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Actualités - REPORTAGE

ARCHITECTURE - la bibliothèque d’Alexandrie, les tours de Kuala Lumpur et la mosquée al-Abbas au Yémen, parmi les œuvres consacrées Le prix Aga Khan, une distinction qui dope l’imagination des grands bâtisseurs (photos)

Pour récompenser des ouvrages d’excellence qui tentent de résoudre des questions de fond et répondre aux préoccupations sociales, culturelles, historiques ou politiques dans le monde islamique, Karim Aga Khan avait créé, en 1977, le prix Aga Khan d’architecture. Rappelons qu’il y a quelques années, le prix a été attribué à la restauration de la mosquée alMansoury, à Saïda, au Liban-Sud. Décerné tous les trois ans, il est doté d’un montant de 500000 dollars américains et est considéré comme « le plus luxueux du monde », pas tant pour la somme allouée qu’à la minutie mise à l’accorder. Car, selon les spécialistes, «aucun autre prix architectural ne s’entoure d’un tel contexte d’enquête et de recherche intellectuelle, ne dépense autant de temps en sélections successives et n’examine un registre aussi vaste de réalisations ». Pour le tout dernier cru, sept projets sur 378 en lice ont remporté le trophée : la bibliothèque d’Alexandrie, en Égypte, les tours Petronas à Kuala Lumpur, en Malaisie, les prototypes d’abris en sacs de sable empilés de façon à former des espaces voûtés ou en coupoles. Expérimenté en Californie, en Iran, en Inde et au Mexique, ce système de construction, destiné aux populations déplacées, peut être intégralement réalisé par les personnes mêmes qui sont amenées à l’utiliser. Également sur la liste des projets lauréats, la restauration de la mosquée al-Abbas près d’Asnaf, au Yémen, et le programme de la revitalisation de la vieille ville de Jérusalem qui se consacre à la réhabilitation des logements, à la restauration des monuments historiques et à la création des espaces publics et communautaires. Le prix a été aussi attribué à l’école primaire de Gando, en Burkina Faso, et à la Maison B2, à Ayvacik, en Turquie, posée telle une sculpture moderne, épurée et rectangulaire au sein d’un village à l’architecture traditionnelle. Concilier le respect de la mémoire historique et les besoins modernes ; permettre à un bâtiment de conserver une fonction sociale plutôt que devenir un objet touristique ; intégrer le projet dans l’environnement et dans la tradition musulmane ont été les maîtres mots de la sélection. Hymne aux progrès Considérée comme l’une des œuvres architecturales majeures des dernières décennies, la bibliothèque d’Alexandrie a été dessinée par une petite firme norvégienne, Snohetta, qui n’avait encore jamais remporté de concours et construit fort peu de bâtiments de grande envergure. La construction, qui a ouvert ses portes en 2002, se présente sous la forme d’un disque oblique, dont la pureté géométrique rappelle à de nombreux égards les grands édifices de l’Égypte antique. Sa façade sud est revêtue de 4 000 blocs de granit sur lesquels ont été gravés les signes alphabétiques du monde. Érigé en bord de mer, sur l’emplacement supposé de l’ancienne bibliothèque, l’imposant complexe est doté d’une salle de lecture d’une capacité de 2000 sièges qui s’élève en terrasses sur huit niveaux, chaque niveau étant consacré à un sujet (philosophie, histoire, religion, géographie, technologies, etc). Il comprend également six bibliothèques spécialisées, trois musées, sept centres de recherche, quatre galeries réservées aux expositions permanentes ou itinéraires, un planétarium, une esplanade, des bureaux administratifs, une cafétéria et tous les équipements nécessaires au fonctionnement de l’édifice. La bibliothèque et le planétarium sont, par ailleurs, reliés au sous-sol à un centre de conférences, tandis qu’une passerelle enjambe l’esplanade permettant ainsi la circulation entre l’université d’Alexandrie et la route côtière. Ce sont