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Actualités - CHRONOLOGIE

En librairie - Cinq livres pour une lecture divertissante Tentations d’Orient

L’Orient, mot magique et ambigu, a fait rêver, depuis des siècles, plus d’un écrivain, artiste ou simple voyageur à la recherche de mystère et de dépaysement. Hors des sentiers battus de best-sellers codés ou décodés, une sélection d’ouvrages autant propices à la chaleur aoûtienne qu’à une tangible tentation d’Orient. Voilà donc une romance coloniale sur fond de Mille et une nuits indiennes et de Liaisons dangereuses; une histoire romancée de la création de Marrakech qui réécrit une des belles pages de l’histoire arabo-andalouse du XIe siècle ; une galerie de portraits déjantés croquée par un jeune auteur égyptien; un voyage en citations, photos, gravures ou poèmes pour redécouvrir la Syrie; et, enfin, les récits et aventures extraordinaires d’un comte polonais en terre d’Arabie. «Impressions d’Orient et d’Arabie» du comte Waclav Seweryn Rzewuski Voici un très beau livre pour son aspect, la couverture, l’iconographie, le soin apporté à l’édition. C’est surtout un ouvrage extrêmement original, écrit en français au siècle avant-dernier par un comte polonais, Waclaw Rzewuski (neveu de Jan Potocki, l’auteur du fameux Manuscrit trouvé à Saragosse), et même s’il s’agit de mettre en scène des expériences vécues, le contexte décrit, les actions relatées – aller acheter des chevaux arabes pur-sang pour les haras de Pologne –, cette histoire d’un cavalier polonais chez les Bédouins (1817-1819) se lit comme un roman. Une langue savoureuse, des aventures extraordinaires. «Le français de l’émir a du style et possède un large registre d’expressions», commente Bernadette Lizet coordinatrice de l’ouvrage. Un souffle épique, pour exprimer le sentiment de la nature, les grands paysages et les êtres restés en harmonie avec elle (les Bédouins errants ou Lady Stanhope). Une tournure concrète, directe, lapidaire parfois, pour donner une description ethnographique. Et une grande intensité dramatique dans les épisodes politiques. Fruit d’une coopération avec la Bibliothèque nationale de Pologne, le Museum d’histoire naturelle, la publication de ce manuscrit est également une réussite scientifique. À cet égard, les éditions José Corti se sont également faites pédagogues, avec sur le site Internet de quoi entraîner à la lecture de ce récit, au moyen de la mise en ligne de l’introduction, du sommaire, d’un chapitre intégral et de l’étonnante galerie des dessins du comte polonais, qui pour le coup est une invitation à se laisser prendre par cet enchantement oriental. «Le Moghol Blanc» de William Dalrymple James Achille Kirkpatrick débarque sur la côte orientale de l’Inde en 1779, habité par une dévorante ambition d’officier dans l’armée de Madras de la Compagnie anglaise des Indes orientales; il aimerait bien se faire un grand nom dans la conquête du sous-continent indien. Mais, ironie de l’histoire, le destin en décide autrement, et c’est lui qui est conquis non pas par une armée, mais par une princesse indienne musulmane. En effet, Kirkpatrick vient d’être nommé, à l’âge de 34 ans, pendant l’insupportable été caniculaire de 1797, Lord résident britannique de la Compagnie anglaise des Indes orientales à la cour du nizam d’Hyderabad, où il aperçoit Khair un-Nissa, «La plus admirable d’entre toutes», une sublime beauté âgée de seulement 14 ans, petite-nièce du Premier ministre du nizam et descendante du Prophète. Tombé fou amoureux de Khair, au point d’en oublier toute ambition, il relève de nombreux défis afin de l’épouser. Khair, déjà fiancée à un noble d’Hyderabad, vit enfermée derrière le purdah, ce lourd rideau qui soustrait les femmes résidant dans le zenana, le harem, au regard des hommes. Kirkpatrick se convertit à l’islam et épouse enfin la bégum Khair un-Nissa en 1800. Selon certaines sources indiennes, il devint même agent double au service d’Hyderabad contre les intérêts de la Couronne. Il n’existe personne d’autre que William Dalrymple pour transformer l’histoire vraie d’un grand amour entre un diplomate anglais et une princesse indienne en une envoûtante et brûlante saga mêlant passion, séduction et trahison sur fond d’intrigues de harem et d’espionnage. Le Moghol Blanc déroule, en une grandiose fresque épicée, l’histoire colorée et souvent turbulente de l’Inde du XVIIIe siècle. «Syrie, éclats d’un mythe» de Nathalie Galesne Voici un livre original