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Abou Tarek, un dévouement jusqu’à la tombe (Photo)

«Écoute mon vieux, nous mourrons ensemble. » L’ancien Premier ministre Rafic Hariri et son fidèle garde du corps Yehia el-Arab, plus connu sous son pseudonyme Abou Tarek, s’étaient promis, sur un ton badin, de mourir ensemble. Le destin n’a pas voulu autrement. Et c’est côte à côte qu’ils ont péri dans l’attentat à la bombe du lundi, qui a coûté la vie à Rafic Hariri, à sept de ses compagnons et à plusieurs autres citoyens dont le chemin les menait en ce jour tragique du côté de Aïn Mreyssé. C’est en 1982 qu’Abou Tarek a rejoint l’équipe de l’ancien Premier ministre. « Après l’invasion israélienne, Beyrouth était en ruines, raconte Tarek, son fils. Mon père était un employé dans la municipalité de Beyrouth. Un jour, son directeur, Fadl Chalak, l’a convoqué dans son bureau lui annonçant qu’un travail volontaire allait être organisé pour débarrasser la ville des décombres. Sans hésiter, mon père a rejoint l’équipe et le travail a commencé. On lui avait confié la direction du centre de distribution des assistances. Un après-midi, après avoir réparti les aides, il a constaté que l’employé de la banque lui avait donné par mégarde un million de livres libanaises de plus. C’était une énorme somme à l’époque. Il rentre alors au bureau de Fadl Chalak et lui annonce qu’il doit retourner à la banque pour rendre le million. À sa sortie, un monsieur, qui a assisté à la scène, demande à Fadl Chalak : “Qui est cet homme ?” “C’est Abou Tarek, le bulldozer dont je vous ai parlé”, répond Fadl Chalak. Et l’homme ajoute : “Est-il possible qu’il veuille rendre un million de livres, alors que personne ne s’est aperçu que la somme manquait ?” Fadl Chalak a alors précisé : “Vous savez, il le fera pour une somme plus énorme encore”. » Cet homme était Rafic Hariri. « Mon père ne le connaissait pas, poursuit Tarek. À peine rentré de la banque, Fadl Chalak le convoque de nouveau dans son bureau et lui annonce que Hariri désirait l’engager dans son équipe personnelle. » Depuis, ils ne se sont plus séparés. Ce sexagénaire (Abou Tarek était né le 22 novembre 1943) est rapidement devenu un fidèle compagnon de Rafic Hariri. « Si le président partait en voyage et qu’il ne pouvait pas l’accompagner, il devenait fou, explique Tarek. Leur relation était intense. Ils se témoignaient une grande affection. » Et de poursuivre : « Ce n’était pas un père, c’était un ami. J’essaie, depuis son décès, de trouver une raison pour m’emporter contre lui. Je n’arrive pas à le faire. C’était un personnage spécial et foncièrement bon. » Père de quatre enfants, Tarek, Alia, Mohammed (décédé) et Waël, Abou Tarek avait quatre petits-enfants : Hana, Jihad et Rama, les enfants de Alia, et Yasmine, la petite fille de Tarek. « Il les aimait tous, signale Tarek. Mais il avait un faible pour Yasmine, qui est d’ailleurs la plus jeune d’entre eux. Elle a un an et cinq mois. Elle connaît trois mots : “Saghi”, le nom de l’employée de maison, “daoua” (médicament) et “dédo” (grand-père). Elle insistait à lui donner personnellement son médicament. D’ailleurs, personne ne pouvait le faire en sa présence. Depuis quatre mois, je vis avec mes parents, à cause des travaux de réhabilitation que j’effectue dans ma maison. Chaque matin, mon père me disait : “j’espère que ton chantier ne finira pas, pour que Yasmine reste chez moi”. Jihad (5 ans), quant à lui, ne croit pas que son grand-père est décédé. Il raconte qu’il est allé faire un tour au paradis. » Et Tarek de conclure : « La mort est normale, mais la séparation est pénible. » Nada MERHI
«Écoute mon vieux, nous mourrons ensemble. » L’ancien Premier ministre Rafic Hariri et son fidèle garde du corps Yehia el-Arab, plus connu sous son pseudonyme Abou Tarek, s’étaient promis, sur un ton badin, de mourir ensemble. Le destin n’a pas voulu autrement. Et c’est côte à côte qu’ils ont péri dans l’attentat à la bombe du lundi, qui a coûté la vie à Rafic Hariri, à...