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Hamadé : « Nous vous traînerons devant les tribunaux »

Voici de larges extraits de l’intervention du député Marwan Hamadé, qui a sonné comme un coup de tonnerre dans l’hémicycle et a, sans nul doute, contribué psychologiquement à ébranler la confiance du Premier ministre et de son gouvernement : « Je regarde les rangs du gouvernement et je ne vois personne (...). Ni un Premier ministre ni des ministres. Je vois un vide, ce vide contre lequel ils nous mettent en garde s’ils démissionnent, alors qu’ils sont eux-mêmes le vide. Ils sont le néant, ils sont la mort présente et permanente. Ce sont eux les véritables morts, et pas le martyr qui repose au nom de la patrie près de la mosquée Mohammed al-Amine. « Je vois des membres fictifs d’un gouvernement fictif. Je vois les agents de la faillite frauduleuse et criminelle à laquelle ce régime et ce pouvoir nous ont conduits. Ils sont un pouvoir issu des firmans de Anjar. « Je ne vois que les masques gouvernementaux du pouvoir policier, un pouvoir qui agresse la légitimité de chacun d’entre nous, et notamment vous, les élus du peuple (...). Un peuple qui, en dépit des mesures adoptées, se rassemble par centaines de milliers sous la protection de l’armée qui s’est associée à lui. « Nous assistons aujourd’hui à une tentative de récupération de l’assassinat (de Hariri) dans le cercueil de l’accord de Taëf, un accord qui a été lui-même « assassiné » plusieurs années avant le martyre de Rafic Hariri. Les relations privilégiées avec la Syrie ont été agressées des années aussi avant que nous-mêmes, alliés de la Syrie et tombeurs de l’accord du 17 mai (1983), ne nous transformions en demandeurs d’une rectification de ces relations. « L’indépendance a été « assassinée » à plusieurs reprises avant que le peuple libanais ne se réveille et avec lui l’opinion publique arabe et la communauté internationale, qui se sont rappelés que le Liban est un État indépendant aux frontières définitives, à l’appartenance arabe, et un membre fondateur des Nations unies et de la Ligue des États arabes. « Quant à la démocratie et au système parlementaire, ne demandez à personne, M. le Président (de la Chambre), ce qu’il en est advenu. C’est à moi qu’il faut le demander, moi qui prenais place à la table du Conseil des ministres face à un Premier ministre silencieux, réprimé, opprimé, victime d’une conspiration contre sa dignité, et cela dans le cadre d’une agression contre la séparation des pouvoirs, les articles de la Constitution et les règles du pouvoir. Je regardais le président Lahoud qui, naturellement, présidait toutes les séances et je m’interrogeais sur ce qui est advenu de nous dans cette République. « Les présidents sont imposés. Leurs mandats sont prorogés de force à travers des menaces directes de destruction ou de meurtre. Les gouvernements sont imposés, ils sont dans leur majorité morts-nés et leurs dépouilles restent à terre après le décès. Voilà la réalité d’aujourd’hui. Les législatures sont humiliées, comme ce fut le cas pour nous le jour de la séance consacrée au code de procédure pénale. « La justice a été liquidée, l’administration est décédée. Quant au secteur économique et social, il est devenu l’otage de la mafia commune qui tient le pays en coupe réglée. « Rafic Hariri est tombé bien avant le 14 février. Il est mort en martyr lorsque ses prérogatives ont été assiégées et sa position de Premier ministre détruite. Il est mort lorsqu’on a fait échec à tous les projets qu’il avait lancés pour sauver l’économie libanaise, et notamment Paris II. « Il est mort lorsque certains pions qui se trouvent sur ces deux rangées devant nous (les bancs du gouvernement) l’ont accusé d’être la « tête du serpent », la « vipère », le « dollar », « l’agent stipendié ». « Mais le peuple sait. Il l’a exprimé haut et fort. Il sait qui est le complice de qui dans toutes les entourloupes touchant les banques, les casinos, la contrebande, le pétrole, l’électricité, etc. des deux côtés de la frontière (libano-syrienne). « Rafic Hariri est mort avant le 14 février, quand par souci de ne pas contrecarrer la tutelle fraternelle, il a accepté de supporter pendant des années le comportement ignare de la présidence et sa haine contre lui. Il est mort quand il a été conduit de force pour être notifié de la décision de proroger (le mandat présidentiel), et ce n’est plus un secret pour personne que cette notification a été accompagnée de menaces claires. « Nous sommes tous morts au sein du gouvernement au moment des agressions du 7 août (2001), de la fermeture de la MTV et des tentatives visant à faire échec à la réconciliation de la Montagne entre le patriarche et Walid Joumblatt. « Tu veux nous faire liquider ? » « Je ne suis pas un martyr vivant, comme on dit. Parce que nous sommes tous, vous êtes tous candidats au martyre, et moi-même pour la deuxième fois. Je suis en revanche le témoin vivant qui a décidé de ne pas se taire face à ce qui s’est passé et ce qui se passe, quoi qu’il m’en coûte. J’ai donc décidé de dévoiler pourquoi nous, qui sommes attachés à Taëf, sommes candidats au martyre. En 2000, après notre succès aux législatives à Beyrouth et dans la Montagne contre l’axe Baabda-Anjar, j’avais été chargé de mettre au point le préambule politique de la déclaration ministérielle. J’ai fait le travail et soumis le texte à Rafic Hariri. Il a tout agréé, sauf une seule page, qu’il a jetée au panier. Je l’ai regardé surpris et lui ai dit : « Quelle erreur ai-je pu commettre, M. le Premier ministre » ? Il y avait sur cette page une demi-ligne affirmant nos constantes nationales sur lesquelles nous étions convenus tous ensemble, et