidemment essentiel, aucune composante majeure du pays ne tombe dans le piège, grossier mais redoutable, des dissensions confessionnelles. Un piège tendu par les malfaisants, qui frappent systématiquement une seule région, en souhaitant sans doute, mais vainement, qu’elle se dresse contre les autres. Et que l’esprit unificateur du 14 mars vole définitivement en éclats, au niveau de la population. Ensuite, et il faut le reconnaître, le pays trouve avantage dans le fait patent que ses responsables actuels ne tentent pas de le berner. Ainsi, aussi bien Siniora que Sabeh ont été clairs : les moyens manquent, les services sécuritaires battent de l’aile et tout indique que les attentats vont se poursuivre, faute de fil conducteur menant aux coupables, ont-ils dit aux Libanais. Cette franchise suscite une présomption en faveur des dirigeants. Que les Libanais ont dès lors tendance à croire quand ils promettent de restructurer, de réactiver les services, pour traquer sans relâche les coupables et les conduire en justice. Cela avec le concours diligent des spécialistes américains et français, que Siniora a sollicité. En se montrant plus soucieux de promouvoir la sécurité de ses compatriotes que leur soi-disant dignité nationale, comme prétendait le faire l’un de ses prédécesseurs, hostile en son temps à une enquête internationale. Mais, il faut également le souligner, le flanc sécuritaire national est gravement affaibli par les querelles politiques ou politiciennes de toutes sortes. Inquiétude L’un des membres de la majorité parlementaire s’en alarme. En déclarant qu’il est temps de réaliser que la situation du Liban, toujours précaire, commande que l’on mette de côté divisions, divergences et petits calculs. Pour ce député, il faut conjuguer les efforts, collecter toutes les bonnes idées pour faire face au plan terroriste. Il invite tous les Libanais, en particulier ceux qui sont en position d’être bien informés, à faire part aux autorités, sans tarder, de tout ce qu’ils peuvent savoir ou soupçonner. Cette personnalité pense que la phase ne se prête pas aux critiques faciles, car il est essentiel que chacun contribue d’une manière positive à protéger le pays. D’autant qu’il se trouve dans une phase de mutation qui peut mal tourner si l’unité nationale n’est pas consolidée. La source citée met en effet l’accent sur l’énormité même de la transformation que le Liban subit : après quinze ans de guerre domestique et quinze autres années de tutelle aveugle, il s’émancipe, cesse d’être un État policier soumis au « remote control » étranger, pour retrouver la démocratie. Certes, on ne peut pas dire que l’air de la liberté grise les Libanais, car ils restent étreints par les pénibles réalités d’une crise socio-économique endémique. Par contre, comme le relève le parlementaire cité, certains politiciens semblent perdre la tête et ne songer qu’à tirer profit des nouvelles donnes. Au mépris des intérêts les plus urgents du pays, dont la protection sécuritaire. À ce propos, les professionnels prêtent une attention particulière aux indications de Sabeh concernant l’afflux, par mer ou par la voie terrestre, d’armes destinées à des parties présentes sur la scène libanaise. Le ministre Marwan Hamadé a confirmé cette nouvelle, soulignant qu’il fait traiter le problème. En faisant mention du trafic par voie terrestre, le ministre de l’Intérieur a mis le doigt sur la plaie : les frontières sont ouvertes aux quatre vents, perméables à toutes sortes de contrebandes et favorables à toute opération terroriste. Or, pour boucler les frontières, encore faut-il en connaître le contour exact. Ce qui signifie qu’outre Chebaa, le Liban a une raison de plus de demander à la Syrie de contribuer à tracer les frontières, pour les homologuer ensuite auprès de l’ONU. Un détail : ni la Syrie, ni ses médias, ni ses fidèles partisans libanais n’ont réagi aux propos de Sabeh sur les infiltrations terrestres à travers les lignes frontalières. Il faut cependant noter que des opposants reprochent aux dirigeants de ne pas suivre une politique unifiée par rapport à ce problème. L’un de ces contestataires relève que le pouvoir reste d’ailleurs en proie à des luttes internes plus ou moins sourdes et ne parvient pas à se montrer cohérent. Il ajoute qu’il est de toute évidence tout à fait urgent de résoudre les conflits d’ordre politique concernant le dispositif sécuritaire pour que les services puissent fonctionner, en cessant de servir des pôles déterminés. Et en cessant, selon cette source, de perdre leur temps à traquer ou à tracasser les parties opposantes, pour se consacrer au service bien compris de l’État, donc du public. La majorité répond que, justement, le projet élaboré par les ministres de l’Intérieur et de la Défense vise avant tout à redonner aux services sécuritaires cette fonction publique que réclame l’opposant cité. Ajoutant que le Conseil des ministres va probablement approuver demain la création, proposée par les deux ministres, d’une unité centrale des opérations, localisée au Sérail et qui coordonnerait étroitement l’action de tous les services sécuritaires, policiers ou militaires. En fournissant régulièrement aux autorités politiques un état des lieux et des informations détaillées sur le plan sécuritaire. Philippe ABI-AKL
Pourquoi moi ?
La gorge serrée, la maman de May Chidiac n’a su que répondre à sa fille qui rouvrait les yeux. L’attentat implique d’abord que la cible a été choisie parce qu’elle était plus facile à atteindre qu’une autre. En effet, May Chidiac, comme elle l’a confié auparavant, ne s’entourait d’aucune précaution particulière. Cependant, la portée de la tentative...