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La renaissance du Liban implique la révision de Taëf

À un moment politique où tout le monde s’interroge sur la forme du gouvernement, plus particulièrement, le patriarche Sfeir se penche sur le fond. En observant qu’il est indispensable de réviser les accords de Taëf. Qui ont certes permis la cessation de l’état de guerre intestine. Mais n’ont jamais été appliqués complètement. De plus, frappés de graves lacunes, ils se sont trouvés tronqués, déviés, utilisés arbitrairement à des fins discriminatoires connues. Il est donc nécessaire, pour que le pays reparte du bon pied, de lancer un dialogue général au sujet du pacte dit document de l’entente nationale. Tout au long des années, le patriarche Sfeir a plaidé pour une application complète de Taëf. À la lumière de laquelle on détecterait les failles à corriger, ainsi que les éléments positifs à promouvoir. Il n’en a rien été. Pourquoi ? Parce que, de toute évidence, Taëf a été instrumentalisé en vue de permettre à la Syrie, désignée unique tutrice du Liban, de mener le jeu à sa guise. En intervenant, par exemple, pour arbitrer tout litige entre les présidents, notamment lors de la formation des gouvernements. Ce qui la mettait pratiquement en mesure de nommer les ministres et de distribuer les portefeuilles à sa convenance. En cas de différend en Conseil des ministres, Damas enjoignait parfois le recours au vote et parfois l’interdisait, en recommandant qu’on laisse de côté les dossiers litigieux. Ce qui fait que ce pays s’est retrouvé avec un tas impressionnant de problèmes, souvent graves ou importants pour les gens, jamais réglés. Ainsi, maintenant que la Syrie ne peut plus s’immiscer directement, et encore moins ouvertement, il n’y a plus d’instance, plus de recours, pour trancher les conflits entre le président de la République et le président du Conseil. Car la Constitution issue de Taëf ne prévoit rien à ce propos. Le pays se trouve exposé aux tiraillements entre dirigeants ou pôles politiques, comme on le constate actuellement. Avec des déchirements, d’âpres luttes d’influence et de rapports de force. Là où dans l’esprit de Taëf, esprit que le patriarche Sfeir invite à respecter, les communautés doivent participer toutes ensemble au pouvoir harmonieusement. Sans qu’aucune ne tente de dominer les autres. Car cela pourrait avoir pour effet de les porter à s’abriter derrière des réflexes d’autonomie. Chacune courant alors, en quelque sorte, derrière son propre mini-État. C’est pour protéger cet esprit de saine participation que la Constitution, dans plusieurs de ses articles, stipule qu’il doit y avoir accord entre le chef de l’État et le président du Conseil. Mais la grave erreur, répétons-le, est qu’elle ne dit pas que faire si un tel accord n’est pas réalisé. Ainsi, l’ouverture des sessions parlementaires ordinaires ou extraordinaires ne peut se faire que par entente entre les deux. Le président de la République peut négocier et conclure des traités internationaux, mais il faut que le président du Conseil des ministres les paraphe. Les décrets de nomination du gouvernement, d’acceptation des démissions ou de révocation des ministres nécessitent également la double signature. Quand le président de la République estime nécessaire de convoquer le Conseil des ministres à une séance extraordinaire, il a besoin de l’aval du chef du gouvernement. On sait qu’il y a en outre des tiraillements sur l’ordre du jour du Conseil : il est établi par le président du Conseil. Mais il doit en donner connaissance préalablement au chef de l’État, qui pense dès lors que cette disposition signifie qu’il a son mot à dire, ce que le vis-à-vis conteste. En pratique, l’absence de mécanismes d’arbitrage ouvre la voie à des crises de pouvoir. Les présidents, s’ils s’accordent par exemple sur une liste de ministres, peuvent toujours se chamailler sur la répartition des portefeuilles. Ou sur leurs parts respectives. Ou encore sur le tiers de blocage que tantôt l’un, tantôt l’autre, tente d’obtenir. Antérieurement, il est arrivé par exemple que le chef de l’État ait la majorité pour lui en Conseil des ministres. Actuellement, c’est Fouad Siniora qui devrait disposer de cet avantage. Alors, le régime et ses alliés tentent d’obtenir la minorité de blocage. Et, en tout cas, le pays risque d’être confronté à un blocage tout court. Si ce n’est maintenant, cela peut se produire n’importe quand. Tant qu’on n’a pas rectifié la cause, c’est-à-dire Taëf, comme le demande Mgr Sfeir. Émile KHOURY
À un moment politique où tout le monde s’interroge sur la forme du gouvernement, plus particulièrement, le patriarche Sfeir se penche sur le fond. En observant qu’il est indispensable de réviser les accords de Taëf. Qui ont certes permis la cessation de l’état de guerre intestine. Mais n’ont jamais été appliqués complètement. De plus, frappés de graves lacunes, ils se sont...