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Actualités - interview

LÉGISLATIVES - L’ancien bâtonnier candidat à l’un des sièges maronites de Baabda Chakib Cortbawi à « L’Orient-Le Jour » : « L’unité de l’opposition passe avant tout » (photo)

En toute chose humaine, la constance est la plus haute expression de la force, disait Balzac. Chakib Cortbawi en sait quelque chose, puisque depuis son entrée en politique, il est resté fidèle à lui-même, à son audace, à son intégrité, à son intransigeance, à ses principes. En résumé, l’ancien bâtonnier de l’Ordre des avocats répond, sur plus d’un point, à la définition que l’on donne généralement d’un « patriote »: il ne manque d’ailleurs jamais une occasion de proclamer son amour pour son pays et de se mobiliser pour toutes les causes justes. On l’a vu ainsi défendre, en 1997, des étudiants tabassés et arrêtés par les forces de l’ordre pour délit de liberté d’expression et de rassemblement. On l’a vu aussi, en 2002, défendre la MTV devant les tribunaux. Son leitmotiv, depuis toujours, est d’inviter les jeunes à rester accrochés à leur pays, de les dissuader de choisir les chemins de l’émigration. Ce n’est donc pas un hasard si le triptyque « liberté, souveraineté, indépendance » a constitué jusqu’à présent le fil conducteur de son parcours politique, du Bloc national de Raymond Eddé au Rassemblement de Kornet Chehwane, en passant par les idéaux souverainistes exprimés par Michel Aoun. De tous ces éléments, Chakib Cortbawi a réussi une synthèse homogène, tentant d’établir, autant que possible, des passerelles entre les différentes fractions de l’opposition. D’où son ardent prosélytisme en faveur de l’unité de l’opposition, raison principale pour laquelle il avait d’ailleurs refusé de se porter candidat à la partielle de Baabda-Aley en 2003. En 2000, déjà, M. Cortbawi, originaire de Kfar Selwane (caza de Baabda), avait rejeté l’idée même d’une députation qui lui aurait été acquise sous condition d’un passage obligé à Anjar. Il s’était alors abstenu de se porter candidat. « Je n’irai jamais à Anjar ou ailleurs pour quémander quelque chose. Les Syriens sont des frères, des voisins, nous avons intérêt à avoir les meilleures relations avec eux, mais il est inadmissible qu’ils gouvernent le Liban, que ce soit à travers le pouvoir politique ou les services de renseignements. Et il est impossible d’assainir les relations avec Damas tant que les troupes syriennes ne se sont pas retirées du Liban. La souveraineté, l’indépendance, la démocratie, la liberté d’élection sont des termes qui ne supportent aucune interprétation. Le retrait syrien aurait déjà dû intervenir en 1991-1992. Mais rien n’a été fait dans ce sens », dit-il. « Et voilà maintenant que M. Farouk el-Chareh veut nous imposer deux nouvelles années. Un nouveau “x + 2” comme celui qu’évoquait le général Aoun à Baabda en 1989. J’ai toujours pensé qu’il avait raison », précise-t-il. Candidat, mais dans la coordination Maintenant que la fermeture de Anjar constitue l’un des points forts des revendications de l’opposition plurielle, plus particulièrement de Walid Joumblatt, songe-t-il à une éventuelle candidature ? « Je pense certainement me porter candidat, mais cela dépend avant tout de Kornet Chehwane puis de la coordination entre toutes les fractions de l’opposition, le courant aouniste, M. Joumblatt, etc. Il s’agit d’une priorité parce qu’il faut qu’il y ait une seule liste d’opposition », répond-il. L’unité de l’opposition est au cœur du discours de l’ancien bâtonnier. « Si celle-ci n’est pas réalisée, nous en assumerons tous les conséquences », souligne-t-il. « Chaque candidat opposant doit être celui de toute l’opposition, et je n’échappe pas à la règle. J’étais membre du BN, je suis membre de Kornet Chehwane et proche du courant aouniste depuis 1990 », notant qu’il maintient d’excellentes relations avec le général. « Quant à Walid Joumblatt, nous sommes sur la même longueur d’onde, et le document du Bristol nous réunit. L’unité de l’opposition doit être la règle pour tout le monde. Et il ne s’agit pas d’un slogan ou d’un concept : cela nécessite des actes », poursuit-il. Pour l’instant, M. Cortbawi reconnaît que les choses se passent bien à ce niveau « malgré les