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Actualités - ANALYSE

Éclairage Cessez-le-feu entre Moukhtara et Rabieh en vue d’un cabinet de réconciliation

Deux négations, ou plutôt deux volontés négatives – deux « nolontés » – ne font pas un gouvernement d’union, et encore moins une réconciliation. Il y a six mois, les cabinets empaquetés par Damas étaient des sommes de négations, vouées à ne fonctionner que grâce aux interventions divines de Anjar. Mais ce n’est plus le cas aujourd’hui, où le Liban est tenu de prouver à la communauté internationale qu’il est enfin capable de s’administrer lui-même. Qu’il est tenu de donner une image différente de lui-même, loin de ce syndrome de Stockholm qui fait que, dans la psychologie libanaise, certains dirigeants se sentent encore quelque part virtuellement attachés à leurs anciens ravisseurs, et qu’ils se retrouvent, toujours sur le plan psychosociologique, prisonniers de la dialectique du maître et de l’esclave. Après l’intifada de l’indépendance couronnée par le phénomène du 14 mars et le retrait syrien, il était temps de tourner la page de quinze ans d’occupation et d’établir une nouvelle ère fondée sur le partenariat national. Les élections sont en effet terminées, et, dans les régimes les plus démocratiques, le débat ultrahouleux qui est légitimé par la bataille électorale s’interrompt de facto une fois que les résultats sont connus. Jouer aux prolongations, par le biais d’échanges d’accusations, au moment où il est question de la formation du premier gouvernement vraiment indépendant depuis près d’un quart de siècle, et où il est temps de jeter de nouvelles bases pour commencer le chantier de la reconstruction politique, économique et sociale du pays, ne peut être que destructeur. Dans la pratique, les différents protagonistes de la scène politique ont enfin amorcé, dans les dernières 48 heures, le virage pour entrer dans cette nouvelle phase constructive. Passé le temps de la surenchère, l’heure est désormais au dialogue, au réchauffement sur le front Moukhtara-Rabieh, ce qui laisse à penser que le nouveau cabinet pourrait enfin voir le jour dans un contexte de réconciliation nationale. Walid Joumblatt et Michel Aoun, qui ne parvenaient pas à trouver, pour une multitude de raisons jusqu’à là un peu ésotériques, un terrain d’entente, ont tous les deux proclamé un « cessez-le-feu ». Le chef du PSP l’a fait hier, par l’intermédiaire d’un homme auquel il faudrait accorder une médaille du mérite pour sa patience à toute épreuve et sa détermination à réaliser le consensus : Marwan Hamadé, qui a indiqué, dans un entretien à la LBCI, sa volonté de favoriser la recherche d’une solution. Le député FL, Georges Adwan, a également déployé des efforts dans ce sens entre Moukhtara et Rabieh au cours des derniers jours. Mais c’est aussi la position des évêques maronites qui a déterminé Moukhtara à revoir ses positions. Le général Aoun l’a fait directement, lui aussi à la LBCI, estimant qu’il était temps de « mettre fin à la surenchère » à tous les niveaux et de mettre en place un climat d’entente et de concorde qui serait consacré, pratiquement, dans le travail du cabinet en équipe et l’élaboration commune d’une déclaration ministérielle représentant les points de vue de toutes les parties. Le Premier ministre désigné, Fouad Siniora, a d’ailleurs pris contact hier avec le général Aoun pour évoquer à nouveau une éventuelle participation du CPL au cabinet. Et le général Aoun a encore fait preuve de bonne volonté, précisant que le problème n’était pas chez lui. C’est ensuite le député aouniste Nabil Nicolas qui a été reçu par M. Siniora pour poursuivre la discussion, désormais fondée sur trois axes principaux pour le CPL : une représentation équitable, une équipe ministérielle homogène et la fin des attaques verbales. Quoi qu’il en soit, l’assouplissement de la position du PSP vis-à-vis du CPL devrait redonner un coup de fouet à la formation du cabinet, à la grande satisfaction des chancelleries occidentales qui refusent de voir le pays livré à des démons internes dont il pourrait bien se passer. Le retour hier du député Saad Hariri d’Arabie saoudite devrait accélérer le processus, et il se pourrait que le député de Beyrouth prenne encore le chemin de Rabieh, mais dans un climat désormais assaini, pour fixer une fois pour toutes la question de la participation aouniste au cabinet. Il reste le problème du ministère des Affaires étrangères, que la communauté chiite, et plus particulièrement le Hezbollah, continue de convoiter, alors que d’autres parties estiment qu’il serait mieux pour le dialogue entre le Liban et la communauté internationale d’octroyer le ministère à un diplomate ultracrédible, respecté et accepté par le monde entier, comme Fouad Boutros. Dans ce contexte, les ministrables dont le nom revient très couramment dans les différentes formules sont : Michel Pharaon et Nehmé Tohmé (grecs-catholiques), Bahige Tabbarah, Ahmed Fatfat et Mohammed Safadi (sunnites), Mohammed Khalifé, Ali Abdallah et Trad Hamadé (chiites), Ghattas Khoury, Pierre Gemayel, Joe Sarkis, Nayla Moawad ou Boutros Harb et Youssef Saadallah el-Khoury (maronites), Fouad Boutros et Issam Abou Jamra (grecs-orthodoxes). Le nouveau cabinet, dont la mission est énorme, sera placé sous le signe de l’entente et du rééquilibrage politique. Aussi sera-t-il nécessaire pour lui de se pencher sur tous les dossiers à clôturer absolument pour garantir une réconciliation nationale réelle, concrète : la libération des détenus libanais en Syrie, le retour des miliciens de l’ALS réfugiés en Israël, et surtout la libération de Samir Geagea, d’autant que plus rien ne justifie le maintien du chef des FL en prison. Et cela peut se faire dès demain, puisque, selon Georges Adwan, la commission des législations et des consultations près le ministère de la Justice a indiqué que selon l’article 69 de la Constitution, la Chambre est actuellement en session extraordinaire dans la mesure où le cabinet est démissionnaire. Ce qui lui donne la pleine possibilité d’adopter la proposition d’amnistie en faveur de Samir Geagea. Et d’accomplir, dès demain, un acte concret de dialogue. Michel HAJJI GEORGIOU

Deux négations, ou plutôt deux volontés négatives – deux « nolontés » – ne font pas un gouvernement d’union, et encore moins une réconciliation. Il y a six mois, les cabinets empaquetés par Damas étaient des sommes de négations, vouées à ne fonctionner que grâce aux interventions divines de Anjar. Mais ce n’est plus le cas aujourd’hui, où le Liban est tenu de prouver à...