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Actualités - ANALYSE

PARLEMENT - Nabih Berry regagnera-t-il le poste qu’il occupe depuis 1992 ? Mardi prochain, l’élection du président de la Chambre pourrait marquer le début du changement

Les élections sont bel et bien terminées. Même si certains continuent à contester la loi inique qui a procédé au découpage aberrant des circonscriptions et à remettre en cause, à tort ou à raison, le degré de légitimité de la nouvelle Chambre, il reste que c’est le pragmatisme et le principe de la continuité des pouvoirs publics qui semblent l’emporter. D’autant que le Liban est apparemment confronté – même s’il s’agit là d’un schème réducteur – à une double dynamique. La première viserait, sur forte impulsion internationale, à consolider la stabilité précaire qui a fait place à la tutelle syrienne. La deuxième dynamique, déstabilisatrice, se traduit par la campagne d’attentats visant des symboles qui ont œuvré, par la pensée et/ou les actes, au rétablissement de la souveraineté. Elle se retrouve de fait encouragée, sinon littéralement démultipliée, par les violentes polémiques internes. Du coup, le ton est à l’apaisement général. Les échanges d’accusations ont pris fin. Seul Sleimane Frangié poursuivait sur sa lancée hier, affirmant, à l’antenne de la LBCI, que « les propos de Walid Joumblatt ne sauraient être pris au sérieux en fin de soirée parce qu’il a généralement abusé ». En effet, même si chacun des différents pôles politiques continue à tenir le même discours politique, tous ont toutefois jeté du lest sur la forme : Michel Aoun continue à remettre en question la représentativité de la Chambre, mais il n’a pas omis, hier de Bkerké, de répondre à la politique de la main tendue de Saad Hariri par un geste d’ouverture et de dialogue. Boutros Harb, toujours de Bkerké, a préconisé le passage à une nouvelle étape fondée sur « la recherche du consensus ». Joumblatt, enfant terrible des formules corrosives, a lui-même mis un sérieux bémol à son discours, hier soir, à l’antenne de la NBN, en manifestant des signes de désescalade et d’ouverture vis-à-vis de sa nouvelle bête noire, Michel Aoun. Le chef du PSP n’a pas exclu de rencontrer le général Aoun – les deux hommes ne se sont toujours pas réunis au Liban depuis le retour de l’ancien Premier ministre – « quand il le faudra ». Derrière cet assainissement du climat, qui intervient après que la tension politique et confessionnelle eut atteint son paroxysme durant les élections, certains observateurs croient apercevoir le spectre de la communauté internationale, qui souhaiterait voir le Liban recouvrer un peu de son dynamisme institutionnel et de sa culture démocratique. D’autant que les échéances pointent à l’horizon, qu’il sera bientôt question d’aider le Liban financièrement et que, pour cela, le pays du Cèdre devra montrer, à travers ses responsables politiques, qu’il possède vraiment la volonté d’aller de l’avant, et de réaliser des réformes structurelles, politiques et économiques. Cette perspective, qui passe par une nécessaire entente minimale sur le plan interne, pourrait expliquer la visite de Saad Hariri à Jacques Chirac à Paris, puis son déplacement en Arabie saoudite, ou encore le défilé d’ambassadeurs occidentaux chez le général Aoun à Rabieh. Il reste que, maintenant que tout se remet en place politiquement et alors même que, paradoxalement, des symboles politiques sont la cible des tueurs en série, tous les regards seront tournés la semaine prochaine vers la première séance de la Chambre. Le message de l’accalmie temporaire qui a semblé se mettre en place hier pourrait être que le véritable débat politique doit se poursuivre au Parlement. Que c’est au Parlement, le premier à être libre depuis 1972, et en fonction des différents dossiers, que la politique doit se faire, se défaire et se refaire, et non dans la rue. Dans ce cadre, le premier dossier chaud dont cette nouvelle Assemblée devra débattre très bientôt sera la présidence de la Chambre et la réélection ou non du président sortant, symbole des années syriennes et ultrafavori, Nabih Berry. Sauf que de plus en plus de voix se font entendre, ces derniers jours, pour remettre en question ce choix. Et c’est le même argument qui revient : « Tant qu’à changer, il faut vraiment changer. » Le général Aoun l’a dit hier, de même que d’autres pôles de Kornet Chehwane comme Nayla Moawad et Samir Frangié, à qui Boutros Harb a donné raison hier sur le principe. Même M. Joumblatt, qui défendait farouchement, il y a quelques jours encore, la réélection de Berry, a indiqué qu’il s’en remettra à des concertations avec son allié Saad Hariri, le Hezbollah – qui a réitéré hier son soutien à Berry par la voix de Hassan Nasrallah – et Amal. Sans oublier une autre dimension internationale, qui apparaît de plus en plus prégnante dans le contexte libanais : l’arrivée d’un nouveau président de la Chambre bien perçu par la communauté internationale, comme le vénérable Hussein Husseini, serait un signe fort envers le monde entier. D’autant que Husseini jouit d’un grand respect et d’une grande autorité au sein de sa communauté, qu’il marque une transition certaine avec le style de M. Berry et qu’il s’est déjà prononcé, dans un récent communiqué, en faveur du changement. La seule interrogation étant de savoir si les deux forces chiites, le Hezbollah et Amal, qui misent sur le prochain président de la Chambre pour faire face aux prochaines échéances, notamment celles qui sont relatives à la 1559 et au désarmement du Hezbollah, accepteraient la nomination de Husseini. Le 28 juin prochain, place de l’Étoile, la séance présidée par le doyen de la Chambre, Edmond Naïm (87 ans), qui en a déjà commencé hier les préparatifs, marquera très probablement le grand retour du régime parlementaire au Liban. Un grand, un énorme changement. Michel HAJJI GEORGIOU
Les élections sont bel et bien terminées. Même si certains continuent à contester la loi inique qui a procédé au découpage aberrant des circonscriptions et à remettre en cause, à tort ou à raison, le degré de légitimité de la nouvelle Chambre, il reste que c’est le pragmatisme et le principe de la continuité des pouvoirs publics qui semblent l’emporter. D’autant que le Liban...