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Société - Bogota est le deuxième exportateur de fleurs au monde Les déplacés colombiens chassés par les combats entre guérilla et paramilitaires se reconvertissent dans la floriculture

La Colombie a l’habitude de défrayer la chronique pour des attentats sanglants, mais c’est aussi le deuxième exportateur de fleurs au monde et la floriculture a permis à de nombreux déplacés de refaire leur vie, loin des combats entre guérilleros, armée et paramilitaires. Jacinto et Etelvina font partie des 94 000 Colombiens vivant de cette industrie qui a connu un rapide essor ces 35 dernières années. Leur histoire reflète la situation paradoxale du pays : si la violence les a privés de leur foyer et obligé à quitter leur terre natale, ils veillent désormais sur les milliers de roses et œillets expédiés à l’étranger. Conseiller municipal d’un village proche de Bogota, Jacinto (nom d’emprunt) a dû le fuir il y a trois ans à la suite de menaces de mort des paramilitaires, ces milices d’extrême droite formées à l’origine par l’État pour combattre les guérillas marxistes (Farc et ELN) et devenues souvent incontrôlables. « Je suis arrivé avec mon père, ma mère et mes deux sœurs cadettes en décembre 2001. Nous n’avons pratiquement rien récupéré de la vente de la propriété de 32 hectares plantés de canne à sucre que mon père avait rachetée à mon grand-père », explique-t-il à l’AFP. Jacinto et sa famille se sentaient pris en tenaille entre une guérilla persuadée qu’ils étaient partisans des paramilitaires à cause de la zone où ils vivaient et des « paras » convaincus qu’ils protégeaient la guérilla. « À un moment, je me suis retrouvé avec un gros problème car les “paras” voulaient tuer un des mes collègues et m’utiliser pour l’attirer (dans un piège). Les menaces ont commencé, et une nuit je suis parti du village avec juste un peu de linge de rechange. Deux jours plus tard, toute la famille prenait la fuite », raconte-t-il. Vendeur ambulant puis ouvriers de chantier, Jacinto est entré début 2004 à l’école de floriculture de l’Asocolflores, l’association colombienne des exportateurs de fleurs (privée), qui a établi un programme de formation des populations vulnérables afin de leur offrir de nouveaux débouchés. Le projet est financé grâce à l’Agence américaine de développement international (USAid), l’Asocolflores et des institutions publiques, qui ont apporté 1,9 million de dollars (1,4 million d’euros). Environ 700 déplacés forment partie du programme qui vise à créer 11 000 emplois d’ici à 2006 devant bénéficier surtout à des mères de famille célibataires, à des jeunes de 18 à 25 ans, aux populations déplacées et aux soldats mutilés de guerre. Jacinto a accédé à l’échelon de contrôleur sanitaire : il vérifie que chaque bulbe ou fleur sortant des jardins de l’ouest de Bogota respecte les très strictes normes internationales. Son village lui manque mais il ne veut pas y retourner : il a fondé un foyer avec une jeune femme rencontrée dans une réunion de déplacés. Contrainte de quitter le sud de la Colombie à cause de menaces des Farc (Forces armées révolutionnaires de Colombie) qui avaient séquestré son frère, elle aussi a intégré le programme spécial de l’Asocolflores, comme les deux sœurs de Jacinto. De son côté, Etelvina, 42 ans, qui suit également le programme de reconversion, a fui son village du Sud-Ouest, il y a trois ans, de peur que les Farc, première guérilla du pays, ne recrutent sa fille de 14 ans. « Tous les jours, ils distribuaient des tracts exigeant que nous leur livrions nos enfants. J’avais très peur, nous possédons avec mon époux une petite propriété. Mes autres enfants étant mariés et en sécurité, je suis partie avec ma fille », explique-t-elle. Son mari est resté, mais Etelvina lui rend visite les week-ends ou jours fériés : « Je rentre très vite ici parce que j’ai peur, je ne peux pas rester là-bas », souligne-t-elle.

La Colombie a l’habitude de défrayer la chronique pour des attentats sanglants, mais c’est aussi le deuxième exportateur de fleurs au monde et la floriculture a permis à de nombreux déplacés de refaire leur vie, loin des combats entre guérilleros, armée et paramilitaires.
Jacinto et Etelvina font partie des 94 000 Colombiens vivant de cette industrie qui a connu un rapide essor ces...