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L’espoir en une nouvelle démocratie qui les mettrait à pied d’égalité avec les hommes Quatre générations de femmes mobilisées depuis trois semaines pour la liberté, la souveraineté et l’indépendance (Photo)

La journée mondiale de la femme, célébrée aujourd’hui, fournit l’occasion de lever le voile sur la mobilisation des femmes libanaises, sur le rôle qu’elles jouent depuis trois semaines, avec et aux côtés de l’homme, dans un même élan de patriotisme, dans une même détermination à participer à la libération et l’unité de leur pays, exigeant de connaître toute la vérité sur l’attentat qui a coûté la vie à Rafic Hariri, luttant pour voir la démocratie triompher. Comme tous les jours depuis l’assassinat de Rafic Hariri, elles étaient fidèles hier au rendez-vous, les femmes du Liban. Venant d’Achrafieh, de Saïda, de Hadeth, de Aley ou de Aarsal, dans la Békaa. Fièrement, en première ligne, sans peur, avec détermination, les femmes de tous âges, de toutes tendances, de toutes les régions du pays se sont exprimées, drapeaux libanais à la main, slogans aux lèvres, mues par le même amour pour leur patrie : une patrie libre, indépendante et souveraine. Envolées la paresse, l’insouciance et la légèreté. Oubliées la peur, la timidité et la dépendance. Elles sont là, sans relâche, depuis trois semaines, étudiantes, épouses, mères et grand-mères, répondant présent aux appels de l’opposition plurielle. Souvent en première ligne, et parfois même avant leurs époux, frères ou fils. Négligeant coiffeurs, shopping, parties de cartes et sobhiyés (visites), délaissant même, pour certaines, leurs occupations ménagères, maternelles, estudiantines et professionnelles, l’espace de quelques semaines, de quelques jours, de quelques nuits, ou pour le moins de quelques heures. Soutenant dans leur lutte des femmes qu’elles admirent, à savoir, Nayla Moawad, Bahia Hariri, Nora Joumblatt, Joyce Gemayel, Solange Gemayel et Ghounwa Jalloul. Des femmes qu’elles n’hésitent plus à aborder, à toucher, à encourager par des propos aimables, lorsqu’elles les croisent, au milieu de la foule, tout en reprenant avec elles les slogans patriotiques, devenus le symbole de l’opposition. Braver les interdits « Quand les femmes descendent dans la rue de leur plein gré, c’est un signe que les choses changent », observe une mère de famille, convaincue que la démocratie régnera très bientôt au Liban. « Je suis là tous les jours. Je me suis mobilisée bien avant mon mari et mes enfants », raconte une autre, arborant bien haut le drapeau libanais. « Je suis présente aujourd’hui pour que mon fils ait la possibilité, un jour, de vivre dans un pays souverain, libre de toute ingérence étrangère et digne d’une véritable démocratie », indique encore une troisième femme. Devant leur volonté de manifester, de crier leur colère et leurs convictions, ces femmes issues de milieux beyrouthins éduqués n’ont rencontré aucun frein, aucune restriction. Elles font, régulièrement, acte de présence à la place des Martyrs, tout en continuant à assumer leurs obligations familiales, sociales et professionnelles. Il en était de même pour d’autres, venues de Saïda, de Aley, de Hadeth, seules ou accompagnées de leurs familles. « Je suis là, régulièrement, avec mes quatre enfants », note une femme d’une cinquantaine d’années. « Je viens tous les jours manifester pour que l’armée syrienne sorte définitivement du Liban, précise une femme avouant 87 printemps. À mon âge, c’est le moins que je puisse faire », ajoute-t-elle fièrement. Par contre, participer à la manifestation a été un véritable défi pour de nombreuses Libanaises contraintes de braver les interdits, à l’instar de ce groupe entier d’écolières, venues hier par bus, et pour la première fois, du village frontalier de Aarsal, situé non loin de Baalbeck, à quelques kilomètres de la Syrie, accompagnées d’un de leurs enseignants et de leurs camarades et frères. « Nous avons loué un bus que nous avons payé de notre argent de poche, malgré le refus de la direction de l’école de nous laisser venir, et malgré les réticences de nos parents à l’égard de notre volonté de manifester, raconte fièrement Fatmeh, une élève de terminale âgée de 17 ans. Comme le peuple libanais entier, nous manifestons aujourd’hui notre désir de démocratie. » Un long chemin à parcourir En fait, confirme sa camarade, Dalal, « dans notre village, encore trop traditionnel, les femmes n’ont pas leur mot à dire, elles n’ont pas de droits, leur liberté est limitée. Mais nous sommes présentes aujourd’hui, après avoir réussi à briser les tabous propres à notre village, après avoir montré que la femme et l’homme sont égaux et qu’ils peuvent, au même titre, lutter pour libérer le pays ». Aujourd’hui, Journée mondiale de la femme, alors que près de la moitié des manifestants est constituée de femmes, et que quatre générations de femmes scandent depuis trois semaines et d’une seule voix, en même temps que les hommes, des slogans demandant le retrait syrien et l’instauration de la démocratie dans le pays, il est difficile d’oublier que la femme libanaise ne jouit pas de ses droits et qu’elle n’est toujours pas considérée comme l’égale de l’homme. « Le fait que je puisse manifester librement, indique une mère de famille, ne change rien au fait que nous vivons dans une société traditionnelle, orientale, où les mentalités privent la femme de ses droits les plus élémentaires. Rien que le fait de n’avoir aucun droit sur un enfant que l’on a soi-même mis au monde en dit long sur le chemin qu’il reste à faire », poursuit-elle amèrement. Certes, le chemin vers la démocratie est long. « La femme libanaise doit se mobiliser davantage et comprendre que cette lutte est la sienne, observe Nayla Moawad. Car ce n’est que dans l’instauration d’une véritable démocratie qu’elle aura un véritable rôle à jouer et qu’elle obtiendra ses droits. » Ces trois dernières semaines, la femme libanaise a fait preuve de courage et de détermination, dans sa volonté de libérer son pays et dans son appel à la démocratie. Dans l’espoir qu’elle sache, en temps voulu, se mobiliser pour obtenir ses droits et pour devenir, effectivement, l’égale de l’homme. Anne-Marie EL-HAGE
La journée mondiale de la femme, célébrée aujourd’hui, fournit l’occasion de lever le voile sur la mobilisation des femmes libanaises, sur le rôle qu’elles jouent depuis trois semaines, avec et aux côtés de l’homme, dans un même élan de patriotisme, dans une même détermination à participer à la libération et l’unité de leur pays, exigeant de connaître toute la vérité...