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Actualités - OPINION

Tout dépendra de la configuration ministérielle pour les réformes Difficile de faire du neuf avec de l’ancien : les risques de stagnation politique sont maintenus

Un Parlement qui ne comprend même pas une moitié d’éléments nouveaux, 61 sur 128. Et dont le président, record de longévité, est réélu pour un quatrième mandat de quatre ans. Si le président de la République se maintient également à la barre, le renouveau promis ne serait en pratique que du vent. Avec la prorogation du statu quo politique, à quelques variations près, les espérances de changement et de réforme risquent de se dissiper. Car il est difficile de faire du neuf avec de l’ancien. Certains soutiennent que le nouveau gouvernement pourra faire la différence, équilibrer la balance, compenser le décor archaïque des deux premières présidences. Il représente, il est vrai, une lueur d’espoir. Mais une double question de base se pose avec acuité : quelle forme de gouvernement faut-il pour lancer effectivement le chantier de l’épuration et de la réforme ? Dans quelle mesure cette configuration est-elle réalisable à l’ombre de l’inévitable système de copartage ? Chaque formule a ses avantages et ses inconvénients. Un gouvernement issu de la seule majorité parlementaire dite du Bristol serait relativement cohérent. Mais trouverait son action entravée autant par une forte opposition que par une partie de l’opinion laissée sur la touche. Un gouvernement dit d’union nationale apaiserait pour un temps l’opinion. Mais, englobant toutes les parties, c’est-à-dire quatre tendances principales (Bristol, les prosyriens, l’axe Amal-Hezbollah et Aoun), il serait bourré d’antagonismes. Et pourrait rapidement imploser. Si jamais, d’ailleurs, il parvient à s’entendre sur la teneur de la déclaration ministérielle. Enfin un gouvernement de technocrates se dévouerait à la tâche avec efficacité. Mais n’aurait pas assez d’autorité politique pour faire plier les mentalités, et serait vite réduit à l’impuissance. Dans tous les cas de figure, la responsabilité retombe sur les épaules de l’ancienne opposition plurielle. Il ne suffit évidemment pas qu’elle ait remporté une majorité de strapontins, ce qui l’autorise à exercer le pouvoir. Il faut encore qu’elle ne déçoive pas les Libanais et qu’elle tienne les promesses du 14 mars. Il lui faut penser aux pièges du sentimentalisme facile. Savoir que la magnanimité et l’apaisement peuvent être des bombes à retardement. Dans ce sens qu’en acceptant la mise sur pied d’un cabinet d’union nationale, on prendrait le risque d’introduire au sein du pouvoir une force d’obstruction basée sur la règle du tiers de blocage. En d’autres termes, beaucoup de projets pourraient être torpillés du fait qu’un tiers des ministres s’y opposeraient, pour une raison ou pour une autre. C’est exactement ce qui s’était produit avec la plupart des gouvernements précédents. Les engagements qu’ils prenaient dans leurs déclarations ministérielles en termes d’épuration, de réforme, de lutte contre la corruption, contre le chômage, de redressement économique et financier, d’encouragement des investissements, de privatisations, de titrisation, de dégraissage du mammouth administratif par le renvoi des parasites restaient lettre morte. Parce que les projets provoquaient des conflits entre les forces se partageant l’Exécutif. Chacun voulait garder sa poule aux œufs d’or particulière, telle caisse, tel conseil, telle direction générale, etc. Ainsi, les engagements pris à Paris II ont-ils été trahis. Au lieu de réduire le gaspillage, de réorienter les dépenses, d’activer la production, de relancer la croissance, l’on n’a fait qu’accroître la dette publique et le déficit budgétaire. S’il en a été ainsi, alors qu’une seule ligne, la ligne qui s’autoproclamait nationale alors qu’elle était prosyrienne, était au pouvoir, que pourrait-on attendre si plusieurs tendances contradictoires siégeaient ensemble au Conseil des ministres ? Moralité Certains soutiennent que le nouveau Parlement est moralement différent, meilleur, que le précédent. Détaché de la tutelle. C’est possible, mais c’est là un jugement de valeur, de surcroît anticipé. Car c’est aux actes que l’on doit juger. Ces cadres estiment que désormais la majorité politique est claire, qu’elle saura faire ses choix en gardant sa cohésion. Et gouverner en conséquence. Redisons-le, il faut l’espérer. Mais cela reste à vérifier. Les signes avant-coureurs ne sont pas encourageants : au sujet de la réélection de Berry, beaucoup se sont plaints que la décision ait été prise sans qu’ils soient consultés, au mépris de l’esprit de partenariat. Et de cette même cohésion chantée par les nouveaux loyalistes. Le coup risque de se répéter quand on parlera, par exemple, mouvement administratif, mutations et nominations. Et l’on pourrait assister à une pagaille généralisée si des blocs divergents dans le fond devaient se partager le pouvoir. Sans compter que le président Lahoud, s’il reste, pourrait toujours refuser de signer les décrets. On sait qu’il a déjà donné une idée de son option de résistance en faisant savoir, au sujet de la formation du gouvernement, qu’il s’attache au respect de l’article 53 C (Constitution). Qui lui donne le droit de refuser son feu vert à une équipe qui ne lui plairait pas. Entendre au sein de laquelle il n’aurait pas de ministres à lui. Émile KHOURY

Un Parlement qui ne comprend même pas une moitié d’éléments nouveaux, 61 sur 128. Et dont le président, record de longévité, est réélu pour un quatrième mandat de quatre ans. Si le président de la République se maintient également à la barre, le renouveau promis ne serait en pratique que du vent. Avec la prorogation du statu quo politique, à quelques variations près, les...