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Actualités - OPINION

Citoyen Grognon Entre jus et mankouché, le folkore du bac libanais

«Eau, jus, mankouché. Quelqu’un voudrait-il de l’eau, du jus, une mankouché ? » Non ! Nous ne sommes pas au bord de la mer ou dans un lieu public de divertissement. Nous sommes bien dans un des nombreux centres d’examen où les élèves de terminale passent les épreuves du bac libanais. Ou plutôt tentent de les passer au milieu des appels répétés, chaque quart d’heure, du marchand ambulant qui sillonne les couloirs et les salles d’examen. Pour les élèves, éberlués et pour le moins déconcentrés, l’amusement est de courte durée. Quelques quarts d’heure plus tard, ils n’ont qu’une envie : celle de faire taire le camelot dont la voix bêlante finit pas leur taper sérieusement sur le système. Rien de bien grave, diraient les responsables qui se sont dépêchés, à la fin des épreuves, de clamer haut et fort l’excellente ambiance dans laquelle les examens se sont déroulés. C’est bien là que le bât blesse. Excellente, elle l’est certes, l’ambiance, dans ces salles d’examen. Une ambiance si conviviale que l’élève est déconcentré, sans arrêt, pour un oui ou pour un non. La vérification de l’identité et du numéro du candidat devrait n’être qu’une simple formalité. Mais lorsque cette formalité se répète plusieurs fois et que les surveillants se succèdent pour multiplier les vérifications, avant de tamponner la feuille d’examen, puis de masquer la partie portant le nom du candidat, la vérification prend l’allure d’un va-et- vient incessant. Sans parler de la curiosité de certains surveillants, qui ne se privent pas, en passant, d’interrompre un élève pour lui demander : « Ah, tu es de telle région ? C’est où exactement ? Tu es apparenté à untel ? » Ce va-et-vient est loin d’être terminé. Les examinateurs veulent à présent savoir combien d’élèves rédigent les épreuves en arabe, en français ou en anglais. De comptage en recomptage, la mission semble périlleuse, vu que certains élèves ne présentent pas toutes les matières dans une seule et même langue. Bizarre, mais tout aussi déconcertant pour les élèves… Qui finissent pas participer au décompte, pour avoir la paix, une fois pour toutes. Mais l’heure n’est toujours pas au calme. Du moins pas encore. Cette fois-ci, ce seront les calculatrices qui feront l’objet de discussions. « Interdites, les calculatrices programmables », lance un examinateur à la ronde, avant d’envoyer la horde de surveillants effectuer, encore une fois, les vérifications nécessaires. Programmables ou non ? Les surveillants n’en ont pas la moindre idée. Ils finissent pas annoncer tout haut, devant des élèves excédés mais hilares, que les calculatrices à grand écran sont interdites, mais que celles à petit écran sont autorisées. Allez comprendre ! Que dire aussi des conversations entre surveillants qui sirotent leur café, cigarette à la main ? De ceux qui, pour aider leurs poulains, piquent la copie d’un élève appliqué ? De ceux qui chuchotent les réponses aux étudiants ou les dictent carrément à toute la classe ? Le calme ? Ce n’est qu’à l’arrivée du contrôleur que le calme absolu règne finalement, et pour quelques minutes seulement. À défaut d’être réputées pour leur sérieux, les épreuves du bac libanais ont au moins le mérite d’être un véritable folklore. Anne-Marie EL-HAGE
«Eau, jus, mankouché. Quelqu’un voudrait-il de l’eau, du jus, une mankouché ? »
Non ! Nous ne sommes pas au bord de la mer ou dans un lieu public de divertissement. Nous sommes bien dans un des nombreux centres d’examen où les élèves de terminale passent les épreuves du bac libanais. Ou plutôt tentent de les passer au milieu des appels répétés, chaque quart d’heure, du...