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Actualités - CHRONOLOGIE

Témoignages de pêcheurs arrêtés en Syrie

Il y a quelques semaines, la tension qui caractérise actuellement les relations libano-syriennes s’était traduite par la détention d’une dizaine de pêcheurs libanais qui avaient, selon les autorités syriennes, « dépassé les limites des eaux territoriales libanaises ». Les pêcheurs ont été détenus durant plusieurs jours pour enquête. Des manifestations avaient été organisées par leurs confrères pour protester contre ces mesures vexatoires. Que s’est-il réellement passé ? Deux des pêcheurs libanais arrêtés, Mounzir Khabbaz et Mohammed Sangari, rencontrés à Tripoli, racontent leur mésaventure. Ils étaient sur deux bateaux différents quand ils ont été interceptés le même jour par les patrouilles syriennes. « Nous savions que nous avions franchi la ligne des eaux territoriales syriennes, se souviennent-ils. Mais nous avions fait cela des dizaines de fois avant ce jour-là, et aucune mesure n’était prise à notre encontre, surtout que les pêcheurs syriens franchissent eux aussi régulièrement la limite entre les deux pays. » D’ailleurs, parmi les deux groupes de pêcheurs arrêtés, un certain nombre sont syriens ou d’origine syrienne (naturalisés libanais). Ce qui a aggravé le cas des deux pêcheurs rencontrés, c’est qu’ils n’étaient pas en possession de leurs papiers ce jour-là. Dans le passé, même si de tels abus étaient commis, intentionnellement ou pas, les autorités syriennes se suffisaient d’un avertissement oral. « Nous avons été traités d’une manière très sévère par les autorités syriennes, poursuivent Mounzir et Mohammed. Nous avons été traînés à la gendarmerie puis au tribunal. Nous avons fait de la prison, enfermés avec des criminels. Jamais nous n’avons eu aussi peur de rester enfermés là-bas. » En fait, les deux pêcheurs et leurs compagnons ont été condamnés par un tribunal à une semaine de prison, une peine qu’ils ont purgée entièrement avant leur libération. Samir Dabbagh, membre du conseil exécutif du syndicat des pêcheurs du Liban-Nord, donne une version quelque peu plus nuancée. « Ce sont des événements qui se produisaient chaque année à deux ou trois reprises, dit-il. Mais auparavant, des contacts effectués par les responsables libanais, notamment par (l’ancien Premier ministre) Nagib Mikati, aboutissaient rapidement à une solution. Cette année, les circonstances étaient différentes. » Il déclare s’être rendu en Syrie pour se réunir avec les responsables dans le cadre d’une délégation, comportant notamment des représentants du ministère des Transports et les propriétaires des bateaux de pêche arrêtés. « Ces responsables nous ont franchement indiqué que leur comportement n’avait pas changé à l’égard des pêcheurs libanais, mais qu’ils devaient prendre des mesures plus strictes de peur de la contrebande », ajoute-t-il. À la question de savoir comment les pêcheurs libanais sont capables de reconnaître les limites des eaux territoriales en mer, M. Dabbagh souligne que par expérience, « il s’agit de repérer certains rochers dans l’eau juste devant le fleuve de Arida ». Selon lui, « les Syriens ont promis d’être plus coulants dans des cas de courants d’eau trop forts, de visibilité mauvaise ou de coupures d’électricité ». Tous les pêcheurs interrogés semblent convaincus que ce sont des pressions exercées par des pêcheurs syriens, mécontents de leur présence, plutôt que des raisons politiques qui ont poussé les autorités syriennes à agir de la sorte, même s’ils ne nient pas « les changements de circonstances » qui ont influé sur le climat qui règne entre les deux pays. Si les pêcheurs arrêtés se sont réjouis des manifestations organisées en vue de leur libération, le syndicaliste semble penser qu’elles ont au contraire envenimé l’atmosphère. « Je pense personnellement qu’il fallait tenter les moyens diplomatiques avant de recourir à l’escalade, dit-il. C’est somme toute un événement assez banal qui a été politisé. » Mohammed et Mounzir ne sont pas de cet avis. Ils se sont déclarés « franchement surpris » de ces mesures. « Dorénavant, non seulement nous n’allons plus outrepasser les frontières, mais nous n’allons même plus nous en approcher », déclarent-ils non sans humour.
Il y a quelques semaines, la tension qui caractérise actuellement les relations libano-syriennes s’était traduite par la détention d’une dizaine de pêcheurs libanais qui avaient, selon les autorités syriennes, « dépassé les limites des eaux territoriales libanaises ». Les pêcheurs ont été détenus durant plusieurs jours pour enquête. Des manifestations avaient été organisées...