L’intifada pour l’indépendance atteint le Canada : 2 500 manifestants à Ottawa(photos)

Deux semaines après l’assassinat de l’ancien Premier ministre Rafic Hariri, la vague de protestation et de colère initiée par l’opposition libanaise continue de se faire sentir, même à l’autre bout de l’Atlantique, au cœur d’Ottawa. Samedi dernier, près de 2 500 manifestants sont descendus dans les rues de la capitale canadienne pour rendre hommage à l’architecte de la reconstruction de Beyrouth et pour protester contre la présence des troupes syriennes sur le sol libanais. Portant des écharpes en rouge et blanc, chrétiens, musulmans et druzes ont scandé haut et fort, devant le Parlement canadien, des slogans et des chants hostiles aux gouvernements syrien et libanais. Venus de Montréal, de Toronto, d’Edmonton et d’autres coins du pays, les manifestants ont répondu à l’invitation du regroupement de l’opposition libanaise au Canada, déterminé à appuyer les Libanais dans leur lutte pour un Liban « libre, souverain et indépendant ». Qu’ils soient installés au Canada depuis deux mois, deux ans ou vingt ans, les manifestants s’étaient réunis, pendant deux heures, sous la neige et dans le froid, pour une seule et même cause : le Liban ! Après avoir observé une minute de silence à la mémoire de Hariri et des victimes de l’attentat meurtrier du 14 février dernier, plusieurs personnalités et représentants politiques libanais ont, tour à tour, pris la parole devant la foule, appelant à l’application de la résolution 1559. Certains d’entre eux ont demandé au Premier ministre canadien, Paul Martin, de présenter ses excuses au peuple libanais pour avoir affirmé « maladroitement » que la Syrie est au Liban pour « garder la paix», allant à contre-courant de sa propre politique étrangère et de l’opinion internationale. Une gaffe que M. Martin a tenté de réparer en affirmant qu’il faisait de « l’ironie », sans toutefois reconnaître officiellement son erreur. Parmi les personnalités qui ont été invitées à prendre la parole, MM. Pierre Poilievre, député de l’opposition canadienne et représentant le Parti conservateur, et Marc Harb, membre du Parlement canadien d’origine libanaise. M. Harb a profité de l’occasion pour saluer la lutte des Libanais pour la liberté dans leur pays. Il a, de plus, appelé le gouvernement à collaborer avec les Nations unies et les pays « amis du Liban » en vue d’appliquer la résolution 1559 « qui demande le retrait immédiat des pays qui possèdent (sur le sol libanais) des soldats et des groupuscules mafieux ». Le député d’origine libanaise a déclaré avoir déposé une pétition auprès du gouvernement canadien contre la tutelle syrienne sur le Liban. « J’ai la certitude que nous nous réunirons encore une fois, très bientôt, mais cette fois-ci, ce serait pour célébrer l’indépendance de notre pays », a-t-il finalement promis à la foule. La manifestation d’Ottawa fut une sorte de défoulement pour les manifestants qui avaient longtemps refoulé des sujets tels que l’assassinat des présidents Béchir Gemayel et René Moawad, du chef du Parti national libéral Dany Chamoun, du leader druze Kamal Joumblatt et de tant d’autres. Le rassemblement a été aussi une opportunité de rouvrir des dossiers occultés comme ceux de la fermeture de la MTV, l’emprisonnement du chef des Forces libanaises Samir Geagea, l’assassinat du militant FL Ramzi Irani, en 2002, et les prisonniers libanais disparus dans les geôles syriennes depuis 1975. « Aucun sujet ne sera plus jamais tabou au Liban... », crie une femme portant un bébé dans le bras. « Je suis ici pour réclamer la vérité sur ce qui se passe, et je pense que tous les Libanais, partout dans le monde, souhaitent la même chose », a-t-elle dit avant de scander, sans relâche, avec la foule : « Syrie dehors ! Vive le Liban libre ! » Rania Massoud