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L a Société civile au service du camp de la place des Martyrs Les Libanais font de la résistance (PHOTOS)

14 février, une date dont tout le monde se souviendra. Pour tous, il y a l’avant et l’après… Et pour tous, ce ne sera plus jamais comme avant. Au lendemain de ce terrible choc, il y eut des réactions, une opposition qui s’est improvisée et qu’il a fallu organiser très vite. Et un camp où est venu s’exprimer, et puis vivre, un groupe de jeunes qui ne cesse de grandir jusqu’à aujourd’hui. Histoire de la logistique installée derrière cette résistance pacifiste. La place des Martyrs s’est libérée. En son cœur, des tentes bleues, timides mais courageuses, s’installent sous un ciel gris, dès les premiers jours de deuil. Deux, puis quatre, puis, au quarantième jour, une soixantaine, occupées par des jeunes de toutes confessions, de milieux sociaux, d’éducation et d’appartenance politique différents. Leur cohabitation est, à petite échelle, l’exemple d’une société nouvelle qui croit en une union nationale saine et équilibrée. Comme eux, de nombreux Libanais, surpris dans leur quotidien par l’attentat de Rafic Hariri, bouleversés et outrés, ont eu ce besoin, proche de l’instinct, de participer à la révolte collective. Asma Andraos fait partie de ceux-là. Son nom et son action, parmi d’autres volontaires aussi actifs et concernés, mais qui préfèrent garder l’anonymat, sont aujourd’hui liés au mouvement Indépendance 2005 – Société civile (Istiqlal 2005 – al-Moujtamah al-Madani). Naissance d’une action À 20 heures, ce soir comme tous les soirs depuis plus d’un mois, on s’active sous la tente de la Société civile libanaise. Ils sont une trentaine à offrir leur temps et leur énergie, dans la plus grande discrétion, pour aider. Distribuer la nourriture – plus de 10 000 sandwichs chaque semaine –, la boisson, s’assurer que rien ne manque à personne et que continue de régner une ambiance paisible. Car la cohabitation est longue et les sensibilités à fleur de peau. Ils ont mis en veilleuse leur vie privée, oublié les sorties, la vie nocturne « d’avant », pour se consacrer au camp. Tout a commencé, pour Asma et ses acolytes, au surlendemain des funérailles de Rafic Hariri, lorsqu’une banderole improvisée a vite fait de se transformer en un document de 500 mètres. Un véritable cri où se sont imprimés les signatures et les textes de milliers de personnes demandant la démission du gouvernement. « Au 5e jour, nous nous sommes dits que nous pouvions faire autre chose. » Petite réunion entre amis, également concernés, « un exercice modeste où nous avions mis des idées sur papier, que nous avions distribué à quelques figures de l’opposition ». La première action, à partir d’initiatives de plusieurs groupes ou individus, fut de créer un logo « Indépendance 2005 », des couleurs pour l’opposition, des écharpes et des drapeaux libanais. Le camp prenant une forme plus importante, « nous avons pensé entreprendre une action plus concrète sur le terrain ». Une action parallèle à celle d’autres personnes, dont Nora Joumblatt, très active et très discrète, qui a « beaucoup travaillé dans ce sens ». Une véritable organisation est mise sur pied, car, outre les drapeaux distribués en permanence, plus de 30000, les banderoles, les casquettes et autres pin’s et autocollants, « il fallait nourrir ces jeunes qui dorment depuis 40 jours sous les tentes, leur donner à boire et de quoi se réchauffer ». Un nom est trouvé. « Nous avons voulu commencer à intégrer la notion de société civile qui a toujours été absente du pouvoir. Des gens capables d’une action politique au sens large du terme, sans être partisans ou politisés. » Une logistique de guérilla Au sein du mouvement, des comités ont été créés, composés de financiers, avocats, chefs d’entreprise et consultants, « des gens qui donnent de leur temps pour une logistique de guérilla ». Un comité financier chargé de gérer les donations, « nous avons ouvert un compte où l’argent est versé. Bientôt, nous espérons pouvoir envoyer des rapports à tous nos donateurs », un comité « relations médias », un autre « images et production », un comité responsable des relations avec les étudiants sur le camp et des relations avec les figures de l’opposition, et enfin un comité qui s’occupe de la logistique sur le terrain. Des barrières à prévoir aux toilettes publiques, à la maintenance des lieux et jusqu’aux marches qui ont lieu régulièrement, Indépendance 2005 – Société civile, qui a organisé la marche des femmes, en collaboration avec Nora Joumblatt et d’autres responsables et organisations, se doit de penser à tout. De même que de l’ordre. « Il ne faut pas oublier que lors de toutes les manifestations qui ont eu lieu, dont la dernière, qui comptait plus d’un million de personnes, il n’y a pas eu un incident, ni un blessé. Le fait que nous soyons apolitiques nous aide beaucoup ». Jusqu’à quand est une question qui s’impose. « Tant que les jeunes qui occupent le camp sont là et qu’ils ont besoin de nous. C’est-à-dire tant que les conditions exigées ne sont pas remplies : retrait total des troupes syriennes et des services de renseignement, enquête internationale, élections dans un cadre transparent. Ces jeunes nous ont donné une leçon de vie », conclut Asma Andraos en son nom et au nom de tous les volontaires qui font avec elle cette formidable résistance pacifique. Quelques membres actifs de la Société civile libanaise Ahmad Younès, Amine Boulos, Caline Chidiac, Chadi Ayache, Dania Tyan, Danielle Rizkallah, Edmond Rabbath, Fadi Arbid, Farid Fakhreddine, Georges Makhlouf, Hala Hanna, Inas Fakhreddine, Jad Khoury, Karl Bassil, Khodr Mekkaoui, Malek Ghorayeb, Manale Boulos, Maria Saradar, Michael Nakfoor, Myrna Gemayel, Nadim Zablit, Nathalie Awaida, Nicole Fayad, Pascale Makhlouf, Riad Kamel, Souheil Hanna, Youssef Naaman. Sans oublier tous les autres membres anonymes ou pas de la Société civile libanaise, qui participent par le biais de donations en nature ou financières, les sociétés, restaurants et commerces qui aident, soit en offrant des produits, soit en les vendant au prix coûtant. Carla HENOUD

14 février, une date dont tout le monde se souviendra. Pour tous, il y a l’avant et l’après… Et pour tous, ce ne sera plus jamais comme avant. Au lendemain de ce terrible choc, il y eut des réactions, une opposition qui s’est improvisée et qu’il a fallu organiser très vite. Et un camp où est venu s’exprimer, et puis vivre, un groupe de jeunes qui ne cesse de grandir...