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Actualités - OPINION

Élections - À l’ombre de la formule 2000 Un scrutin régulier est certes possible, mais la représentativité laisserait encore à désirer

Deux conditions doivent être réunies pour générer de vrais représentants du peuple dans toutes ses composantes. D’abord, un découpage sensé des circonscriptions. Ensuite, un scrutin régulier, libre et transparent. La loi dite de l’an 2000 satisfait les loyalistes en général. Mais aussi un certain nombre d’opposants qui y trouvent leur intérêt électoral. Toutes les formules ont d’ailleurs, dans chaque camp, leurs partisans et leurs détracteurs. Cependant, au niveau des principes, et de la logique la plus élémentaire, c’est la petite circonscription qui assure la meilleure représentation de proximité étant donné que candidats et électeurs s’y connaissent parfaitement et sont d’un même milieu, sinon d’une même souche. Plus la circonscription s’agrandit et moins cette interaction démocratique est marquée. Le patriarche Sfeir, on le sait, a toujours bataillé pour faire valoir que le caza garantit le droit de représentation effective de toutes les couches de la population, de toutes les régions du pays. Il reste convaincu que l’adoption de la formule dite 2000, sous prétexte de manque de temps, frappe de plein fouet le principe démocratique élémentaire de la représentation. Surtout au niveau du camp chrétien. Car dans les législatures post-Taëf, toutes issues de codes tronqués basés sur la circonscription élargie, il y a toujours eu au moins une trentaine de députés chrétiens élus par une majorité de suffrages mahométans. Dépendant donc d’un chef de file musulman qui monopolise leur allégeance politique aux dépens de la défense des intérêts bien compris de la communauté à laquelle ils se réfèrent sur le papier. De plus, la loi 2000, comme ses précédentes, était de fabrication syrienne. Destinée donc à produire une Chambre docile. Notamment à des orientations connues, dont la marginalisation, voire l’éviction, du camp chrétien, de ce que l’on appelle l’Est politique. Cependant, il est évident que sur ce plan, les choses ont changé. L’influence syrienne, sans disparaître complètement, n’est plus absolument dominante. Même avec la loi 2000, la composition des listes ne devrait plus se faire en base de méthodes d’intimidation et d’oppression visant à maintenir le Liban politique sous la botte. Il y a des chances pour que l’opération électorale soit libre et propre. Ce qui améliorerait sans doute, en dépit de iniquités du découpage, le taux de démocratie parlementaire. Dont la promotion, dans les pays évolués, est facilitée par une loi électorale généralement stable. Alors qu’au Liban, depuis Taëf, l’on a eu à chaque édition une loi différente, trahissant les principes, et les préceptes, du pacte. Avant-guerre d’ailleurs, de 43 à 57, il y avait eu cinq formules distinctes. Chaque régime taillait le costume à sa mesure et à celui de ses alliés, réduisant la part des opposants à la portion congrue dans le cadre d’un système rotatif de copartage et de clientélisme. Mais la loi de 1960, dont le précédent gouvernement Karamé s’est inspiré, avait été appliquée à quatre reprises. Et la Chambre de 1972, qui a duré du fait de la guerre jusqu’en 1992, en était le fruit. Fondements Le président de la Ligue maronite, l’ancien ministre Michel Eddé, souligne que toute approche démocratique d’un code électoral donnant une juste représentation se fonde nécessairement sur le principe constitutionnel qui lie la légitimité du pouvoir à la validité de la représentation parlementaire. Ce qui signifie qu’un député doit représenter ses électeurs, et non son chef de file. Il ajoute qu’aucun pouvoir n’est légitime s’il est contraire à la coexistence et à l’esprit d’entente nationale. Pour rappeler que le peuple, source des pouvoirs, est détenteur d’une souveraineté qu’il exerce à travers les institutions constitutionnelles. Le paramètre d’une représentativité effective fondée sur la promotion de la coexistence implique évidemment le respect de la représentation politique des familles spirituelles du Liban. Les électeurs doivent pouvoir choisir effectivement, et non simplement en apparence, leurs députés pour réaliser une participation démocratique tangible à la vie de l’État libanais, d’une manière équilibrée. Les expériences électorales tentées depuis 1992 sur base du mohafazat prouvent qu’un tel modèle n’assure la représentation ni de l’électorat ni des familles spirituelles du pays. Quand la circonscription est élargie, l’électeur est pratiquement dans l’incapacité de demander des comptes à des députés qu’il ne connaît pas, produits du parachutage, des bus et des bulldozers. Les listes volumineuses rassemblant des candidats liés uniquement par des intérêts électoraux ponctuels et qui n’ont en commun, finalement, que l’allégeance au chef de file qui les a choisis. Un leader auquel ils doivent leurs strapontins, les voix obtenues ainsi que leur part du gâteau du copartage. Moyennant leur dévouement constant à son égard. Dès lors, les députés élus sur base du mohafazat ne doivent rien aux électeurs et ne servent que leur chef de file. Leur seule obsession, souligne Michel Eddé, est de lui complaire en tout. Parallèlement, souligne l’ancien ministre, il est évident que dans un cadre de circonscription élargie, le droit de représentation des communautés, souvent fondues dans d’autres majorités, se perd. Ce qui provoque des déséquilibres certains et autant d’atteintes au principe vital de la coexistence. En outre, relève le président de la Ligue maronite, il est tout aussi évident que la vie parlementaire démocratique se trouve vidée de son contenu quand quatre ou cinq chefs de bloc massif, issus des bulldozers, contrôlent et monopolisent la décision sous la coupole. Les votes se transforment en simples formalités, en représentations théâtrales sinon en mascarades. Le caractère démocratique représentatif de l’Assemblée s’en trouve altéré. Et elle n’est plus en mesure d’assumer vraiment le rôle que la Constitution lui assigne, notamment en matière de contrôle des actes du gouvernement. Ce qu’illustre le fait, note Eddé, que jamais un cabinet ne chute à la Chambre. Émile KHOURY

Deux conditions doivent être réunies pour générer de vrais représentants du peuple dans toutes ses composantes. D’abord, un découpage sensé des circonscriptions. Ensuite, un scrutin régulier, libre et transparent.
La loi dite de l’an 2000 satisfait les loyalistes en général. Mais aussi un certain nombre d’opposants qui y trouvent leur intérêt électoral. Toutes les formules...