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Actualités - OPINION

Les alliés de Siniora lui reprochent ses rapports consensuels avec le chef de l’État Après le non présidentiel, la majorité est fixée sur les intentions du régime

En proposant un chambardement du conseil de commandement des FSI, la majorité a voulu tester le régime sur le dossier des nominations. Il a dû s’en douter. Mais il leur a donné réponse sans atermoyer, sans tergiverser. En justifiant son refus par des raisons qui touchent au fond comme à la forme. Le président Émile Lahoud a en effet relevé que les cadres en poste ne sont en service que depuis quelques mois. En effet, ils ont été désignés sous le cabinet Karamé, à la demande du ministre de l’Intérieur de l’époque, Sleimane Frangié. Qui avait expliqué qu’il ne pouvait travailler avec les mêmes instruments que son prédécesseur, Élias Murr. Le chef de l’État juge donc le timing inadéquat, prématuré et inutile, puisqu’il n’y a pas de postes vacants à pourvoir. Il précise de plus que certains des noms proposés sur la liste que lui a remise le président du Conseil sont contestables. Et il a donc prié Fouad Siniora de revoir sa copie, pour lui soumettre éventuellement un autre projet de décret. Ce qui est finalement une façon de dire non sans rompre les ponts. La balle revient donc dans le camp du ministre de l’Intérieur, qui a préparé les permutations sur les recommandations du directeur général des FSI, le général Achraf Rifi. Politiquement, le fossé entre le régime et la majorité se creuse. Mais les relations entre les deux têtes de l’Exécutif restent courtoises. Elles n’ont pas atteint le degré d’hostilité intense et généralisée à tous les sujets ou presque, qui les marquait du temps du regretté président Hariri. En effet, au stade actuel, le litige se limite pratiquement aux nominations. Vues sous l’angle confessionnel, comme sous l’angle de l’appartenance politique des postulants. Pressions Ce différend, il convient de le souligner, gêne moins les lahoudistes que l’entourage du Premier ministre. Ce dernier se trouve en effet pris entre l’enclume du régime et le marteau de sa propre majorité. Dont plusieurs piliers lui font ouvertement des remontrances. Le sommant de ne pas composer, d’aller de l’avant, d’imposer la nomination de cadres sûrs aux postes de commande sécuritaires, administratifs ou judiciaires. Sans se préoccuper de l’avis de la minorité. Or, il se trouve que Fouad Siniora est un adepte de la notion de démocratie consensuelle. Et il semble lui répugner de défier à la fois une opposition populairement solide et une minorité gouvernementale assez conséquente. Le président du Conseil, relèvent les observateurs, ne souhaite pas prendre le risque de voir les ministres lahoudistes claquer la porte. Car ils pourraient être suivis par les gens d’Amal et du Hezbollah, alliés électoraux de sa majorité et postélectoraux du régime. Mais pourra-t-on éviter la crise ? Ce qui s’est produit hier montre que l’on est déjà dans l’impasse côté nominations. Et que l’on risque d’aller très vite dans le mur. D’autant que les joumblattistes, deuxième épine dorsale, si l’on peut dire, de la majorité, sont repartis en campagne contre le régime. Ils menacent, si Siniora continue à tergiverser (disent-ils), de retirer leurs ministres du gouvernement. En proclamant que la majorité doit prendre les rênes sans tarder, et sans compromis avec ce qu’ils appellent les résidus de la tutelle. Les joumblattistes, ou plus exactement les membres de la Rencontre démocratique, exigent qu’on ne laisse aucune chance à l’ancien système de se renflouer, de surnager. Ils veulent sinon l’éviction immédiate du régime, du moins sa mise en quarantaine, son isolement total. Partant de là, et soutenus du reste par nombre de haririens, ils demandent à Sabeh de ne pas plier, de ne pas renoncer à sa liste. À ce propos, un détail à signaler : le ministre de l’Intérieur a préparé ses propositions sans consulter les présidents, Siniora compris. Usant de la sorte des prérogatives que la loi lui reconnaît. En précisant qu’il n’a pas à s’expliquer sur des choix fondés uniquement, selon ce qu’il assure, sur des critères de compétence, de capacité, de fiabilité et de crédibilité. Appréhensions Mais les présidents ont assez mal pris la chose. Non seulement le président Lahoud, mais aussi le président Berry. Qui, selon ses visiteurs, conseille à Sabeh de ne pas répéter l’expérience. L’intéressé répond indirectement en déclarant qu’il s’arme de la loi, mais qu’il reste prêt à rencontrer les présidents pour s’expliquer avec eux, s’ils le lui demandent. Walid Joumblatt pour sa part s’inquiète ouvertement des prestations, un peu trop diplomatiques à l’égard du régime, du président Siniora. Comme d’autres piliers de la majorité, il semble penser que la souplesse du président du Conseil est un signe de faiblesse. Il met l’accent sur l’affaire des cadres de sécurité, sur la nécessité de larguer l’ancien ordre établi. En nommant des gens capables, dont la loyauté irait uniquement à l’État. Sans laisser au régime l’occasion de marquer des points, aux dépens de la majorité comme du gouvernement. Mais à dire vrai, il existe également beaucoup de membres de la majorité qui, comme Siniora, estiment que le Liban ne se gouverne pas en termes numériques, mais par la devise du consensus. Surtout entre des patriotes rassemblés au 14 mars puis séparés par la suite. Toujours est-il que le refus de signer du président Lahoud va sans doute avoir des retombées au sein du cabinet. Certains ministres ont en effet l’intention de demander ouvertement au président Siniora de trancher. De ne pas permettre au régime, au titre d’un éventuel compromis, de nommer encore des cadres dans les services de sécurité ou dans la justice. Ces membres de la majorité refusent de prendre pour argent comptant les assurances du chef de l’État et du président Berry. Qui affirment tous deux ne pas chercher à faire désigner leurs hommes, mais bien des gens compétents, loin de tout esprit de copartage. Le but étant de moderniser l’Administration en activant notamment les organismes de contrôle. Selon les membres de la majorité, si les deux présidents étaient animés d’aussi bonnes intentions, ils laisseraient faire ce réformateur notoire qu’est Siniora. Philippe ABI-AKL
En proposant un chambardement du conseil de commandement des FSI, la majorité a voulu tester le régime sur le dossier des nominations. Il a dû s’en douter. Mais il leur a donné réponse sans atermoyer, sans tergiverser. En justifiant son refus par des raisons qui touchent au fond comme à la forme. Le président Émile Lahoud a en effet relevé que les cadres en poste ne sont en service que...