L’impulsion

Le répéter encore et encore pour véritablement y croire. Certes, il manque encore la majorité de la communauté chiite – la jonction entre tous a juste besoin d’un peu de temps –, mais rien qu’à ce stade, les retrouvailles du peuple libanais, auparavant pluri-ghettoisé, désormais carrément arc-en-ciel, ressemblent à cette espèce de divines surprises dont seule l’histoire, souvent gueuse pourtant, est capable d’imposer. La libération de Nelson Mandela le 11 février 1990 et l’assassinat de Rafic Hariri le 14 février 2005 ont ceci en commun qu’ils ont immédiatement lancé un long mais irréversible processus de fusion populaire tendue comme un arc vers un seul objectif : ici, c’est la récupération du Liban, de son identité, de ses spécificités, de sa souveraineté, de son indépendance, et de sa libre décision, débarrassé à tout jamais de la tutelle syrienne, immunisé contre la moindre autre. Ce qui se vit et se voit, ce qui se dit et se fait, ce qui s’entend et s’écrit, ce qui se réveille depuis 23 jours malgré les barrages en régions et aux entrées de Beyrouth n’est le fait que de la souveraine volonté de centaines de milliers d’individus décidés à faire triompher la collectivité nationale. Ce qui était beau hier, c’est que la décision de chacun des manifestants, libre, évidemment libre, désembrigadée, avait ceci d’ahurissant qu’elle était littéralement, définitivement, extraordinairement spontanée. Indisciplinée mais spontanée, énorme quelle que soit la largeur du zoom. Z.M.