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Actualités - CHRONOLOGIE

Le poète belge William Cliff voit son ouvrage retiré de la vente en France Quand le souffle des vers irrite la verrerie

La plus ancienne verrerie-cristallerie de France ne plaisante pas avec son image et a porté plainte pour diffamation contre l’ode d’un poète belge, composée lors d’une résidence d’écriture dans l’entreprise de Passavant-la-Rochère (Haute-Saône). « Quand un de vos employés se voit qualifier de “ gnome improbable ” et décrit comme un garde-chiourme dans une entreprise à la Zola, vous ne pouvez pas rester sans réagir », assène Me Roger Masson, avocat de la verrerie-cristallerie, présentée, avec plus de 500 ans d’âge, comme la plus ancienne en activité en France. L’entreprise, qui a déjà obtenu de la maison Virgile, modeste éditeur de Besançon, le retrait des livres de la vente, exige encore « la récupération de tous les ouvrages vendus à des structures publiques, musées ou bibliothèques » et a porté plainte au civil devant le tribunal de grande instance de Dijon. Avec dix autres écomusées ou entreprises traditionnelles de Franche-Comté, la verrerie de Passavant-la-Rochère appartient au réseau des Musées et techniques des cultures comtoises qui, avec le Centre régional du livre de Franche-Comté, invite depuis plusieurs années des auteurs à composer un texte sur la mémoire industrielle d’un lieu. Comme Pierre Bergounioux, Philippe Claudel ou Pascal Commère l’ont fait dans le Jura, le poète belge William Cliff, auteur d’une vingtaine de recueils de poésie et pièces de théâtre publiés chez Gallimard, est allé chercher l’inspiration en 2001 dans les ateliers des souffleurs de verre haut-saônois. Le résultat, long poème en vers de 63 pages, est paru début 2004, a été tiré à 1500 exemplaires, vendu à quelques centaines. « Les extraits pointés par la verrerie ne reflètent pas le texte de William Cliff qui s’enthousiasme pour les traditions, le savoir-faire, les compétences des ouvriers. Sortir quelques phrases de leur contexte déforme complètement le sens du livre. Et, de toute façon, c’est une création littéraire, pas une plaquette publicitaire pour l’entreprise ! » s’indigne Daniel Legrand, responsable des éditions Virgile. De fait, sur près de 630 vers, la verrerie se montre plus sensible aux deux lignes qui décrivent « la voix cassée » de son directeur et une cheminée « lâchant des gaz qui ne semblent pas bons » qu’au reste du poème où la célébration de « l’art de souffler pour faire la merveille » le dispute à celle de « cet artiste (qui) tourne la tige en acier sur sa bouche ». Quant au « gnome improbable » qui s’invite page 54, son apparition semble moins inspirée par la réalité que par l’imaginaire de l’auteur, prompt à transfigurer l’atelier incandescent de la verrerie en annexe des forges de Vulcain. Peu sensible à cette vision des choses, le directeur de la verrerie, Antoine Giraud, insiste sur le caractère « inacceptable » des rimes de William Cliff, mais veut croire à un accord à l’amiable avec les éditions Virgile pour éviter une audience devant le tribunal de Dijon dans quelques semaines. Pas si simple, estime Daniel Legrand, qui juge l’affaire « ubuesque ». Sa maison d’édition, à la santé financière fragile, a fait le maximum en retirant les ouvrages de la vente, affirme-t-il, et récupérer les livres vendus est « techniquement impossible ».
La plus ancienne verrerie-cristallerie de France ne plaisante pas avec son image et a porté plainte pour diffamation contre l’ode d’un poète belge, composée lors d’une résidence d’écriture dans l’entreprise de Passavant-la-Rochère (Haute-Saône).
« Quand un de vos employés se voit qualifier de “ gnome improbable ” et décrit comme un garde-chiourme dans une entreprise à la...