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Actualités - OPINION

Le silence des agneaux

Il n’y a pas que les coïncidences du calendrier. Même si des mois séparaient les deux commémorations, les deux sinistres anniversaires – les 30 jours et la 28e année –, les correspondances entre l’assassinat de Kamal Joumblatt en mars 1977 et celui de Rafic Hariri en février 2005 se seraient naturellement imposées ; amplifiées de surcroît par la dizaine d’autres crimes politiques qui ont rythmé ces trois décennies. Certes, et comme couronnant le psychotique et immuable cérémonial d’un sérial killer mono-obsessionnel, chacune de ses barbaries était destinée, depuis 1977, à liquider les expressions les plus abouties, les plus fédératrices, les plus porteuses d’espoir d’une arabité unique, de Casablanca à Kaboul ; une arabité éclairée ; une arabité boulimique de démocratie, de libertés, de droit, d’indépendance et de souveraineté. Certes. Sauf que c’est dans un concept mortifère, cancérigène ; un concept aux antipodes de ces valeurs défendues bec et ongles par tous ces martyrs, de différentes manières bien évidemment, que se retrouve le point le plus important, le plus fondamental de ces correspondances, de cette parfaite symétrie entre ces 2x8 chiffres : 16-03-1977 et 14-02-2005. Ce concept-là, chéri visiblement par-dessus tout dans un Liban pas encore désatellisé, détutellisé, pas encore désécuritarisé, a pour nom l’impunité. C’est parce qu’il est resté impuni, inélucidé, que l’assassinat de Kamal Joumblatt a légitimé de la plus archaïque et de la plus immonde des façons tous ceux qui l’ont suivi. C’est en donnant à la vérité sur l’assassinat de Rafic Hariri tous les moyens de s’imposer d’abord et surtout aux yeux des Libanais ; c’est-à-dire en punissant toute personne qui aurait planifié, exécuté ou manqué à ses devoirs ; c’est-à-dire en demandant à la communauté internationale, arabo-occidentale d’enquêter sur l’attentat du 14 février, et en suspendant – au moins –, jusqu’aux résultats, les patrons des services sécuritaro-judiciaires, que ces Libanais pourront non seulement oublier ces crimes en série, mais retrouver une espèce de paix intérieure, peut-être pardonner. Parce que le cercle vicieux aura été brisé ; parce que justice aura été rendue ; parce que la première et la dernière (il est vital que ce soit la dernière) des bestialités, le premier et le dernier des sacrifiés, auront chacun accompagné le début et la fin d’une époque. Ziyad MAKHOUL

Il n’y a pas que les coïncidences du calendrier.
Même si des mois séparaient les deux commémorations, les deux sinistres anniversaires – les 30 jours et la 28e année –, les correspondances entre l’assassinat de Kamal Joumblatt en mars 1977 et celui de Rafic Hariri en février 2005 se seraient naturellement imposées ; amplifiées de surcroît par la dizaine d’autres crimes...