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Actualités - OPINION

EN DENTS DE SCIE - Toutes les chèvres et tous les choux

Sixième semaine de 2005. Lundi, Aïn el-Tiné... La photo de famille est édifiante. À une exception près – Hassan Nasrallah, et encore... –, chacun des hommes présents sur le cliché doit tout ou presque à la Syrie. À commencer par le très décevant Omar Karamé, décidément frappé d’un alzheimer bien particulier, capable d’effacer de la mémoire de l’effendi plein de rage ses propres mots, pas si vieux que ça, sur toutes les misères que lui a fait subir le tuteur syrien, aussi bien que ses appels publics au calme et à la modération, lancés il y a quelques semaines à l’adresse de certains de ses ministres particulièrement hargneux contre l’opposition. À Aïn el-Tiné donc, ces hommes qui n’ont pratiquement rien en commun à part leur allégeance à Damas, ont choisi de ne retenir de l’accord de Taëf – en le pervertissant, comme d’habitude – que l’abolition du seul confessionnalisme politique, tout en réitérant leur attachement viscéral et aveugle à la Syrie, ainsi qu’à la concomitance des deux volets. À Aïn el-Tiné, en gros, en toute logique et quoi qu’ait pu dire le président de la Chambre, tout était dirigé contre le Bristol. Un mimétisme parfait, même inversé, tellement étudié, calculé, que l’effet miroir en est devenu saisissant : autant ces Bristol 1, 2 et 3 ont matraqué l’urgence et la nécessité de faire évoluer le Liban, de le mettre sur le chemin du beau, du bon, du vrai, de reconstruire un pays, une nation, un État, autant le Aïn el-Tiné 1 s’est employé à asseoir, enfoncer, confirmer l’enlisement du Liban dans une non-République, sa dissolution dans une démocratie avariée, sa régression – en un mot : sa dégénérescence. Voilà le plus beau succès de la Syrie : avoir réussi à fondamentalement diviser un peuple pourtant capable, si on le laisse tranquille, d’inculquer avec toute la patience et la pédagogie du monde la démocratie à l’ensemble du monde arabe. Un schisme même pas idéologique : à Aïn el-Tiné, on veut conserver un poste, ou en recevoir un sans s’encombrer du choix d’un peuple ; au Bristol, on veut sacraliser la décision de ce peuple-là – même s’il y a quelques tentations, par-ci par-là, devenues malheureusement presque naturelles parce que quasi ataviques, d’aider l’électeur à exprimer sa volonté en contrepartie de menus ou gros services... Il y a pourtant un point commun et un seul entre ces deux mondes qu’une désatellisation pourrait plus ou moins vite rapprocher : les Bristol et le Aïn el-Tiné ont tous les deux le mérite d’être on ne peut plus clairs. Chaque homme politique a choisi l’un des deux camps ; même si certains ont préféré, par conviction, aller attendre en silence dans une troisième voie qu’ils estiment, à tort ou à raison, être la bonne. Tous sauf un : Rafic Hariri. Il est inadmissible, parce qu’il veut tout ménager, ou parce qu’il refuse de se prononcer – on ne sait jamais ce qui peut arriver –, ou parce qu’il n’assume pas sa position, ou parce qu’il refuse d’être à pied d’égalité avec les autres, il est inadmissible donc que l’ancien Premier ministre ne se soit pas encore prononcé. Déléguer deux ou trois députés au Bristol ne résout rien, même si le maître de Koraytem travaillait en coulisses pour cette opposition nationale. Il est temps pour Rafic Hariri, s’il veut bénéficier de la confiance des Libanais, de l’aide des différents pôles du Bristol sur l’ensemble du territoire libanais, s’il veut vraiment assurer la victoire et le printemps libanais, de dire on ne peut plus simplement : « Je suis dans l’opposition. » Ziyad MAKHOUL
Sixième semaine de 2005.
Lundi, Aïn el-Tiné... La photo de famille est édifiante. À une exception près – Hassan Nasrallah, et encore... –, chacun des hommes présents sur le cliché doit tout ou presque à la Syrie. À commencer par le très décevant Omar Karamé, décidément frappé d’un alzheimer bien particulier, capable d’effacer de la mémoire de l’effendi plein de rage...