Vient De Paraître « Les sagesses de Jésus le Christ » par Jad Hatem Le Jésus des Évangiles, des gnostiques et des soufis(photo)

En librairie, un grand volume à la couverture jaune-orange et sépia intitulé Les sagesses de Jésus le Christ . Il s’agit d’un florilège des paroles ou de sentences de sagesse attribuées au Christ. L’ouvrage est présenté par Jad Hatem, illustré calligraphiquement par Ali Aïssa et publié par une maison d’édition française Albouraq. Les sentences sont de trois ordres: des paroles recueillies dans les Évangiles canoniques, d’autres dans des écrits gnostiques ou des « évangiles » considérés par l’Église comme apocryphes et enfin des sentences citées par des auteurs soufis, notamment al-Ghazali. L’ introduction très élaborée, très dense de Jad Hatem tente de faire la part des choses, d’établir une typologie de ces sagesses. Elle est, malheureusement, d’accès difficile. On connaît, ou on croit connaître, le Jésus des Évangiles. Jade Hatem fait la part, dans le Jésus des Évangiles, de ce qui est « sagesse humaine » et de ce qui est « sagesse divine ». C’est comme « maître de sagesse incréée », dit-il, que le Christ « communique à l’âme le trésor qu’elle n’a pas reçu en partage lors de la naissance . » Et, citant saint Augustin, Hatem ajoute : « Les prophètes, la Loi et tous les préceptes constituaient des remèdes, mais ce genre de remède n’avait pas encore été guéri. » En d’autres termes, la Loi attendait toujours la grâce, l’effusion de l’Esprit. Et c’est seulement dans l’Esprit Saint que la « sentence de sagesse » ultime, celle d’aimer Dieu par-dessus tout et d’aimer les autres comme soi-même, peut être comprise et vécue. Avec le Jésus des gnostiques, il en va autrement. En dépit de leur séduction, les sentences attribuées à Jésus reflètent la dérive panthéiste du gnosticisme. « Qui ne s’est pas connu n’a rien connu. Mais celui qui s’est connu lui-même a du même coup acquis la connaissance de la profondeur du tout », dit le Livre de Thomas l’ascète. Jad Hatem le souligne : « Le salut ne repose pas ici sur la connaissance de la condition divine du Messie et de son geste salvateur, mais plutôt sur la reconnaissance que tout homme est, de fait, fils du Père vivant ». Mais l’Église enseigne que ce n’est pas « de fait » que « tout homme est Fils », ce serait là panthéisme, mais seulement par adoption, ou encore par grâce. Le Jésus des soufis, dit enfin Hatem, est un maître « dont les excellences sont essentiellement d’ordre pratique, quoique dans un sens transcendant, puisqu’il lui revient de typifier les attributs de la douceur (...) On ne le voit guère discuter théologie ou même instruire des fins dernières où pourtant il est censé jouer un rôle ». Malgré ces réserves, le florilège reste valable, pour le jour parfois inattendu sous lequel il montre le Christ. Il comprend, par exemple, des sentences peu connues de Jésus, telle cette parole citée par les Actes des Apôtres. « Il y a plus de joie à donner qu’à recevoir », qui devrait servir d’exergue à toutes les associations d’aide humanitaire. Ou encore l’esthétique « Soyez passants » de l’Évangile de Thomas, découvert en 1945 dans les sables de la Haute-Égypte, qui concorde bien avec l’appel du Christ au détachement. Les sentences et anecdotes attribuées par les auteurs soufis à Jésus ne laissent pas, non plus, indifférents. Ghazali attribue, par exemple, au Christ, cette parole: « J’ai été capable de ressusciter les morts, mais je n’ai pu guérir l’insensé. » Vraisemblable. L’Évangile selon saint Jean s’achève sur un avertissement. L’évangéliste nous dit que si l’on devait relater tous les signes et toutes les paroles prononcées par Jésus, « le monde même ne suffirait pas à contenir les livres qu’on écrirait ». De cet ouvrage sur Jésus qui s’ajoute aux milliers que le Christ a inspirés depuis 2000 ans, se dégagent peut-être plusieurs sagesses , mais la suprême sagesse du Christ restera à jamais celle dont saint Paul a parlé et qui s’est manifestée dans « la folie de la Croix ». Fady Noun