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Un gouvernement de 24 ou de 30 ? Déjà des exigences, et un risque de blocage Les consultations parlementaires, une formalité soigneusement préparée

Ce jeudi, le chef de l’État entame les consultations parlementaires impératives. Pour la désignation de la personnalité appelée à diriger le premier gouvernement de l’ère nouvelle. Les blocs participeront à cette consultation soit en formation complète, soit par le truchement de délégués dûment mandatés. Certains chefs de file, comme Joumblatt et Hariri, sans doute peu désireux de se retrouver face à face avec le président Lahoud, ne se rendront pas au palais. Mais, bien entendu, les tractations préliminaires, qui battent leur plein en fait depuis une bonne semaine, dépassent le premier stade relatif à la désignation d’un président du Conseil. Elles portent sur la configuration du gouvernement, son volume numérique, l’attribution des postes-clés, les quotas de représentation. Elles portent, surtout, sur la formule de base. Il s’agit en effet de savoir si la majorité nouvelle dite du Bristol, 72 députés, veut gouverner seule. Ou composer avec Aoun et des indépendants. Ou encore, s’élargir pour accueillir en son sein les prosyriens, finalement nombreux, qui surnagent. Ou encore, se résigner à remettre les rênes à des technocrates extraparlementaires, assortis de quelques ministres d’État politiques représentant les principaux blocs. Les choix à faire sont donc cruciaux. D’autant qu’il existe deux risques majeurs. D’abord, que le chef de l’État, qui en émet clairement la menace en cas d’insatisfaction, ne refuse de signer les décrets de nomination du gouvernement. Avec, au bout, une crise de pouvoir difficile à résoudre. Car la Constitution ne dit pas ce qu’il faut faire en cas de désaccord entre le président de la République et le président du Conseil désigné sur la composition du cabinet. L’autre danger, tout aussi important, est que la belle cohésion de l’ancienne opposition ne vole en éclats. À cause de disputes lors du copartage des strapontins ministériels. Cela d’autant plus facilement qu’il ressort de la période électorale une profonde équivoque de fond. On sait en effet que le tandem Hariri-Joumblatt d’une part, Aoun d’autre part, ont noué des alliances avec des anciens loyalistes qui ne partagent pas du tout, ou très peu, leur élan indépendantiste. Hariri-Joumblatt se sont alliés avec Amal-Hezbollah. Et Aoun avec Frangié-Murr. Alors il devient ardu de savoir qui va être coopté et qui va être écarté. Dès les premiers échanges de pourparlers, il s’est établi que la majorité Hariri-Joumblatt-Kornet Chehwane veut se réserver les principaux portefeuilles. Sans refuser de voir les autres participer. C’est ce que Saad Hariri a appelé la politique de la main tendue. Le leader du plus grand bloc que la place de l’Étoile ait jamais connu (32 députés) a ainsi longuement rencontré Aoun mardi soir. Préférant traiter du fond plutôt que des contingences arithmétiques, les deux hommes ont surtout discuté, confirment leurs proches, du programme que le gouvernement devrait adopter. Ils ont, pour cette prise de contact politique, voulu tous deux considérer que des questions comme la distribution des portefeuilles en quantité et en qualité sont secondaires. Des détails, en somme. Mais, comme nul ne l’ignore, c’est souvent sur les détails qu’un projet achoppe. Un cabinet made in Lebanon Il est quand même réconfortant que la fabrication d’un gouvernement se fasse en songeant tout d’abord au plan global à suivre. C’est pratiquement la première fois que l’on relève une telle approche sur la scène politique locale. À dire vrai, du moment que tout le monde chante la réforme, il n’y a pas d’autre façon de procéder. Car le changement et le redressement ont besoin d’être soigneusement organisés, préparés. La tâche est en effet ardue, tous les domaines, de l’administration à l’économie, en passant par le politique et le social, devant faire l’objet d’une totale refonte. Le courant aouniste, on le sait, pense que pour réaliser les réformes, il faut d’abord ouvrir les dossiers en ordonnant un audit. Pour savoir comment ce pays en est arrivé à une dette publique abyssale de plusieurs dizaines de milliards de dollars. Mais le courant aouniste pense aussi que le gouvernement doit s’efforcer de répondre aux aspirations et aux revendications des gens. Pour montrer qu’il est le premier gouvernement, après le départ des Syriens, vraiment made in Lebanon. Fait par les Libanais, pour les Libanais. Sans fax ni remote control. Pour ce qui est du Premier ministre, on sait que le Courant du futur a opté pour Fouad Siniora. Il avait été question un moment de Bahije Tabbarah. Mais comme le redressement financier et économique est une priorité absolue, on préfère s’adresser au spécialiste qu’est Siniora. Qui a à son actif un projet de budget 2004 représentant un véritable noyau des réformes requises. Pour alléger la dette publique et le déficit budgétaire. En outre, Siniora, les donateurs le connaissent bien et ils ont traité avec lui lors de Paris II. Il en de même pour la Banque mondiale et le Fonds monétaire international. Il les rassure beaucoup parce qu’ils voient en lui un expert avisé et non un politicien traditionnel. De plus, c’est le compagnon de route le plus ancien du regretté président Rafic Hariri. Il s’est tenu à ses côtés, comme ministre des Finances titulaire ou délégué, dans les différents gouvernements formés depuis 1992. Quant au volume du gouvernement, il s’établirait entre 24 et 30 membres, selon les exigences des uns ou des autres. Les portefeuilles-clés sont évidemment très demandés. Le Courant du futur veut les Finances et l’Intérieur. Le président Lahoud, indiquent ses proches, estime qu’il faut redonner la Défense à Élias Murr et en faire de nouveau le vice-président du Conseil. Il ambitionne également de garder la haute main sur le palais Bustros. Quant aux aounistes, ils laissent entendre qu’il leur faudrait, à eux et à leurs partenaires soudés dans le même bloc (Skaff, Murr, le Tachnag), cinq portefeuilles, répartis entre diverses communautés, dont la Justice et un autre maroquin de première catégorie. Le Hezbollah et Amal veulent chacun deux ministères, dont un des services. Mais, comme les professionnels le soulignent, les négociations prendront leur tournure définitive une fois qu’un président du Conseil aura été désigné pour mener le bal. Philippe ABI-AKL

Ce jeudi, le chef de l’État entame les consultations parlementaires impératives. Pour la désignation de la personnalité appelée à diriger le premier gouvernement de l’ère nouvelle. Les blocs participeront à cette consultation soit en formation complète, soit par le truchement de délégués dûment mandatés. Certains chefs de file, comme Joumblatt et Hariri, sans doute peu...