rumeurs », et que tout le monde y met du sien : Michel Aoun tient un discours très positif dans ce sens. « Il s’est abstenu de nommer des candidats par souci de l’intérêt général et pour donner la priorité aux négociations avec l’opposition. Tout le monde doit faire de même », relève-t-il. Kornet Chehwane a mis au point un mécanisme interne pour régler les différends qui pourraient éclater. Walid Joumblatt a récemment affirmé, à l’USJ, qu’il était prêt à former une liste commune avec les fractions chrétiennes de l’opposition dans la Montagne, après s’être concerté avec les membres de son bloc. Quant à Rafic Hariri, il a dépêché trois représentants au « Bristol 3 », ce qui est significatif. « Tout le monde prône l’unité de l’opposition. Tout le monde est aussi conscient qu’il y a des difficultés », indique-t-il. Pour M. Cortbawi, il est clair que, pour préserver l’unité de l’opposition, « tout le monde doit faire des sacrifices ». « Moi-même je devrais en accepter les résultats », dit-il. La clef de cette unité pour faire échec aux difficultés, d’après lui, c’est que « chacun fasse preuve de modestie, d’acceptation de l’autre, de sens de l’intérêt général. Sinon, les Libanais seront démoralisés. L’image que nous présenterons est très importante, très symbolique ». C’est pourquoi tout le monde devra, selon lui, se plier au mécanisme (visant à former une liste unique) établi par l’opposition plurielle, « à commencer par moi-même, parce que l’enjeu est beaucoup plus important que d’être député. L’enjeu est de sauver le pays en rétablissant la souveraineté, la démocratie, l’unité et les relations équilibrées avec la Syrie ». Le chantage officiel inopérant Chakib Cortbawi ne manque pas de mots pour dénoncer les pièges que le pouvoir a tendus à l’opposition plurielle pour tenter de la déstabiliser : il en est ainsi du découpage déséquilibré de Beyrouth, de l’épée de Damoclès sur les médias que constitue l’article 68. « Souvenez-vous, la MTV a été décapitée sans même pouvoir se défendre ! » rappelle-t-il. Il évoque aussi le caractère vaporeux de l’article 63, qui peut ouvrir la voie à tout genre d’abus, et la tutelle du pouvoir sur le Conseil constitutionnel. Dans ce cadre, il n’hésite pas à dénoncer tout le chantage auquel se livre actuellement le pouvoir, estimant que le langage officiel est honteux. « Cela nous incite à dire que ce cabinet n’est pas apte à diriger les affaires du pays et qu’il doit s’en aller. Il doit laisser la place à un gouvernement impartial et compétent », dit-il. Mais Chakib Cortbawi a la certitude que l’opposition ne succombera pas au chantage multiforme, à commencer par Michel Aoun : « Je suis tranquille. Je connais bien Aoun, et je n’ai jamais douté de lui. Il n’est pas le genre à faire des marchandages sur ses principes et sur la souveraineté. Le pouvoir projette sa capacité à conclure des marchés sur les autres. Si Aoun avait accepté un bazar quelconque, il aurait regagné le pays. Le pouvoir rêve s’il croit pouvoir se gagner le général par tous ces baisers de Judas en l’embrassant pour mieux l’étouffer. Le dossier Aoun est politique depuis sa naissance. Ceux qui ont commencé toute cette procédure savent qu’elle est politique. » Reprenant son leitmotiv, en lequel il croit dur comme fer, Chakib Cortbawi souligne enfin, en écho aux propos de Walid Joumblatt : « Toute personne qui sort des rangs de l’opposition plurielle est fichue. Cela s’applique à tout le monde. Il faut être modeste, réaliste et faire des sacrifices, à commencer par moi. Chacun de nous doit se poser une question essentielle : le but est-il d’être élu député ou de sauver l’avenir de nos enfants ? Si le but est la plaque d’immatriculation, ce n’est pas là l’objectif ultime de l’opposition. L’enjeu est bien plus grand. Les ambitions sont humaines et légitimes. Mais l’unité passe avant tout. » Michel HAJJI GEORGIOU

En toute chose humaine, la constance est la plus haute expression de la force, disait Balzac. Chakib Cortbawi en sait quelque chose, puisque depuis son entrée en politique, il est resté fidèle à lui-même, à son audace, à son intégrité, à son intransigeance, à ses principes. En résumé, l’ancien bâtonnier de l’Ordre des avocats répond, sur plus d’un point, à la définition...