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Le Libanais est décidément incorrigible

Ce qui se passe en ce moment me remet en mémoire les étapes sinistres du début de la guerre civile. À chaque fois qu’on enregistrait une catastrophe, des voix s’élevaient, outragées, moralisantes, vengeresses. Et puis, plus rien ! Les criminels se volatilisaient. La rue se résignait, et les benêts de mon genre s’imaginaient qu’une leçon était tirée et que les choses s’arrangeraient... Jusqu’au round suivant, où les mêmes méthodes reproduisaient les mêmes effets. C’est ainsi que nous avons sacrifié notre plus bel âge et que nous nous retrouvons encore aujourd’hui pratiquement au même point, côté pourriture, côté corruption, côté déchéance. « Jusques à quand ? » selon la célèbre formule de Cicéron. Nos politiciens, à peine revigorés par la réaction de tout un peuple en février dernier, en reviennent encore une fois à leurs mesquineries électorales. Dès qu’on parle « élections » devant le Libanais, son cerveau est d’abord court-circuité... avant de s’illuminer. Il voit le siège parlementaire sous ses propres fesses, ou sous celles du parent le plus proche ou le voisin le plus cher. La graine de la cupidité primitive démultiplie dans son subconscient toutes les possibilités : il est littéralement magnétisé. Alors adieu morale, idéal, honnêteté, promesses ! Ce n’est pas un « sauve-qui-peut » mais un « à qui mieux mieux ». Comme dans toutes les urgences. Et de ce chaos, même pas savamment orchestré, émergera en fin de parcours une situation générale tout aussi incolore que nocive. C’est exactement ce à quoi nous assistons hic et nunc. Des remèdes ? Il n’y en a probablement pas ! Chacun peut s’attendre à tout moment à être trahi, éliminé, trucidé. Il y a quelques semaines, on débarrassait sauvagement le corps journalistique de l’un de ses plus brillants représentants. Parce qu’il ne plaisait pas à un certain bord, parce qu’on veut adresser un message à ceux d’en face, parce qu’on a l’âme terroriste, parce que l’on refuse à appartenir au genre humain. L’autre jour à Rabieh, la série noire continuait. Et nous restons là, à nous désoler. De nouveau incapables de réagir. Fatigués de vivre et de subir toujours la même chose. Désorientés devant la détermination inépuisable des envieux. Impuissants face à la haine et l’éternel recommencement des parasites démolisseurs qui ne peuvent respirer que dans l’intrigue, la sape et la mort. Et puis après ? Rien ! Nous continuerons à nous alimenter, à conduire nos véhicules- corbillards comme des robots, à gesticuler et à rire gros ou à faire des enfants qui iront un peu plus tard grossir davantage la cohorte de nos émigrés. Qui a dit que la béatitude était le privilège de ceux qui accèdent au paradis ? Moi je vous affirme que les « béats » vivent ici, sur ce littoral maudit des dieux, depuis que la Méditerranée s’est formée... Louis INGEA

Ce qui se passe en ce moment me remet en mémoire les étapes sinistres du début de la guerre civile. À chaque fois qu’on enregistrait une catastrophe, des voix s’élevaient, outragées, moralisantes, vengeresses. Et puis, plus rien ! Les criminels se volatilisaient. La rue se résignait, et les benêts de mon genre s’imaginaient qu’une leçon était tirée et que les choses...