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Les manifestants sont venus en voiture, en bus, à pied ou… par la mer Plus d’un million de Libanais ont marché hier sur la place de la Liberté(photos)

Les Libanais des quatre coins du pays ont marché hier sur Beyrouth. Plus d’un million de manifestants sont venus en voiture, en bus, à vélo, à pied ou même par voie de mer pour participer au plus grand rassemblement que le pays ait jamais connu. Ce chiffre n’englobe pas les centaines de milliers de citoyens bloqués sur les routes menant à la place de la Liberté. « Ce rassemblement est au moins deux fois et demie plus important » que celui organisé mardi dernier par le Hezbollah, selon le conseil municipal de Beyrouth. Couverte par les drapeaux libanais, la marée humaine a investi l’ensemble des 200 000 m2 de la place des martyrs, et débordait sur les places adjacentes et les grandes artères de la capitale. Les manifestants ont envahi la grue placée sur le chantier de la mosquée al-Amine, et occupé l’édifice et les toits des bâtiments entourant la place. Dans le périmètre de la sépulture de l’ancien Premier ministre Rafic Hariri et de ses sept compagnons, quelque cinq cents chaises ont été installées pour accueillir les dignitaires religieux, les personnalités et les députés, qui ont d’ailleurs participé massivement à ce rassemblement. Dès les premières heures de la journée donc, les foules, débordant d’enthousiasme, ont commencé à affluer par convois à la place des martyrs. De Baalbeck à Bourj-Hammoud, du Akkar à Saïda, de Zahlé, Batroun, Hazmieh, Ersal, Tripoli, Baabda, Zghorta, Jbeil, Minieh, Aley, Deir el-Qamar… toutes les composantes de la société libanaise s’étaient retrouvées place des Martyrs pour réclamer le « retrait syrien total », la « liberté », la « souveraineté », l’« indépendance » et la vérité sur les circonstances de l’assassinat de Rafic Hariri. Trente ans de division effacées « Nous participons régulièrement aux manifestations, confie un jeune de Baalbeck. Nous avons affrété des bus à cet effet. Nous continuerons à participer à ces rassemblements jusqu’à ce que le dernier soldat syrien quitte le territoire libanais. » Et de préciser que certains habitants du village sont même venus à cheval. Simone, une sexagénaire, confie que pour elle, qui a vécu l’avant-guerre, cette mobilisation « efface trente années de division ». « C’est magnifique, s’exclame-t-elle. La foule rassemblée aujourd’hui prouve que le peuple a toujours été uni. Ce sont en fait les chefs qui ont essayé de nous diviser. Nous avons vécu en subissant un lavage de cerveau de la part des dirigeants chrétiens et musulmans. Aujourd’hui, nous réalisons que nous ne sommes pas différents dans nos croyances politiques. Je porte les couleurs de l’opposition car je suis convaincue que le mouvement créé par Hariri est vital pour l’union nationale et l’essor économique. Grâce à lui, le Liban a été introduit dans les sphères internationales. Et les Libanais ne sont plus prêts à écouter des discours sectaires et fanatiques. » Et Simone de souligner que les manifestations doivent cesser « parce que nous devons continuer à travailler ». « D’ailleurs, la manifestation d’aujourd’hui prouve que nous avons atteint notre but », insiste-t-elle. Un avis que ne partagent pas un grand nombre de manifestants qui assurent que la mobilisation doit se poursuivre si « nos revendications ne sont pas atteintes ». « Nous sommes dans un pays démocratique et nous allons continuer à manifester. N’est-ce pas cela la démocratie ? » lance un jeune protestataire. Et une mère de trois enfants de renchérir : « Le Hezbollah a organisé une manifestation pour nous intimider. Nous avons relevé le défi et gagné le pari. Nous l’invitons à joindre les rangs de l’opposition avant qu’il ne soit trop tard. » Pertinence, patriotisme et humour Depuis vingt-huit jours que dure cette mobilisation, les slogans antisyriens, souverainistes et patriotiques étaient, comme d’habitude, au rendez-vous. Les Libanais se sont surpassés en matière de créativité, lançant ainsi des messages pertinents et percutants, souvent non sans humour : « Révolution antinatation », lit-on sur une banderole. Ou encore : « Non aux apparatchiks, Non au régime des mollahs », « Budapest 56, Prague 68, Beyrouth 2005 », « De Prague à Gdansk, à Tian’anmen, à Berlin, à Bucarest, à Kiev, à Beyrouth, une seule bataille : liberté », « Prévisions 2005 : le lion (Assad) est l’horoscope le plus malchanceux », « Deux millions sans les frères », « Si vous voulez la vérité, appelez le 1559 », « Vive la Syrie en Syrie ». Certaines pancartes invitaient même le chef de l’État à démissionner. Dans un coin de la place, trois petits cousins, âgés de 9, 10 et 11 ans, chantaient, sous l’œil amusé et fier de leurs parents tous venus de Ferzol dans la Békaa. Ils criaient qu’ils veulent uniquement « le drapeau libanais », « le peuple libanais » et « les légumes libanais ». Plus loin, des enfants de 3 et 4 ans, installés sur les épaules de leurs parents, scandaient des slogans antisyriens que répétait en chœur la foule qui les suivait. Unis pour défendre le Liban Comme tous les lundis depuis le funeste attentat du 14 février, une minute de silence a été observée en mémoire des victimes. Puis l’hymne national a été entonné à l’unisson, au son de l’orchestre de Michel Éleftériadès, suivi de chansons patriotiques au rythme desquelles la foule dansait la dabké. De temps à autre, des discours de Rafic Hariri étaient diffusés par haut-parleurs et, de sa voix enregistrée, on pouvait entendre : « Dans ce pays, la vérité finira toujours par apparaître » ou « Le Liban ne peut pas vivre sans démocratie ». Des ballons blancs et rouges ont été lâchés ainsi qu’un cerf-volant en forme de colombe portant le drapeau libanais. Un grand cœur bleu a été accroché sur l’une des façades de la mosquée sur lequel on lisait en langue arabe : « Ta mort a renforcé ta présence ». D’autres cœurs, portant la phrase « Nous serons unis de nouveau », ont été distribués, notamment aux enfants. Prenant la parole aux côtés de plusieurs représentants de l’opposition, le PDG du quotidien an-Nahar, Gébrane Tuéni, a fait prêter aux manifestants le serment suivant : « Nous jurons par Dieu tout-puissant, musulmans et chrétiens, de rester éternellement unis pour défendre le Liban. » Hier, plus d’un quart de la population libanaise est descendue dans la rue pour réitérer son attachement à un Liban libre et indépendant, pour « assumer son histoire et son destin », comme l’a souligné l’ex-Premier ministre socialiste français Pierre Mauroy. La révolution du Cèdre a indéniablement marqué de son empreinte le nouveau printemps du Liban. Nada MERHI

Les Libanais des quatre coins du pays ont marché hier sur Beyrouth. Plus d’un million de manifestants sont venus en voiture, en bus, à vélo, à pied ou même par voie de mer pour participer au plus grand rassemblement que le pays ait jamais connu. Ce chiffre n’englobe pas les centaines de milliers de citoyens bloqués sur les routes menant à la place de la Liberté. « Ce rassemblement...