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Portrait - Le petit-fils du géant appelle les chrétiens à un vote massif dimanche au Chouf Quand on s’appelle Camille Chamoun... (photo)

Il a quelque chose de Dorian Gray. Faustien, bébé Cadum. Son pacte, il a dû le décortiquer avant de le signer, exiger des clauses supplémentaires. Ce n’est pas seulement qu’il paraît en avoir 32 alors qu’il a 47 ans. Il a en plus cette insolente fraîcheur, la paupière souriante, la rétine qui rougit quand il y va de sa blague et d’un éclat de rire qu’il contient, un peu jet-setteur suisse blond vénitien, un peu Casper le fantôme. Surprenante, bienvenue dans un monde sans pitié où la langue de bois a fini par devenir l’idiome universel et transfrontalier, cette fraîcheur tombe à pic pour compenser une profonde inexpérience politique. Même si, en le rendant très sympathique, elle risque, tant qu’on n’aura pas rénové de fond en comble les mœurs de la chose publique made in Lebanon, de le desservir. Il est candidat indépendant à l’un des sièges maronites du Chouf. Le test, c’est dimanche, face à la liste Bristol. Qu’est-ce que ça fait de s’appeler Camille Chamoun ? « Cela fait longtemps que je me pose cette question. Il n’est pas évident à porter, mon nom… Il faut être à la hauteur de l’aspiration des gens. » Qu’est-ce qu’ils veulent ? « Un repère. Retrouver les années fastes du Liban. Ils veulent de la propreté, de l’intégrité. C’est chose rare de nos jours. » Chamoun Jr parle du géant, son modèle, sa source, son grand-père, « qui n’a jamais été un millionnaire, qui a commencé comme modeste avocat, qui s’est forgé lui-même, qui s’est frayé un chemin. Moi aussi je commence, presque aussi modestement ». Il y a quand même ce double C dont il a hérité, la griffe d’un titanesque, d’un flamboyant ancien président que les Libanais ont appris à adorer. « C’est vrai. Il y a un legs politique. Cela rend les choses un peu plus faciles. Et en même temps, c’est un challenge. Tout le monde essaye de me comparer à cette personne illustre, comme mon père avant moi. Nous vivons dans l’ombre de cette immense figure publique. » Et s’il ne devait rester qu’un souvenir avec le géant ? « Les parties de chasse avec lui. Mon entraînement au combat, à 13 ou 14 ans, au sein des Tigres du PNL. Mon baptême du feu en 1975. » Et puis tout cela s’arrête. Chamoun Jr est envoyé par son père Dory à Londres. Études de marketing. Puis des tonnes de petits boulots. Rien de mémorable. Enfin, la révélation. Dessiner, construire, produire des bateaux de plaisance. Quel lien entre les bateaux et la politique ? Ou c’est pour faire plaisir à papa ? « Je ne fais pas ça pour faire plaisir à qui que ce soit. Avec les autres gens de bonne volonté, je veux essayer de remettre le pays dans la bonne voie. Il y a un héritage politique à perpétuer… » Sérieusement… « Ma vraie motivation ? Je suis profondément attaché à ce pays. J’ai eu beaucoup d’occasions de partir, là où construire et vendre des bateaux est bien plus lucratif. » Comme son gigantesque grand-père, Camille Chamoun veut un Liban rêvé ; « petit paradis sur terre » est son credo, très slogan marketing, un Liban débarrassé des « arrivistes », de ceux qui ne pensent qu’à leurs intérêts personnels, de ceux qui sont incapables de véhiculer les espoirs du peuple. Il croit en les ressources humaines du pays, croit en la belle vie dans les villages, sait qu’il n’y a ni pétrole, ni diamants, ni mines d’or. « Mais il y a des idées. Et des têtes. Dont la majorité est à l’étranger faute d’opportunités d’emploi. » Évidemment. « Il faut une nouvelle classe politique. » Sauf qu’il s’appelle Camille Chamoun, petit-fils et fils de. « Et alors ? Je veux continuer à creuser ce projet d’avenir pour le pays auquel s’est consacré mon grand-père, dont les réalisations en ce sens sont de loin supérieures, en nombre et en qualité, à celles de tous les présidents réunis qui l’ont suivi. » Parler politique. Enfin, pas la vraie, la noble, mais la politicienne. Pourquoi ça n’a pas marché entre le PSP et le PNL ? « Cela date de la rivalité entre Camille Chamoun et Kamal Joumblatt. » Et la réconciliation PSP-FL, c’est bien, non ? « Elle m’aurait fait bien plus plaisir si cela avait été plus qu’une alliance électorale de circonstance. Il n’y a pas d’amour réciproque, indépendamment de la personne de Adouane, même si les FL du Chouf estiment qu’il ne répond pas vraiment à leurs aspirations. » Chamoun Jr dit aussi que les chrétiens du Chouf ne sont pas vraiment représentés. Chrétiens. Voilà un mot qui revient souvent dans la bouche du petit-fils. Dans le sens Est politique traditionnel. Il ne comprend pas les clivages au sein de ce camp-là. Il dit que c’est blanc bonnet et bonnet blanc, le PNL, les FL, le CPL, les Kataëb, etc. « La vraie opposition n’aura pas plus de 20 députés dans le prochain hémicycle. » Pourquoi, il y a de faux opposants ? Il ironise. « Ça va être un Parlement de 128 opposants. Il y a les vrais et il y a les made in Taïwan. Tout le peuple le sait. » Ou bien : « Ma priorité si je suis élu : essayer de former une alliance concrète entre les chrétiens, qu’il y ait un véritable bloc. » Et avec tout cela, aucun fanatisme, juste une envie que tout soit équilibré. Et pas la langue dans la poche, Chamoun Jr. Le choix du PNL Philippe Maalouf au Metn dans la liste Nassib Lahoud-Gemayel ? « Un choix de dernière minute, un mauvais choix, il aurait mieux fallu Jihad Salamé. Il est plus représentatif. » Le retour de Michel Aoun ? « Cela aurait pu être beaucoup mieux. » Georges Adouane, son FL de rival ? « Je dois reconnaître qu’ils auraient pu faire un meilleur choix… » Et poli, en plus… Mais il est tout seul contre une liste estampillée Bristol. Des chances ? « 50-50. » Vraiment ? « Il faut une participation massive des chrétiens dimanche. Et s’il y a 20 % d’abstention chez les druzes en plus… De plus, nous avons de très bonnes relations, depuis toujours, avec les sunnites de l’Iqlim. » Il y croit. Un peu. Chamoun Jr ne révolutionnera pas les théories politiques planétaires, et il le sait. Il est cool. Ce n’est pas donné à tout le monde. C’est déjà ça. Ziyad MAKHOUL
Il a quelque chose de Dorian Gray. Faustien, bébé Cadum. Son pacte, il a dû le décortiquer avant de le signer, exiger des clauses supplémentaires. Ce n’est pas seulement qu’il paraît en avoir 32 alors qu’il a 47 ans. Il a en plus cette insolente fraîcheur, la paupière souriante, la rétine qui rougit quand il y va de sa blague et d’un éclat de rire qu’il contient, un peu...