mentionnant le Document d’entente nationale, autrement dit Taëf. J’ai donc nommément cité Taëf, notre horizon à tous depuis 1989. Hariri m’a alors dit : “Marwan, tu parles de Taëf, tu veux donc nous faire liquider ?” « Oui, Taëf, sur lequel nous avions édifié ensemble la paix civile s’était alors transformé en tabou. Aujourd’hui, le terme est revenu à la mode, mais comme couverture pour d’autres considérations. Mais pourquoi (était-il devenu un interdit) ? Serait-ce parce qu’il mentionne la décentralisation administrative ou l’indépendance de la justice ? C’est une plaisanterie. C’est parce qu’il évoque des retraits syriens qui n’ont pas eu lieu et qui, comme les intentions le montrent, ne devaient pas avoir lieu. Et aussi parce qu’il prévoit la séparation entre les services militaires et la pratique politique. « C’est depuis cette époque que Rafic Hariri est menacé, parce que toute orientation ou tendance ou identification à quelque chose qui ressemble à l’indépendance du Liban devait abattre sur lui et sur nous des calamités. « Aujourd’hui, après la chute du Mur de Berlin, après la fin de Ceaucescu, le monde se transforme alors que nous, nous revenons en arrière, vers l’obscurantisme, la dictature et l’autocratie. « J’accuse non seulement le gouvernement, mais aussi le pouvoir et le régime, de nous avoir menés vers cette situation branlante. Je les accuse tous d’avoir facilité le meurtre de Rafic Hariri. Et je le dis au nom du peuple libanais : nous allons vous traîner devant les tribunaux. « J’accuse ce gouvernement, au mieux, d’incitation à ce crime et de négligence, et au pire, d’en avoir couvert la planification. Nous réclamons d’abord de mettre fin aux fonctions des directeurs généraux de la Sûreté générale, des FSI, des SR et de la Sécurité de l’État, ainsi que le commandant de la garde républicaine. « Rafic Hariri est vivant dans la conscience de cette patrie et le cœur des Libanais. Ils t’ont tué et ont brûlé ton corps, déclenchant ainsi l’intifada de l’indépendance et de la souveraineté. Je vous le dis de cette tribune : “Nous ne nous arrêterons pas avant d’avoir atteint les objectifs de cette intifada : faire éclater la vérité, appliquer l’accord de Taëf de façon totale, dans toutes ses clauses, y compris un redéploiement sérieux puis un retrait total des troupes syriennes et surtout des SR syriens, et tenir des élections libres, honnêtes et transparentes sous le contrôle d’ONG libanaises, arabes et internationales”. Le prélude à tout cela est bien entendu l’enquête et la découverte des criminels. « Jusque-là, c’est vous (le gouvernement) qui êtes sur le banc des accusés. C’est vous qui manipulez les indices, vous qui êtes responsables du crime central, mais aussi des crimes corollaires, comme la disparition de Mohieddine Ghalayini et la mort due à une négligence criminelle de Zahi Abourjeily. Où est la conscience ? Avez-vous perdu toute compassion envers les gens ? Cela est-il le résultat d’un coup de téléphone des SR, d’un fax ou d’une séance de café gorgée de directives émises dans tel ou tel poste de l’est du Liban en direction de toutes les régions de notre patrie captive ? « Tout propos d’incitation sera retourné contre vous et constituera un élément supplémentaire dans le dossier de l’enquête menée par la commission internationale. Et autant nous sommes opposés à la résolution 1559, notamment dans sa clause relative à la Résistance islamique héroïque, autant nous sommes déterminés à nous référer à la 1566 (antiterroriste) pour parvenir à la vérité, puis à la sanction nationale et internationale. Vous n’avez pas plus d’immunité que Milosevic. « J’ai le cœur plein de l’enquête sur l’attentat manqué contre moi et des propos irresponsables, indécents, contradictoires et parfois des témoignages dévoyés du ministre de la Justice. En ma qualité de député, d’ancien ministre, d’acteur dans des conférences de paix et dans l’élaboration de l’accord de Taëf, et en tant qu’allié de la Syrie dans les jours véritablement difficiles, je n’accepte pas de vos semblables des mots tels que ceux que vous avez utilisés. « L’affaire est heureusement sortie du cadre de la justice militaire. Pour ma part, je prépare actuellement un dossier exhaustif autour des indices et des tentatives visant à les faire disparaître pour protéger les auteurs de l’attentat. Le ministre Addoum m’a menacé d’interrogatoire, alors que j’étais aux soins intensifs. Qu’il interroge le peuple libanais sur ce qu’il pense de son comportement, ses commentaires, ses apparitions télévisées et ses pratiques. N’essayez pas de faire peur à quiconque. Tout le monde au Liban sait comment vous aviez été nommé, comment vous travaillez et avec quelles directives. Les sommes d’al-Madina sont dans des poches que vous connaissez, les jetons du Casino aussi. Les tonnes de fuel infiltrées chez quelques hommes influents interpellent le destin de la justice. « Vous vous trompez si vous croyez que le temps fera oublier votre responsabilité dans le crime. Et si vous croyez qu’en faisant allusion de façon criminelle à l’éventualité d’une scission au sein de l’armée, vous parviendrez à prolonger la vie de ce gouvernement ou à affaiblir l’attachement du peuple libanais à l’égard de son institution militaire et de son commandant, vous vous faîtes aussi des illusions ».

Voici de larges extraits de l’intervention du député Marwan Hamadé, qui a sonné comme un coup de tonnerre dans l’hémicycle et a, sans nul doute, contribué psychologiquement à ébranler la confiance du Premier ministre et de son gouvernement :
« Je regarde les rangs du gouvernement et je ne vois personne (...). Ni un Premier ministre ni des ministres. Je vois un vide, ce vide...