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L’analyse d’un officiel américain sur le rapport Annan « Le Conseil de sécurité ne veut pas voir la ligne bleue se transformer en ligne rouge »

New York : de notre correspondante aux Nations unies Sylviane ZEHIL Le premier rapport semestriel de Kofi Annan au Conseil de sécurité sur l’application de la 1559 a suscité de nombreuses réactions. L’Orient-Le Jour a rencontré un officiel américain qui désire garder l’anonymat. Dans un entretien, ce diplomate fait le point sur l’importance du retrait syrien, les élections législatives et le désarmement du Hezbollah. Q - Quelles sont les premières réactions du gouvernement américain au rapport Annan ? R - « Ce rapport de 13 pages détaille bien l’historique des événements. Il suit le modèle du rapport publié en octobre dernier. Il reconnaît l’importance du retrait des troupes syriennes. C’est là le développement le plus notable depuis six mois. En fait, le rythme de ce retrait des troupes, des forces militaires, des équipements et matériel militaires syriens est perçu de manière positive par nos porte-parole officiels à Washington. Il a été salué, à Beyrouth, par les Libanais comme un nouveau chapitre positif de leur histoire. C’est là la plus grande nouvelle de ce rapport. » « Le texte met toutefois en évidence des lacunes dans l’exécution de certaines clauses de la 1559. Il met aussi en valeur les possibilités de réaliser des progrès supplémentaires dans les mois à venir. Ainsi, il signale de manière détaillée l’absence évidente du gouvernement au Liban-Sud. Il y a aussi des signes positifs indiquant que l’armée libanaise est capable de jouer un rôle sécuritaire et militaire. Maintenant que les deux armées d’occupation, israélienne et syrienne, ont quitté le pays, il ne devrait plus y avoir de zones interdites d’accès. Nos rapports montrent une suspicion sur une présence importante d’une intelligence militaire et services de renseignements syriens. Ils n’ont pas forcément quitté le pays. L’annonce par les Syriens du retrait de toutes les forces “sécuritaires” dans leur lettre officielle au secrétaire général est aussi un signe positif. De toute façon, les Libanais se rendront rapidement compte si cette présence demeure très forte par l’effet négatif qu’elle aura sur l’exercice de la souveraineté libanaise. C’était en particulier un des facteurs de la réaction populaire contre la manipulation des institutions libanaises par l’interférence de ces éléments sur la vie politique libanaise. Comme la presse l’a rapporté ces derniers jours, les Libanais se comportent comme en pays souverain et indépendant avec le désir ressenti dans toutes les classes politiques de tenir des élections suivant les termes de la Constitution. C’est là un autre élément positif du rapport. » Q - Pensez-vous que les élections auront lieu dans les délais prévus ? R - « C’est un processus compliqué. Mais ce qui apparaît est que tout le monde est d’accord pour qu’il y ait des élections avant la fin de mai. Il y a un consensus général au Liban pour respecter le calendrier. Et, comme c’est le cas du Liban ou d’autres pays qui passent par une transition ou qui retournent à un processus politique, il est important d’appliquer le calendrier. Nous l’avons vu en Irak. Il est aussi important de transmettre à la population le message que sa voix va être entendue et que son vote compte. Il est essentiel que le nouveau gouvernement et le Parlement fassent leur possible pour profiter de l’aide proposée et s’y prendre à temps. On ne peut demander une assistance de dernière minute et l’obtenir. C’est quelque chose qui se prépare à l’avance. » Q - Serait-ce une assistance de la part des États-Unis ou de l’Onu ? R - « L’Onu a une grande expérience dans la tenue d’élections dans 60 pays. Elle a une expérience notamment en Arabie saoudite, Palestine, Irak, Afghanistan, Guatemala et Cambodge. Les Européens sont aussi prêts à fournir un soutien. Étant donné l’ouverture des médias libanais, s’il y a un sentiment que les élections sont manipulées, le fait sera aussitôt rapporté par la presse. Ce qui porterait atteinte au processus de remise sur pied du Liban. » Q - Le rapport note qu’aucun progrès palpable n’a été enregistré au niveau du « démantèlement et du désarmement » du Hezbollah et des Palestiniens. R - « Le rapport souligne que le Hezbollah est une milice armée dont l’activité au niveau de la ligne bleue représente une menace d’escalade. Cette activité militaire et violente constitue un risque pour la paix et la sécurité internationales. Bien qu’il ait été en quelque sorte contenu, il reste un sujet de préoccupation pour le Conseil de sécurité. Une activité d’une milice sur une partie du territoire signifie que le gouvernement n’a pas une souveraineté totale sur son territoire. » Q - Pensez-vous que l’armée libanaise soit en mesure de protéger le Liban-Sud ? R - « Le Liban est un petit pays qui n’a pas besoin d’une grande armée. L’armée est estimée à 75 000 hommes. Elle a la possibilité de contrôler ses frontières et fournir le support pour la souveraineté du pays. Le Liban a aussi des forces de sécurité qui sont aussi significatives. Tout est une question de volonté politique. Tous les Libanais désirent coopérer. Cela ne veut pas dire que les problèmes vont disparaître. Mais nous pensons que le Liban a une maturité politique qui lui permet de retenir les leçons du passé et de ne plus retomber dans les horreurs de la guerre. » Q - Pensez-vous que la prochaine étape sera la signature d’une paix séparée entre Israël et le Liban ? R - « Cela me paraît improbable. Personne n’a l’illusion qu’on verra une paix séparée entre le Liban et Israël. Une des raisons de la mainmise syrienne au Liban était d’empêcher le Liban de faire cavalier seul avec Israël. Il existe des liens étroits entre la politique étrangère du Liban et de la Syrie et la normalisation des relations des deux pays avec Israël va probablement être liée à des questions plus larges relatives au Golan et aux territoires palestiniens occupés. Il y a des données régionales qui entrent en jeu. Il est possible, et le Conseil l’a exigé, qu’il y ait un accord de cessez-le-feu parce que ce qui est appelé “résistance” risque de créer une conflagration qui n’est dans l’intérêt ni du Liban, ni de la Syrie, ni d’Israël, et encore moins des États-Unis et du Conseil de sécurité. Le Conseil ne veut pas voir la ligne bleue se transformer en ligne rouge. C’est toujours un danger possible quand le Hezbollah lance des attaques. »

New York : de notre correspondante aux Nations unies Sylviane ZEHIL

Le premier rapport semestriel de Kofi Annan au Conseil de sécurité sur l’application de la 1559 a suscité de nombreuses réactions. L’Orient-Le Jour a rencontré un officiel américain qui désire garder l’anonymat. Dans un entretien, ce diplomate fait le point sur l’importance du retrait syrien, les élections...