toutefois les fondations de la bibliothèque qui constituent la partie la plus « innovante » du projet. Avec un diamètre de 160 mètres et une hauteur de 35 mètres, le mur circulaire, coulé à 18 mètres sous le sol, est considéré comme le plus long du monde. De même, «l’une des caractéristiques et des réussites» de cette œuvre monumentale est l’utilisation de la lumière naturelle qui se déverse du toit, à travers les panneaux vitrés dont «l’orientation a été étudiée à l’aide de simulations informatiques pour introduire un maximum de lumière naturelle tout en évitant qu’elle soit directe». Considérée «révolutionnaire en matière d’architecture et de technologie», la bibliothèque d’Alexandrie s’élève en un hymne à la modernité et au progrès. Mise en scène Le besoin de logement touche des millions de réfugiés et de populations déplacées, victimes de catastrophes naturelles ou de guerres. Pour trouver une solution à ces situations d’urgence, l’architecte iranien Nader Khalili s’est inspiré des formes de constructions vernaculaires en Iran pour développer le système « Superadobe ». La technique de base consiste dans le remplissage des sacs de sable ou de terre et leur disposition en assise sur un plan circulaire. Ces assises circulaires se superposent en diminuant de rayon jusqu’à former une coupole. Pour empêcher la déstabilisation de la construction et lui permettre de résister aux séismes, des fils de fer barbelés sont disposés entre les assises. Différents types de coupoles et de voûtes ont été conçus pour ces habitations, composées d’un espace principal et d’espaces auxiliaires pour la cuisine et les sanitaires. Des agrandissements peuvent être entrepris pour créer un four ou des abris pour les animaux et procurer ainsi à la «maison» un statut moins transitoire. La réalisation de ces logements n’exige ni de gros moyens ni de grands délais et leur qualité hautement isolante les rend très adéquats en zone de climat aride. Ainsi, «le matériel de guerre (sacs de sable) est détourné à des fins pacifiques, en associant l’architecture traditionnelle et les exigences contemporaines en matière de sécurité». Signalons que Nader Khalili est le fondateur de Cal-Earth (California Institute of Earth Art and Architecture), dont les activités couvrent le développement et la conception d’habitations destinées aux sans-abri dans le cadre des programmes des Nations unies, mais aussi des projets de construction sur la Lune ou sur Mars. Ses prototypes qui ont obtenu leur permis de construire en Californie, en 1992, répondent aux exigences pour les logements d’urgence du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (UNHCR) qui a choisi ce procédé en 1995, pour fournir des abris temporaires aux réfugiés affluant en Iran depuis l’Irak. Des prototypes ont été également réalisés en Inde pour les orphelins de la fondation MEG, en Thaïlande, en Sibérie, au Canada, au Mexique, au Brésil et aux États-Unis. En attendant 2008, en route pour de nouvelles aventures architecturales. May MAKAREM Des cadres prestigieux La cérémonie de remise du prix Aga Khan a toujours pour cadre un haut lieu de l’architecture islamique : le jardin de Shalimar à Lahore (1880), le palais de Topkapi à Istanbul (1983), le palais Badi’ à Marrakech (1986), la citadelle de Saladin au Caire (1989), la place du Réghistan à Samarkand (1992), le Karaton de Surakarta à Solo (1995), l’Alhambra à Grenade (1988), la citadelle d’Alep, Syrie (2001) et, pour célébrer la remise du dernier prix, la cérémonie a eu lieu à Agra, en Inde.

Pour récompenser des ouvrages d’excellence qui tentent de résoudre des questions de fond et répondre aux préoccupations sociales, culturelles, historiques ou politiques dans le monde islamique, Karim Aga Khan avait créé, en 1977, le prix Aga Khan d’architecture. Rappelons qu’il y a quelques années, le prix a été attribué à la restauration de la mosquée alMansoury, à Saïda,...