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Actualités - OPINION

Un abominable message adressé à plusieurs parties

Des mains lâches, criminelles, qui veulent brouiller les cartes. En assassinant, à proximité de sa demeure, Samir Kassir. Journaliste de renom, politologue, enseignant universitaire. Mais aussi, mais surtout, intellectuel engagé activement, avec passion dans la défense de la démocratie, des droits de l’homme, des libertés. Ici ou ailleurs. Homme de causes nobles qu’il savait défendre avec éloquence, avec une pertinence et une logique imparables, dans les débats publics, télévisés ou autres. Ce qui l’avait rendu célèbre sur un plan international, car toutes les chaînes, étrangères, arabes ou locales, le sollicitaient régulièrement son avis. Son assassinat, ciblé, redonne de la voix au terrorisme qui avait auparavant sévi à travers des voitures piégées. Dont les explosions prenaient alors valeur de riposte aux marches de la liberté, organisées pour presser en même temps le départ des Syriens et du système d’oppression sécuritaro-politique. Maintenant, c’est la liberté de presse autant que d’expression, ou d’opinion, qui se trouve visée. Au moment où les Libanais votent, pour la première fois depuis 33 ans, loin de la tutelle. Samir Kassir, on le sait, ne ménageait jamais dans ses critiques, dans ses campagnes cette même tutelle syrienne, ses services propres ou annexes. Il écrivait dans le Nahar, que l’on a donc voulu atteindre. Ainsi évidemment que son PDG-éditorialiste, le nouveau député Gébrane Tuéni, lui aussi militant de longue date de l’indépendance. Et qui reste l’un des pôles majeurs d’un front d’opposition auquel les criminels adressent, manifestement, un message sanglant de terreur et d’intimidation. La violence de l’acte est d’autant plus marquée qu’il a été perpétré en plein jour, au cœur même de la capitale, où se trouvent la commission internationale qui enquête sur l’assassinat du président Hariri et les observateurs, européens ou autres, chargés de suivre les élections. Le message s’adresse donc aussi aux instances extérieures, comme pour leur signifier que ce pays ne peut être libéré, malgré leur concours. Et qu’on y fera toujours taire la voix du droit. Cependant, il est assez évident que ce langage criminel va politiquement produire, tout comme l’assassinat du président Hariri, des effets politiques contraires à ceux que recherchent les assassins. Dans ce sens que les Libanais se sentent encore plus révoltés et vont se mobiliser plus fortement aux côtés de l’opposition. En anathématisant les symboles de la tyrannie extérieure, du système et du pouvoir local sortants. Cela, à travers les urnes, destinées maintenant plus que jamais à plébisciter la souveraineté, la liberté et l’indépendance. Pour lesquelles Samir Kassir, comme tant d’autres martyrs avant lui, vient d’être tué. Les dés électoraux Cependant, s’il est vrai que le climat suscité par l’assassinat devrait porter l’opposition à se montrer moins divisée, concrètement, les alliances sont trop avancées pour que l’on puisse envisager des listes unifiées. Certes la bataille devrait sans doute prendre une allure moins acharnée, beaucoup plus souple sinon sportive. Mais, presque partout, les jeux sont faits, les dés sont jetés. À Baabda-Aley, Aoun et Arslane ont annoncé la couleur. Ce qui accélère la proclamation de la liste groupant, en face, Joumblatt, Hariri et le Hezbollah, dont les cadres, alarmés par le biffage du nom de leur candidat à Beyrouth, ont relancé Berry au Sud, pour s’éviter la même mésaventure dimanche prochain. Ils ont fait de même avec Joumblatt et avec d’autres pôles, pour Baabda-Aley, en demandant que toute la liste tombe dans l’urne sans panachage. Que l’on y retrouve donc le nom de leur candidat aux côtés de ceux de Joumblatt, de Hariri, des FL, des Kataëb d’Amine Gemayel, de la Rencontre de Kornet Chehwane et des indépendants. Pour ce qui est du PNL, Joumblatt lui a proposé lundi de coopter son secrétaire général, Élias Abou Assi, à Baabda-Aley. Mais en précisant qu’il n’y aurait pas d’association avec le Chouf où la liste est pratiquement prête. Donc qu’il n’est pas question de remplacer Georges Adouane, le FL, par Camille Chamoun, fils de Dory. Ce dernier a rejeté l’offre de Joumblatt, en avançant que l’alliance doit se faire partout ou nulle part. Et en précisant qu’il n’est pas disposé à donner des voix à Baabda-Aley à un Joumblatt qui le marginalise au Chouf. Pour le reste du Mont-Liban, au Metn, il semble que Aoun rejette l’idée de traiter avec la Rencontre de Kornet Chehwane en tant que telle, mais n’exclut pas la possibilité de s’entendre individuellement avec certains de ses pôles, qui refusent du reste cette approche et veulent agir au nom de la Rencontre, pas autrement. De ce fait, indiquent des sources informées, les tentatives d’arrangement entre Aoun, Amine Gemayel et Nassib Lahoud ont échoué. Bien que les aounistes le nient, leur liste incomplète et celle de Michel Murr qui l’est également pourraient échanger des voix. Au Kesrouan-Jbeil, les protagonistes attendent que Aoun se prononce et annonce sa liste. Là aussi les efforts visant à une entente des aounistes avec la Rencontre et avec Carlos Eddé semblent avoir avorté. Aoun s’acheminerait donc à retenir des indépendants. Il a posé à Mansour el-Bone la condition de coopérer avec lui sans Farès Souhaid et il a exigé de Farid el-Khazen, pour une alliance, qu’il se sépare de Farès Boueiz. Quoi qu’il en soit, si Aoun se présente avec des indépendants, il n’est pas impossible que les autres pôles de la région fassent bloc. Pour une liste éventuelle composée, au Kesrouan, d’el-Bone, Boueiz et el-Khazen ; et à Jbeil, de Souhaid, Eddé et Abbas Hachem. Toujours est-il que l’objectif politique prend maintenant un sens nouveau, après l’assassinat de Samir Kassir, qu’on ne peut dissocier de la tentative d’attentat contre Marwan Hamadé ou de l’assassinat du président Hariri, de Bassel Fleyhane et de leurs compagnons. Philippe ABI-AKL

Des mains lâches, criminelles, qui veulent brouiller les cartes. En assassinant, à proximité de sa demeure, Samir Kassir. Journaliste de renom, politologue, enseignant universitaire. Mais aussi, mais surtout, intellectuel engagé activement, avec passion dans la défense de la démocratie, des droits de l’homme, des libertés. Ici ou ailleurs. Homme de causes nobles qu’il savait...