et attachant qui nous emmène découvrir – loin de toute pollution politique ou idéologique – un pays voisin, la Syrie, et cela à travers mille et une rencontres d’hier et d’aujourd’hui. Le parti pris de Nathalie Galesne est celui d’une mosaïque – aux multiples pièces faites de citations, de photos, de gravures ou de poèmes – qui donne à voir de manière furtive des fragments de l’histoire et de la culture de ce pays. Un texte très enlevé écrit par l’auteur donne, par ailleurs, à cet ensemble son homogénéité. On croise ainsi, pêle-mêle, au fil des pages, les chroniques sarrasines, les amours de Jane Gigby et de cheikh Medjuel, les souks de Damas, les caravansérails d’Alep, les rives et les sites archéologiques de l’Euphrate, la constellation poétique d’Adonis.... Chacun des thèmes abordés permet ainsi au lecteur de découvrir une parcelle de l’histoire syrienne qu’il faut vite quitter pour aller aussitôt vers d’autres sollicitations. C’est peut-être la seule critique qu’on puisse faire à ce livre : il traite de tant de sujets qu’il ne peut que brièvement les évoquer. Mais en même temps, cela donne à voir la richesse culturelle et historique de ce grand pays. Une mise en page subtile et bien conçue contribue beaucoup à offrir au lecteur le plaisir gourmand que procure cette belle invitation au voyage, de la maquette impeccable aux images très bien choisies, en passant par la succession savamment accumulée de descriptions et de portraits. Une occasion, à partir des multiples récits qui composent ce livre, de (re)découvrir des aspects souvent méconnus de la Syrie. «Zaynab» de Zakya Daoud Journaliste et historienne franco-marocaine, née Jacqueline Loghlan, Zakya Daoud a été la fondatrice en 1966 et la rédactrice en chef de Lamalif, un mensuel de réflexion, tiré à 12000 exemplaires jusqu’à son interdiction en 1988 par le gouvernement marocain. Elle travaille à la Documentation française et contribue aujourd’hui à des revues comme Arabies, Le Monde diplomatique, Panoramiques... Française, naturalisée marocaine (fait rarissime), elle est une observatrice et une critique sans complaisance de la vie politique marocaine. Zaynab, reine de Marrakech, est son premier roman. À Aghmat, dans les montagnes de l’Atlas, naît en 1039 Zaynab la sauvageonne, une petite fille à la beauté, à l’intelligence et au destin exceptionnels... Son destin est d’avoir épousé, en quatrièmes noces, Youssef Ibn Tachfin, le fondateur de la dynastie almoravide. Parti d’un petit royaume divisé, il parvint par l’épée et par le verbe à rassembler autour de lui la presque totalité du Maghreb, de l’Atlantique à l’Algérois, du désert à la mer, avant de conquérir l’Andalousie. Avec, à la clé, des thèmes universels – amour, guerre, dynastie, religion –, les luttes fratricides, le destin d’une famille à travers les générations et les passions des peuples… «Petits voleurs à la retraite» de Hamdi Abou-Golayyel C’est une drôle de tribu qui habite au 36 de la quatorzième rue de la Cité Nasser du quartier Helwane, dans la banlieue du Caire. Abdel-Halim, patriarche et maquereau, règne sur la maisonnée et ses quatre fils : Gamal, le trafiquant de hasch, Seif l’homo, Amer, le voyou, et sa femme, la sensuelle Zenouba, et enfin Salah. Le narrateur s’en tient à sa recommandation liminaire: «Imaginez “par exemple” que vous vivez la vie d’un personnage de roman, et assurez-vous que ce personnage sait finement jouer de votre aptitude à la fourberie et au mensonge, comme il excelle à serrer la main de gens que vous haïssez cordialement.» Petits voleurs à la retraite est le premier roman de Hamdi Abou-Golayyel, 36 ans, ouvrier et autodidacte. Contrairement à ce que le narrateur prétend à la cinquième ligne de la page 10 «pour se dérober à un échec prévisible dans l’art de manier la description», il est nécessaire de noter que tout l’intérêt du ce roman réside dans cette galerie de personnages croqués au scalpel. Force est, donc, de constater que le jeune Hamdi Abou-Golayyel manipule les adjectifs comme un samouraï son épée. Le résultat est tout aussi tranchant que vif. Maya GHANDOUR HERT
L’Orient, mot magique et ambigu, a fait rêver, depuis des siècles, plus d’un écrivain, artiste ou simple voyageur à la recherche de mystère et de dépaysement. Hors des sentiers battus de best-sellers codés ou décodés, une sélection d’ouvrages autant propices à la chaleur aoûtienne qu’à une tangible tentation d’Orient.
Voilà donc une romance coloniale sur fond de Mille et...